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2/2 Écophyto

Comment généraliser la démarche… ?

L’après-midi, une table ronde réunissant acteurs du monde agricole, de l’administration et du monde associatif, s’est penchée sur les contributions à mettre en œuvre pour mener une stratégie agro-environnementale dans le département de l’Yonne.
Par Dominique Bernerd
Comment généraliser la démarche… ?
La table ronde de l’après-midi.
Animée par le journaliste écrivain Sylvain Allemand, la table ronde de l’après-midi a réuni plusieurs acteurs venus d’horizons différents : Etienne Henriot, président de la Chambre d’agriculture de l’Yonne, Jean-Roch Gaillet, directeur Draaf, Olivier Fauriel, directeur Agence de l’Eau Seine Normandie, Mme Schmitt, de Yonne Nature Environnement, Gérard Delagneau, président de SeineYonne et de 110 Bourgogne, Jean-Claude Courtault, viticulteur et président régional de l’Institut Français de la Vigne et du Vin, ainsi que Vincent Michelet et Anicet Bretagne, agriculteurs des réseaux Dephy de l’Yonne
[INTER]Pas de «systèmes sanctions»![inter]
Et en préambule, une première question : [I]«dans quelle mesure ce que vous avez entendu ce matin répond aux enjeux sociétaux… ?»[i] Pour le président de la Chambre d’agriculture de l’Yonne, il est important face à la problématique de l’eau [I]«que l’on apporte une réponse en tant qu’agriculteur car nous revendiquons le fait d’être des acteurs des territoires. Pour autant, attention à ce que le débat ne débouche sur des systèmes sanction, car il faut pouvoir faire en sorte que les agriculteurs s’accaparent les attentes diverses et variées…»[i], voyant à travers les réseaux mis en place, [I]«une manière de concilier performances économiques et environnementales»[i]. Rappelant que la problématique de l’eau était ciblée sur 10% de la SAU, Olivier Fauriel s’est pour sa part félicité que [I]«l’agronomie revienne en force. C’est une très bonne chose et peut-être une porte de sortie…»[i] Satisfait des propos de la matinée, jugés [I]«pragmatiques et sans dogmatisme»[i], le président Delagneau en souligne le contexte : [I]«nous sommes là pour avancer tous ensemble et pour cela, n’avons pas attendu le Grenelle de l’environnement pour le faire !»[i] Pour le directeur de la Draaf, Jean-Roch Gaillet, la démarche est sociétale et dépasse même le contexte agricole : [I]«le programme concerne agris et vitis, mais aussi les particuliers, les jardins, les parcs publics, les municipalités, qui à eux tous, représentent un volume considérable…»[i] L’amélioration de la technicité peut aussi aider les professionnels sur le terrain à s’investir dans la démarche, comme le rappelle le viticulteur Jean-Claude Courtault : [I]«il y a 15 ou 20 ans, beaucoup traitaient avec des canons et en fin de compte, le produit partait à 50% dans l’air. Aujourd’hui, avec des appareils à rampes à débit réduit, il y a moins de perte et d’implication sur la nature…»[i]
[INTER]Des contraintes pédoclimatiques[inter]
Comment surmonter les contraintes pédoclimatiques, avec des résultats extrêmement variables d’un contexte à l’autre? Comme le souligne l’animateur du débat, Sylvain Allemand : [I]«deux agriculteurs pourront faire les mêmes efforts, ils n’auront pas des résultats identiques, du fait de natures des sols et de climats différents, ce qui rend la démarche difficile parfois à mettre en œuvre… »[i] L’hétérogénéité du territoire est au cœur du problème rappelle Gérard Delagneau : [I]«il est plus simple d’allonger la rotation des cultures sur des zones en terre profonde que sur nos plateaux où l’ assolement blé orge colza, nous empêche pas mal d’innover en terme de désherbage…»[i] Le directeur de l’agence de l’eau, Olivier Fauriel, le reconnaît lui aussi : [I]«quand on vise de réduire de 40 ou 50% nos IFT, il faut bien sÛr, intégrer la marge de variabilité climatologique dans le calcul de l’objectif de rendement et ne pas oublier, malgré la finesse agronomique, l’année exceptionnelle pouvant remettre en cause les précédentes..»[i] A l’image en viticulture, des deux dernières années, où il aurait été [I]«impossible de produire, sans renforcer le dosage»[i] rappelle le Draaf. Le souci, comme l’explique ce professionnel présent dans la salle, adepte du désherbage mécanique, est [I]«que par temps sec comme en ce moment, vous le passez, c’est réussi et l’année d’après si la météo n’est pas favorable, vous ne pouvez rien faire, notamment dans les limons humides !»[i]
[INTER]Quels leviers financiers mettre en place ?[inter]
Jean-Roch Gaillet le reconnaît: [I]«dans le contexte de réforme de la PAC, c’est l’Yonne qui fait face à la plus forte diminution des aides par rapport aux autres départements bourguignons…»[i] Alors où trouver les aides pour inciter les agriculteurs à s’engager dans une démarche Écophyto? D’autant que moyens mis en place sont dénoncés pour leur lourdeur et leur rigidité explique Étienne Henriot : [I]«concernant l’outil MAE cofinancé dans le 2e pilier, les cahiers des charges sont tels que les agriculteurs ne sont pas séduits. De plus, ces contrats rigides et strictes sont sur 5 ans, mais en 5 ans, une exploitation vit et change ! Comment dans les zones les plus vulnérables faire un accompagnement dans la durée si au bout de 5 ans, ça s’arrête… !»[i] Rejoint dans ses propos par la représentante de Yonne Nature Environnement pour qui: [I]«le système français cloche complètement ! Sur une vie de travail, 5 ans, ce n’est rien !» [i]D’autant que l’Agence de l’Eau, comme le rappelle le président de la Chambre d’agriculture, [I]«est là pour initier les méthodes mais pas pour aider dans la durée..»[i] Reste, poursuit-il, [I]«à trouver l’outil qui fasse qu’un exploitant agricole devenant producteur d’eau, puisse être rémunéré dans le temps pour son action sur le terri-toire…»[i] Il y a longtemps que le sujet est évoqué, même s’il est à ranger aujourd’hui encore au rang des utopies.

