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Agronomie

Et si les sols avaient besoin d’être couverts ?

Agro-écologie, préservation des micro-organismes, réduction des intrants... La recherche avance sur ces problématiques et la régénération des sols devient un enjeu d’avenir.
Par Myriam Tricoci
Du 28 septembre au 8 novembre 2015, un MOOC en agro-écologie(1) sera proposé gratuitement aux agriculteurs. Un MOOC ? C’est un terme anglais qui signifie «cours massif en ligne». Une façon de donner accès direct aux agriculteurs aux nouvelles techniques. En effet, depuis quelques mois, l’agroécologie est de tous les discours. Parmi les différentes expériences et méthodes de cette vision de l’agriculture, la conservation des sols est un sillon à suivre.
En 2007, le projet ECOMIC-RMQS a été lancé en France. Le conservatoire des sols de l’INRA, à Orléans, a constitué un fond de cartes qui permet de mieux connaître les micro-organismes du sol (plus d’un million par gramme de sol) et leurs fonctions. Selon les chercheurs de l’INRA «les résultats de cette recherche viennent alimenter le premier référentiel sur la biodiversité microbienne des sols. Grâce à l’enregistrement de l’ensemble de ces données, il est désormais possible de mettre au point des bio-indicateurs fiables de la qualité des sols qui seraient directement opérationnels pour les exploitants agricoles».

Une gestion différente
En attendant, les techniques culturales simplifiées (TCS) qui font, petit à petit, leur chemin, peuvent être une option intéressante pour conserver un sol vivant et de bonne qualité.
En Ariège, par exemple, la Chambre d’agriculture a invité un pionner, Frédéric Thomas, agriculteur fondateur et rédacteur en chef de la revue TCS, consultant et formateur, pour évoquer cette méthode travail qui continue a alimenter le débat et - parfois - la polémique. Pour lui, «l’amélioration de la vie du sol passe par la réduction voire la suppression du travail du sol, la mise en place de couverts intermédiaires performants et l’adaptation des rotations».

Un début difficile mais des résultats
Mais le passage du travail du sol aux TCS demande un véritable effort. Et un temps long pour en récolter les fruits. «Nous sommes dans une lutte entre l’immédiat et le moyen terme. Ce qui est bon à moyen terme n’est pas forcément visible dans l’immédiat. Et ce qui est visible dans l’immédiat n’est pas forcément bon à moyen terme» souligne Frédéric Thomas. Car le sol labouré n’a plus de structure verticale (galeries de vers de terre, racines). Et si l’on passe directement en TCS, il va y avoir une perte de fertilité. Donc, selon le spécialiste, dans un premier temps, «il ne faudra pas lésiner sur l’apport de fertilisants pour des cultures gourmandes telles que le maïs en attendant de retrouver une fertilité naturelle du sol par le biais de la matière organique».
En effet, il faut laisser le sol se «reconstruire» avant de voir les effets du non-labour. Mais ensuite, les TCS permettent de réduire de moitié la consommation de gazole, d’intrants et accélèrent les débits de chantier. «Le temps de travail est de 4,8 heures par hectare avec le labour, de 3,3 heures par hectare en TCS et de 2,2 heures par hectare en semis direct» indique Frédéric Thomas avant de préciser : «Mais, ces techniques procurent aussi et surtout des avantages agronomiques». En plus de son rôle de protection du sol, la matière organique laissée sur place va nourrir l’activité biologique et corriger les défauts de texture des sols. A terme, le couvert végétal va apporter de l’azote, limiter le lessivage, améliorer le pH. Reste à bien comprendre le fonctionnement du sol, à se former et à être patient pour gagner du temps et un sol différent.

(1) https://www.france-universite-numerique-mooc.fr/courses/Agreenium/66001/session01/about

Conservation des sols

Le terme d’«agriculture de conservation» a été créé par la FAO (l’organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation) en 2001. Il s’agit, essentiellement, de conserver la fertilité des sols agricoles en «les préservant contre les processus de dégradation qui peuvent les affecter, en particulier en luttant contre l’érosion». Pour ce faire, la FAO indique que trois facteurs doivent être respectés : couverture maximale des sols, réduction du travail du sol, allongement et diversification culturales, avec, notamment, des cultures intermédiaires. La FAO a fixé un seuil minimum de couverture des sols par les résidus du précédent cultural de 30 % après semis, ce taux de couverture correspondant au minimum indispensable pour limiter les phénomènes d’érosion. En 2010, la FAO estimait que plus de 100 millions d’hectares étaient cultivés en agriculture de conservation dans le monde, pour seulement 45 millions au début des années 2000. En Europe, ces pratiques sont encore peu développées.