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Agence de l’Eau Seine Normandie

Changement climatique: l’agriculture «porteuse de solutions»

Tenue pour responsable de la qualité de l’eau, de l’air et des paysages, l’agriculture est aussi la première à souffrir des effets du réchauffement. Le Comité de bassin Seine-Normandie recherche des solutions aux côtés des élus, des industriels… et des agriculteurs.
Par Frédéric Marais
Changement climatique: l’agriculture «porteuse de solutions»
Une table ronde où a été évoquée l’agriculture, comme «piste de solution» pour l’avenir.
Bulletin météo de la France un certain 18 août 2050, présenté par une inaltérable Evelyne Dhéliat : «soleil de plomb sur toute la France et même dans toute l’Europe. À Paris, 26° le matin, 40° l’après-midi...»
De la science-fiction ? Non, un scénario plausible. N’a-t-on pas enregistré 39° à Reims le même jour en 2003 ? Selon Météo France, un été sur quatre sera caniculaire, la courbe des températures épousant celles des émissions de gaz carbonique.

Chercheur à l’Irstea (1), Charles Perrin prédit que dans trente ans le bassin de la Seine baignera «dans un climat méditerranéen» et que notre mode de vie en sera profondément affecté : changements de végétation, modification des cycles de l’eau avec «des étiages plus marqués et plus tardifs», migration de certaines espèces de poissons et surmortalité des juvéniles, difficultés de rechargement des nappes, dilution de la pollution ralentie à cause de la sécheresse… «On manquera d’eau en fin d’automne, et on assistera à des conflits d’usage», pronostique le scientifique.

Mais aussi, en parallèle, épisodes pluviométriques extrêmes entraînant des inondations et un débordement des réseaux d’assainissement, etc.

«L’électrochoc» des inondations
Un tableau apocalyptique, dont on a déjà eu un avant-goût cette année, avec une période de sécheresse sévère succédant à une période de précipitations excessives. «Les récentes inondations ont servi d’électrochoc», affirme le président du Comité de bassin Seine-Normandie, François Sauvadet.

En particulier dans notre région et au sein du milieu agricole, particulièrement touché par les crues de la Seine, pourtant décrite comme un «fleuve lent» au débit assez faible.

C’est pourquoi le Comité de bassin a entrepris d’élaborer un plan visant à limiter les effets du changement climatique sur le bassin de la Seine, de façon à anticiper les risque d’inondation et d’étiage.

Une commission s’est réunie à Troyes, le 23 septembre, afin de recueillir les propositions des élus autour de quatre grands thèmes : la préservation de la qualité de l’eau, la préservation de la biodiversité, la réduction de la dépendance à la ressource en eau et l’accroissement de l’infiltration pour limiter le ruissellement.

«Accompagner l’agriculture»
L’agriculture est bien sûr au cœur de ces enjeux. «Elle est porteuse potentiellement de beaucoup de solutions», estime Sarah Feuillette, de l’Agence de l’eau Seine-Normandie.
Encore faut-il éviter de noyer le monde agricole, sans mauvais jeu de mots, sous des flots de réglementations parfois contradictoires. «On a besoin d’harmonisation, d’objectifs communs et de cohérence dans l’action, a souligné Didier Marteau, président de la chambre d’agriculture de l’Aube. L’empilement des contraintes pénalise les exploitations et réduit la compétitivité de l’agriculture française». François Sauvadet, le président du Comité de bassin, est bien conscient «qu’il faut accompagner l’agriculture dans sa mutation si l’on veut améliorer la qualité de l’eau».
(1) Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (ex-Cemagref).

Des solutions existent

Les différents intervenants ont présenté des solutions déjà mises en œuvre ou susceptibles de l’être pour prévenir ou pallier les effets du réchauffement climatique. En Picardie, par exemple, des agriculteurs sont indemnisés pour laisser des zones tampons absorbant les «surinondations». Dans le sud de la France, d’autres agriculteurs récupèrent des eaux de drainage pour irriguer les cultures.

À Douai, la ville a été épargnée par les inondations grâce à ses 20% de chaussées filtrantes et à un système de noues et de toitures végétalisées. Sarah Feuillette, de l’Agence de l’eau Seine-Normandie, observe que «si 1,5% de la SAU avait été plantée de haies en bas des pentes, cela aurait réduit de 680 millions de mètres cubes le volume d’eau charrié par les inondations, soit 78% de la capacité de stockage des barrages-réservoirs».

On a aussi rappelé le rôle tampon des forêts et leur pouvoir filtrant sur la pollution. On a évoqué la restauration des milieux naturels, en particulier celle des zones humides, ainsi que le «rechargement technique» des nappes phréatiques. Peut-être faudra-t-il «développer de nouvelles variétés adaptées au changement climatique», comme l’a suggéré Claire Wolff, chargée de mission à la région Grand Est. Celle-ci soulignant toutefois qu’il n’y a pas en Champagne-Ardenne de «tension» liée à l’irrigation, «mis à part sur les légumineuses».