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Vendanges de la Cnaoc

Des vendanges très «politiques»

C’est en Saône-et-Loire, à Prissé, que la Cnaoc organisait le 29 septembre ses traditionnelles «vendanges», des vendanges très politiques puisqu’occasion d’adresser un message «de rentrée» aux organisations partenaires, aux administrations, mais aussi à nombre d’attachés parlementaires…
Par Ma signature
Des vendanges très «politiques»
Un moment d’échange qui a permis de faire passer de nombreux messages.
La semaine dernière, les vendanges battaient leur plein dans le Mâconnais, et c’est l’endroit qu’avait choisi la Cnaoc (Confédération nationale des viticulteurs en AOC) pour ses traditionnelles «vendanges», lesquelles tiennent lieu, certes de moment sympathique, mais aussi de moments d’échanges sur les sujets qui préoccupent les viticulteurs de vins d’appellation. Y sont ainsi invités les partenaires de la Cnaoc, les administrations qui, de près ou de loin, travaillent avec la viticulture d’appellation, nombre d’attachés parlementaires de députés ou de sénateurs élus dans des secteurs viticoles, mais aussi la presse, locale et spécialisée. Bref, du beau monde.
«C’est en effet un moyen de passer des messages dans la convivialité et avec le sourire», confirmait Éric Tesson, juriste à la Cnaoc et bras-droit du directeur, Pascal Bobillier-Monnot, retenu par ailleurs.
Et les messages ont été transmis, dès le départ. «La viticulture est une production qui rencontre des problèmes également, et nous avons bien l’intention de les faire entendre», poursuivait Éric Tesson.

Des messages francs
«Avec la machine à vendanger, au moins, il n’y a pas la complémentaire Santé dès le premier jour des vendanges», lançait avec un brin d’ironie Jean-Michel Aubinel, président de la CAVB, alors qu’il faisait visiter son chai et qu’il présentait l’exploitation qu’il conduit avec Marie Canard, sa compagne, et Vincent Nectoux, son associé. Une boutade certes, mais qui avait le mérite de camper le décor sans ambages. Rapidement, il fut question de main-d’œuvre, de son coût aussi, mais surtout, surtout des contraintes administratives et de leur empilement…
La visite du chai était suivie d’une visite dans les vignes, là même où la machine à vendanger opérait les vendanges ce jeudi matin ; elle se poursuivait dans les chais des Vignerons des terres secrètes, où la délégation était accueillie par Michel Barraud, président de la cave coopérative, et par Charles Lamboley, responsable des ventes directes et du développement de l’œnotourisme. Enfin, elle se poursuivait au Vinipôle Sud Bourgogne à Davayé avec, notamment, la visite de l’unité de traitement des greffons à l’eau chaude dans le cas de la lutte sanitaire, notamment contre la Flavescence dorée.

L’enfer est pavé de bonnes intentions…
«On entend beaucoup parler de la compétitivité comme étant le vrai défi. Pour autant, il ne nous semble pas que ce soit le sujet. Le problème, c’est l’inflation réglementaire et législative», plaidait Éric Tesson, qui se risquait à rêver d’une «trêve législative» alors même que notre appareil législatif français aurait voté entre 3 500 et 4 000 textes de loi au cours de la seule dernière mandature… Un chiffre qui, s’il est avéré, donne à lui seul le vertige, et illustre l’inflation de la législation qui conduit à l’embolie économique. D’où l’urgence d’appuyer sur «pause» !
On le sait, l’enfer est pavé de bonnes intentions… Ainsi, d’une intention noble et généreuse arrive-t-on souvent à de réels monstres technico-administratifs. Le rattachement des salariés à la Complémentaire santé dès la première heure travaillée en est un. Jean-Michel Aubinel tout comme Éric Tesson le dénonçaient avec force, le premier rappelant les réactions nombreuses dont les viticulteurs bourguignons avaient fait preuve lors des réunions de pré-vendanges organisées en Saône-et-Loire avec l’Union viticole de Saône-et-Loire.

On ne cesse d’ajouter des formalités aux formalités et l’embauche de saisonniers comme les vendangeurs en devient dissuasive au point que les employeurs préfèrent de plus en plus recourir à des sociétés extérieures d’intérim basées à l’étranger. «On marche sur la tête dans un pays qui frise avec les 10 % de taux de chômage», concluait sur le sujet le viticulteur de Prissé.
Et de poursuivre : «c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. On va dans le sens inverse de la transmission d’un savoir-faire, d’une culture à nos jeunes. Autrefois, tous les enfants de nos voisins étaient embauchés pour participer aux vendanges», ajoutait Jean-Michel Aubinel, qui déplore les freins actuels qui n’incitent plus à cet élan collectif.

Un manque de souplesse
Autre dossier qui agace, la remonté des modifications des cahiers des charges à la Commission européenne… «Les moindres modifications des cahiers des charges remontent à la Commission, or il suffirait que seuls les éléments qui intéressent l’ensemble des opérateurs européens soient soumis à l’examen de Bruxelles», argumentait Éric Tesson. La Cnaoc plaide en effet pour plus de souplesse afin que «ne soit pas renvoyé à la Commission européenne ce qui n’a pas lieu de l’être» comme, par exemple, des modifications de cépages secondaires dans un cahier des charges d’appellation. Certaines évolutions «ne regardent que l’environnement du cru». Et Jean-Michel Aubinel de citer en exemple la mise en bouteilles dans la zone de l’appellation.
«Là où l’on pouvait revoir les cahiers des charges avec une certaine souplesse, aujourd’hui, dès qu’on veut changer une virgule, il faut passer par Bruxelles», s’agaçait Jean-Michel Aubinel.
La journée a été l’occasion d’aborder maintes autres sujets, comme les droits de plantations, au sujet desquels la Cnaoc se réjouit d’être parvenue à réintroduire «un dispositif de gestion de la production», alors que les autres production agricoles n’y sont, elles, pas parvenues. On pense à la suppression des quotas laitiers ou des quotas sucriers… entre autres.
Il fut bien entendu question de l’environnement, «un raz-de-marée qu’on aura bien du mal à retenir», notait Éric Tesson qui plaidait en faveur de l’indispensable réconciliation des parties sur le sujet au regard des enjeux économiques et territoriaux notamment. Il fut encore question de Vin & Société, de surfaces viticoles alors que certaines administrations semblent remettre de plus en plus fréquemment en cause la surface cadastrale, celle-là même qui sert de base dans l’ensemble de la réglementation : «un sujet à tension», lançait Éric Tesson à l’attention des représentants de la DGDDI, c’est-à-dire des Douanes…
À n’en pas douter, ce temps d’échanges dans la convivialité a permis de faire passer quelques messages. À bon entendeur…