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Plateaux

Des terres qui posent question

Le président de la Chambre d’agriculture s’interroge sur le devenir des parcelles à très faibles potentiels.
Par AG
Des terres qui posent question
Vincent Lavier, la semaine dernière dans son orge de printemps, qui « jouait les prolongations » avec la présence de nombreux grains verts.
Il y a tout juste un an, Vincent Lavier qualifiait 2019 de « l’année de tous les écarts » dans les colonnes de Terres de Bourgogne. Le président de la Chambre d’agriculture de Côte-d’Or utilise à nouveau les mêmes termes pour illustrer les moissons 2020 qui viennent de s’achever : « Cette tendance se vérifie encore cette année, avec des écarts qui semblent encore plus prononcés. Je ne sais pas si ceux qui s’en sortent le mieux font davantage qu’en 2019, mais une chose est sûre : du côté des mauvais résultats, c’est pire que l’année dernière. Un certain nombre d’anciens affirment qu’il s’agit de la plus mauvaise moisson de leur carrière ».

Changer les habitudes ?
Vincent Lavier mentionne plusieurs « scores » révélateurs dans son secteur d’Is-sur-Tille : « certains blés ici font moins de 30 q/ha, de l’orge d’hiver descend en dessous de 20 q/ha. En colza, des agriculteurs enregistrent des 10, 7, 5 voire 3 q/ha. Il manque plus de la moitié des volumes en paille. Dans le même temps, au sud du canton, des parcelles de blé atteignent les 90 q/ha. On trouve vraiment les deux extrêmes au sein d’un même canton, les résultats sont très disparates, à l’image de la situation dans le département ». Ces moissons interpellent le responsable professionnel : « ce que nous avions l’habitude de faire jusqu’à aujourd’hui semble totalement remis en cause avec l’impact des aléas climatiques que nous connaissons. Nous sommes à court de solutions devant cette problématique de rentabilité, la valorisation des plus mauvaises parcelles pose plus que jamais question. J’ai eu écho que certains exploitants ne voulaient plus re-semer certaines terres, d’autres souhaiteraient même s’en débarrasser… ».

La tentation du bio ?
Privilégier des systèmes de production peu coûteux et développer des activités annexes sur les exploitations font certainement partie des pistes à étudier : « nous ferons le bilan de cette campagne le 20 août à la Chambre d’agriculture, en présence des instituts techniques. Nous avons notamment mis le bio à l’ordre du jour. Les données chiffrées qui nous seront présentées seront certainement riches en enseignements. En l’absence de maladies, le bio semble s’en être plutôt bien tiré cette année. Notre agriculture a également besoin de projets novateurs. Pour ce faire, il nous faudrait des dérogations à titre expérimental, je pense notamment à la méthanisation qui est aujourd’hui limitée par un taux de 15 % de cultures dédiées. Le photovoltaïque au sol est un autre sujet qui nous monopolise de plus en plus. Les spécificités de nos plateaux sont aujourd’hui très bien identifiées, j’en veux pour preuve le rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER). Les remontées au ministère ont été nombreuses ces derniers temps, ces demandes doivent se concrétiser par un certain nombre d’actes très pragmatiques en notre faveur ».

De maigres résultats

Vincent Lavier, en Gaec avec son frère Laurent à Saulx-de-Duc, obtient des rendements de 34 q/ha en orge d’hiver, 18 q/ha en pois d’hiver, 13 q/ha en colza, 52 q/ha blé et 42 q/ha en orge de printemps. Les caprices de la météo n’ont rien pardonné. Illustration du stress hydrique des plantes, de nombreux grains verts étaient encore présents ces derniers jours dans plusieurs parcelles d’orges de printemps, retardant ainsi la récolte : « les champs avaient pourtant été semés dès le 22 février, ce phénomène est typique des champs à très faibles potentiels et à très faibles réserves hydriques. C’est la première fois que nous voyons cela dans de telles proportions. Nous avons eu un problème similaire dans les orges d’hiver et même dans une partie des parcelles de blé, dont la moisson s’est étalée sur deux semaines. Par chance, il n’y aura pas de perte de qualité car il ne pleut pas. Il n’y a pas non plus d’urgence absolue en termes d’organisation car nous ne sèmerons pas beaucoup de colza ».