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Production de miel

«É‰leveur-naisseur» d'€™abeilles : la face cachée de l'€™apiculteur

Depuis une dizaine d'€™année, les conditions d'€™exercice de l'€™apiculture et les pratiques apicoles ont beaucoup évolué. Problèmes sanitaires, baisse de productivité de ruches, sur-mortalité des abeilles, la production se complexifie. Le maintien de la productivité des ruches passe désormais par des compétences techniques accrues. L'€™apiculteur se doit d'€™être un éleveur attentif et accompli.
Par ANNE-MARIE KLEIN
«É‰leveur-naisseur» d'€™abeilles : la face cachée de l'€™apiculteur
Christine Busson, apicultrice « transhumante », transporte ses colonies au gré des floraisons saisonnières. Elle transforme et vend toute la production de ses 200 ruches exclusivement en vente directe.
Quand on écoute Christine Busson, apicultrice professionnelle depuis 26 ans, on se rend très vite compte que pour produire du miel aujourd'€™hui et en vivre, rien ne doit être laissé au hasard. Entre hier et aujourd'€™hui, la différence est de taille [I]«les récoltes ont beaucoup diminué ces dix dernières années, sous l'€™effet notamment de l'€™évolution des variétés, pour les colzas comme pour les tournesols, la source nectarifère est moins abondante»[i] témoigne cette apicultrice très engagée dans les instances professionnelles, à l'€™ADAB* comme à la commission apiculture de la FNSEA.

[INTER]Une transhumance indispensable[inter]
Christine Busson parle d'€™expérience, installée près de Fouchères, dans l'€™Yonne, elle constate que dans ce secteur en particulier, le miel de colza se fait rare et le tournesol lui emboîte le pas, au point que cette année elle n'€™a pas cherché à mettre ses ruches dans les tournesols, [I]«ce n'€™est heureusement pas pareil partout»[i] tempère-t-elle. En 2011, le printemps bien ensoleillé a favorisé la production, mais à partir du mois de juillet la nourriture devient plus difficile à trouver. Dans ce contexte, les couverts mellifères arrivent à point nommé pour nourrir les abeilles. Christine Buisson est très satisfaite de ces implantations réalisées avec le concours des producteurs céréaliers. Dans l'€™Yonne, la profession agricole a implanté 70 hectares de ces couverts mellifères qui ne servent pas seulement à faire joli dans la campagne, mais nourrissent bel et bien des abeilles toujours en quête de nourriture. «Il en faudrait dix fois plus...», constate cependant l'€™apicultrice qui, comme beaucoup d'€™autres professionnels pratique [I]«la transhumance»[i]. Les ruches voyagent souvent et de nuit, pour éviter le stress. Celles de Christine Busson vont même jusque dans l'€™Oise pour produire du miel de tilleul. L'€™ONF attribue aussi des parcelles de butinage aux apiculteurs et, de saison en saison, la transhumance s'€™organise à la recherche des sources de nourriture les plus intéressantes.

[INTER]Un élevage à part entière[inter]
Si les couverts mellifères et la transhumance permettent de soutenir la production de miel, la technicité est tout aussi indispensable au maintien du bon état sanitaire des ruches. [I]«La récolte en dépend»[i], explique Christine Busson qui relève [I]«une grande évolution dans le travail de la ruche depuis quinze ans. L'€™apiculture exige aujourd'€™hui un grand niveau de technicité, car un apiculteur professionnel doit aussi être un éleveur de reines»[i]. Entre l'€™infiniment petit du monde des abeilles et l'€™infiniment grand de l'€™élevage bovin il n'€™y a que quelques centaines de kilos de différence... Pour le reste on raisonne aussi [I]«souches», «lignées», «cheptel», «reproduction», «insémination»[i]... Un vocabulaire d'€™éleveurs à part entière, même si les éleveurs d'€™abeilles interviennent et travaillent dans une autre dimension.
Une reine qui vit cinq ans, peut décliner dès l'€™âge de trois ans, l'€™apiculteur a donc intérêt à suivre ses ruches de près pour en maintenir la productivité et repérer les colonies les plus dynamiques. C'€™est dans celles-ci qu'€™il prélèvera les larves des futures reines qui seront sélectionnées et élevées à l'€™écart dans des ruches [I]«orphelines»[i]. Autant de gestes très techniques dont la productivité des ruches dépend. Car les colonies d'€™abeilles doivent être prêtes et réactives dès le début de la floraison. «[I]Pour faire du miel on a tout avantage à disposer d'€™un cheptel homogène» [i]insiste Christine Busson, [I]«les jeunes reines apportent plus de dynamisme aux colonies qui résistent mieux aux attaques des parasites»[i]. Car les abeilles ont un ennemi terrible, «c'€™est leur principal problème et le pire de tous» explique l'€™apicultrice qui désigne le varroa, un acarien parasite qui mutile les abeilles et affaiblit les ruches. Les parades existent mais ce parasite (visible à l'€™œil nu) qui continue de vivre au dépends des abeilles est difficile à contenir sur des cheptels affaiblis.
Une satisfaction en 2011 pour les producteurs de miel, [I]«le marché français se porte bien, du fait notamment de la diminution des volumes produits»[i], remarque Christine Busson, qui déplore la concurrence de certains miels de la Communauté européenne et hors Communauté, dont la qualité laisse à désirer et qui dégrade l'€™image du miel en général. La production de miel en France ne répond qu'€™à la moitié des besoins, une situation qui amène des réponses, en termes d'€™importation, souvent plus quantitatives que qualitatives. Dans nos régions de production, les apiculteurs comme Christine Busson, ont fait le choix de la qualité et cela ne peut se faire [I]«qu'€™en respectant la ruche et son travail»[i].

La production en France et ailleurs

Les trois plus gros exportateurs de miel sont la Chine, le Mexique et l'€™Argentine. Les trois importateurs les plus importants sont l'€™Union européenne, les USA et le Japon. L'€™Union européenne est le deuxième producteur mondial, avec 200 000 tonnes produites et deux grands producteurs : l'€™Espagne et la France. L'€™apiculture regroupe en France 80 000 producteurs, dont 2500 apiculteurs professionnels qui détiennent 50% du cheptel. La France produit près de 20 000 tonnes de miel et en consomme 40 000 tonnes... La Bourgogne se place au 6ème rang de la production nationale avec 4240 apiculteurs recensés, dont 80 professionnels qui détiennent 50% du cheptel. Les 68 000 ruches de la région produisent 1400 tonnes par an. C'€™est une production très diversifiée valorisée en grande partie en circuits courts avec transformation sur l'€™exploitation. Dans l'€™Yonne plus précisément, on compte 1257 apiculteurs, dont 29 professionnels qui détiennent 60% du cheptel départemental. Les exploitations apicoles comptabilisent de 250 à 600 ruches, pour 1 à 4 UMO (Unité de main d'€™œuvre) et un EBE de 50 à 140 euros par ruche. Leur chiffre d'€™affaires est compris entre 40 000 et 120 000 euros. La production icaunaise se diversifie selon les différentes origines du miel : arbres fruitiers, colza, acacia, châtaignier, ronce et (de moins en moins) tournesol.