Partie 1/2 : Ecophyto

Ils ont dit

Francis Letellier (Président FDSEA 89) «Concernant les nitrates, on est sur un dogme ancien datant des années 50 et je suis surpris aujourd’hui que d’un point de vue stratégique et de recherche de l’innovation, on ne remette pas en cause des éléments datant d’il y a soixante ans…» Catherine Schmitt (Yonne nature Environnement) «Notre rôle est aussi de sensibiliser les collectivités alors que c’est dans les cimetières que l’on utilise le plus de désherbants ! Il n’y a pas que les agriculteurs, toute la société doit prendre conscience du problème, on ne réussira que tous ensemble…» Jean-Baptiste Thibaut (Viticulteur) «Je tourne avec 7 cultures là où il y a 15 ans, j’étais en monoculture de blé. Au final, mon IFT diminue, mais c’est forcément beaucoup plus compliqué et technique. Je n’ai aujourd’hui aucune certitude, car ce que je fais maintenant, je n’aurais jamais imaginé le faire il y a 15 ans. Et dans 15 ans, je n’ai aucune idée de ce que je ferai… Pas de certitudes, pas de vraies solutions, c’est un mélange de tout». Yves Vecten (Réseau Dephy Grandes Cultures) «Il ne faut pas oublier que les aides perçues ne sont que des compensations des efforts réalisés. A chaque fois qu’on les touche, c’est parce qu’on a perdu cette somme. Une MAET se traduit par 5 à 6 quintaux de moins à l’ha…» Olivier Fauriel (Directeur AESN) «L’Agence de l’Eau distribue considérablement plus d’aides à l’agriculture qu’elle ne perçoit de redevances. Le budget de l’Agence en provenance de la profession agricole, c’est aujourd’hui de l’ordre de 0,5% contre 5 à 6% des dépenses…»