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Consommation

«Dis-moi ce que tu veux, je te dirai comment t’en passer !»

La crise influe sur le comportement des consommateurs. C’est ce qu’est venu rappeler Franck Lehuédé, chercheur au Credoc (Centre de Recherche pour l’Etude et l’Observatoire des Conditions de Vie), invité de l’assemblée Générale de la coopérative 110 Bourgogne.
Par Dominique Bernerd
«Dis-moi ce que tu veux, je te dirai comment t’en passer !»
Franck Lehuédé était l’invité de l’Assemblée générale de 110 Bourgogne, le 6 décembre dernier, à Auxerre
Alors que 60 % de la population considèrent que leur pouvoir d’achat va diminuer dans les 12 mois à venir, jamais les effets de la crise ne se sont autant fait ressentir sur la consommation, qu’aujourd’hui. Pessimistes et désabusés, les Français ont toujours un [I]«vouloir d’achat»[i], mais le pouvoir d’achat ne suit pas et influe sur les habitudes. C’est ce qu’est venu expliquer Franck Lehuédé, chef de projet senior au sein du département Consommation du Credoc, intervenant à l’assemblée générale de 110 Bourgogne, le 6 décembre dernier.
L’anticipation sur l’avenir est aujourd’hui majoritairement négative. La faute au chômage, aux années de pouvoir d’achat en berne, à la perception parfois qu’ont les français de la crise elle-même… Le moral des Français atteint des profondeurs abyssales, avec comme élément déterminant, des réductions drastiques dans leurs dépenses de consommation. Secteurs les plus touchés: les loisirs (- 57 %), l’habillement (-56 %), l’équipement de la maison (- 37 %). Arrive en 4e position l’alimentaire, pour
17% de la population, qui a décidé de faire des arbitrages en défa-veur de ce secteur jusqu’alors préservé. Pour la première fois, on enregistre deux années de baisse consécutive en ce domaine. Pour un certain nombre de consommateurs, comme le souligne Franck Lehuédé, [I]«l’alimentaire est de-venu aujourd’hui une variable d’ajustement, comme peut l’être le loisir ou l’achat d’une automobile»[i].
[INTER]Recul de la consommation des produits carnés[inter]
Les raisons sont multiples et entre autres, générationnelles : [I]«plus vous appartenez à une génération ancienne, plus l’alimentaire a de l’importance et plus les arbitrages vont s’exercer sur d’autres secteurs…»[i] Si depuis le début de la crise, les produits laitiers s’en tirent plutôt bien, de même que des valeurs refuges comme le pain et les céréales, on constate un net recul de la consommation des produits carnés, notamment la viande rouge, passée, chez la [I]«génération robot électrique»[i] (1937-1946), de 800 € à 400 € par an. La crise de confiance née des fraudes autour de la viande de cheval venant accentuer le problème. Par ailleurs, si l’attrait pour les produits alimentaires locaux s’amplifie, il ne concerne encore seulement que 10 % de la population.
Si à une époque, le milieu marketing plébiscitait [I]«la ménagère de moins de 50 ans»[i], il a compris depuis tout l’intérêt des [I]«plus de 50 ans» [i]: [I]«un créneau qui fera 47 % de la population en 2015, mais représentera plus de 60 % du marché alimentaire. D’où l’enjeu de comprendre et répondre à leurs attentes…»[i] En revanche, l’alimentaire a des inquiétudes à se faire, au regard des habitudes de consommation des plus jeunes, plus enclins à diriger leurs dépenses vers les loisirs et les communications : [I]«les 22 ans d’aujourd’hui en auront 82 dans 60 ans. S’ils continuent à avoir le même comportement, le marché alimentaire ne représentera plus alors que 7 à 8 % de l’ensemble des dépenses…»[i]
La crise ? Quelle crise ? Après tout, mieux vaut se souvenir de ce que disait le regretté Coluche: [I]«Dis-mois ce que tu veux, je te dirai comment t’en passer !»[i]