L'étendue d'un problème
Durant la rencontre du 22 mai organisée au Gaec Larivé (Mont-et-Marré) par la Chambre d'agriculture de la Nièvre en partenariat avec l'Association des moutonniers Nivernais, la prédation fut abordée.

Afin de partager leurs expériences, certains éleveurs ovins ont participé à une demi-journée de visite au Gaec Larivé (Mont-et-Marré), le 22 mai. Organisée par la Chambre d'agriculture de la Nièvre en partenariat avec l'Association des moutonniers Nivernais (AMN 58), la rencontre se voulait un lieu d'échanges privilégiés entre professionnels. Ainsi, outre la présentation du système du Gaec ou des futures rencontres possibles, les éleveurs ont abordé la question de la prédation, avec l'intervention de Sébastien Larivé, associé du Gaec avec Vincent Larivé. « J'ai vécu deux attaques : le 13 mars et le 10 avril avec respectivement une perte de 12 bêtes puis 8. Suite à cela, nous sommes arrivés à la conclusion que notre système, dont les agnelages sont étalés sur quatre périodes, n'est pas adapté face à la prédation, car les solutions proposées ne sont pas viables pour nous ».
Dans l'impasse ?
Afin d'éclairer son point de vue, il développe : « en effet, nous avons dix lots d'animaux. Avec une base de deux chiens de protection par lots, cela serait ingérable. Nous sommes éleveurs de moutons pas de chiens. Pour les clôtures électriques, nous n'en avons jamais utilisé. Pour ce point, en plus de l'investissement financier que cela représente, il faut aussi penser à l'entretien… Là encore, cela n'est pas, pour nous, la bonne solution ». En parallèle, il évoque les indemnisations en cas de prédation. « Nous avons été attaqués le 13 mars, et en date du 22 mai, nous n'avons toujours rien perçu. Pourquoi les dossiers sont-ils si lents à être traités ? Les Pouvoirs publics ne se rendent pas compte des conséquences économiques d'une attaque. Pour l'exemple, avec la forte demande en agneaux, cette année était assez bonne pour nous, mais après l'attaque, tout le travail a été mis à mal. Au final, c'est environ 4 000 euros que l'on ne retrouvera pas, et c'est sans compter la perte génétique. De ce fait, nous partons déjà avec un handicap pour la suite de la campagne ; c'est assez rageant de se dire que tout l'investissement fait est réduit à néant par un seul prédateur ».
Pour Sébastien Larivé, les conséquences vont bien au-delà de l'aspect professionnel. Cela joue sur le moral et sur le physique. « Toute la vie de famille est impactée. Même si un loup a été abattu, nous savons pertinemment que la menace sur nos troupeaux est toujours présente. D'autres attaques auront lieu et pour le moment il n'y a aucune solution. En tant qu'éleveur, nous avons toujours des problématiques qui s'imposent à nous, comme les maladies vectorielles. Mais, nous trouvons toujours des solutions pour y faire face. Avec la prédation, j'ai le sentiment que nous n'en avons pas et je me sens démuni ».
Une intégration à faire
En réponse, Jean-Marc Bertrand, polyculteur-éleveur à Sainte-Colombe-des-Bois et élu à la CA 58, stipulait lors des échanges de la demi-journée du 22 mai : « Même si certains départements à proximité gèrent cette problématique de la prédation depuis longtemps, la Nièvre n'était pas pour autant préparée à y faire face. Je compatis à la douleur de tous les éleveurs dont les cheptels ont été prédatés. Je connais leurs sentiments, ayant moi-même subi une attaque. La Chambre d'agriculture travaille pour trouver des leviers techniques et économiques pour s'en sortir. Il est indispensable de prendre en compte la prédation dans les résultats économiques d'une exploitation et ce afin de pouvoir lisser les pertes, comme pour un aléa climatique. Avec la hausse des cours, la production ovine reste une des plus rentables dans le département… À condition que la technique occupe une place centrale dans la pratique, compétence que la Chambre d’agriculture peut apporter d’ailleurs ». Sébastien Larivé conclut : « Aujourd'hui, les éleveurs subissent les attaques de plein fouet, et je suis persuadé que dans 5 à 10 ans, la prédation ne sera plus uniquement notre problème, mais bien celui de tout le monde ». En attendant, les éleveurs nivernais continuent de travailler avec cette épée de Damoclès au-dessus de leurs têtes…
