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Viticulture

Des étoiles pour désherber

Dans le cadre des rendez-vous Innov’Action, la Chambre d’agriculture de l’Yonne a organisé une démonstration de désherbage mécanique associant une lame bineuse intercep et une étoile Kress.
Par Dominique B­ernerd
Des étoiles pour désherber
S’approchant au plus près, les bineuses à doigts viennent «  lécher  » les pieds de vigne et soulever les adventices.
Le désherbage mécanique sous le rang tend à se répandre, même en culture conventionnelle, où il est le plus souvent, associé à des traitements chimiques. Plus destinées à un entretien régulier qu’à une première intervention en sortie d’hiver, les lames bineuses interceps coupent les racines des adventices en place qui vont ensuite se dessécher. Une technique qui a toutefois ses limites, du fait d’une difficulté de réglage et d’une lenteur d’intervention. D’où l’idée de certains constructeurs, d’y rajouter des outils passifs nécessitant peu d’énergie, que l’on peut monter entre les roues et employer à une vitesse pouvant atteindre 7 à 8 km/h, comme les étoiles de binage conçues par la société allemande Kress. Initialement conçues pour les grandes cultures et les productions maraichères, elles sont aujourd’hui disponibles en viticulture et utilisées pour le désherbage mécanique du cavaillon. C’est le cas de Thibaut Giraudon, viticulteur à Chitry, qui après les avoir testées pendant un an, vient de s’équiper d’une paire de ces bineuses à doigts et en a fait la démonstration, dans le cadre des rendez-vous Innov’Action organisés par la Chambre d’agriculture de l’Yonne.

«Lécher» les pieds de vigne
Simple de conception, ce type d’outil est utilisé principalement en entretien, de préférence lorsque les adventices en sont au stade plantule. Montés sur un système auto-animé passif, sans intervention hydraulique, les doigts de caoutchouc pénètrent sous la terre et soulèvent les adventives, venant au plus près des pieds de vignes, pour les «lécher», sans les abîmer. Plusieurs types de disques sont proposés par le fabricant, en fonction de la nature du sol, les plus rigides destinés à des sols plus lourds  et les plus souples, à des sols sableux et légers. Avec toutefois, explique Thibaut Giraudon, des limites, en cas de présence de végétaux à un stade très développé, voire lignifié: «comme tous les matériels d’entretien du sol, il ne faut pas trop attendre et intervenir quand l’herbe est encore petite». Pour une vitesse d’intervention de l’ordre de 5 kilomètres à l’heure : «en roulant à 1 700 tours/mn, on ne déplace pas trop de terre et si tout va bien, on est censé faire environ 1 ha à l’heure. La réalité, lorsque c’est trop sale, c’est qu’il faut descendre à chaque tour pour enlever les liserons enroulés sur les interceps. Même si au final, les étoiles posent moins de problèmes, du fait que les nattes de liserons finissent par tomber toutes seules». Le jeune viticulteur de Chitry ayant pour objectif de s’en servir dès la sortie d’hiver, avant que s’installent les premiers chardons.

Un temps de travail supplémentaire
Parmi les collègues venus découvrir le système au travail, Jean-Luc Houblin, viticulteur à Migé, passé lui aussi au désherbage mécanique  : «j’en fais même de plus en plus, car un jour ou l’autre, les désherbants auront disparu et de toute façon, ce n’est pas la solution. Si on compte le débourrage au bout du rang, je fais environ 50 ares à l’heure, mais le plus important, c’est d’être prêt quand le moment est arrivé, ne pas chercher à y aller quand tu l’as décidé, c’est la météo qui décide pour toi, comme avec un traitement, quand la fenêtre est là». Thibaut Giraudon a fait ses comptes  : «il me faut 3 jours quand tout va bien, pour désherber mon parcellaire, là où avec les traitements, je mets entre 12 et 13 heures». Un temps de travail supplémentaire pas forcément à la portée de toutes les exploitations. Si les bineuses à doigts sont annoncées par le fabricant comme pouvant être utilisées dans les vignes dès leur plus jeune âge, le vigneron se veut prudent  : «les doigts s’approchent quand même au plus près et à mon avis, il faut que les vignes aient déjà au moins cinq ans, qu’elles soient bien constituées». Le coût du matériel, de l’ordre de 2 000 à 2 400 € la paire, pouvant être considéré pour beaucoup, comme rédhibitoire explique Thibaut Giraudon  : «en gros, c’est le prix d’un intercep classique, mais avec l’inquiétude que les caoutchoucs se fragilisent et ne durent pas».