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Gaec de Chichery

Associés avant que le terme Gaec existe

Avec plus de 60 ans d'existence, le Gaec de Chichery fait partie des plus anciens de France. Retour sur cette entité agricole historique.

Par Charlotte Sauvignac
GAEC
GAEC de Chichery
Les photos d'archives du GAEC à sa création en 1965 sur les terres de Chichery.

À la veille de la journée portes ouvertes, les six associés, Julien Thominet, Thomas Vanlauwe, Thierry Castelleta, Romain Pichon, Mathieu Stroebel et Dominique Gouleau reviennent sur l'histoire de leur Gaec. « Au début, en 1965, sept agriculteurs ont adhéré au Gaec, six de Chichery et une de Branches. Avant c'était une Cuma, mais en 65, ils ont voulu devenir un Gaec et ont réussi à obtenir l'agrément dès sa création », se souvient Julien Thominet, assis dans les bureaux de la ferme originelle autour de ses associés. « L'idée est partie de la volonté de se regrouper. L'un avait une moissonneuse, il voulait en faire profiter d'autres en la mutualisant. C'est ainsi que la Cuma est née, et puis après le Gaec, parce qu'ils trouvaient que c'est mieux que de rester chacun de son côté, que d'avoir chacun son tracteur. Il y a aussi un aspect social, quand tu es tout seul dans ton coin, comme nous aujourd'hui, si on avait chacun notre exploitation, on travaillerait tous les week-ends », explique à son tour Romain Pichon, en regardant les photos d'archives. « Ce qu'il faut savoir, c'est qu'à Chichery, les fondateurs ont été résistants ensemble. Quel que soit le bord politique ou religieux et ils se sont aperçus que dans la Résistance, ils ont fait des choses ensemble alors qu'ils n'étaient pas amis, ni de la même famille. Donc ils se sont dit que s'ils voulaient continuer d'exister, est-ce qu'on ne ferait pas le pari de faire quelque chose ensemble pour s'en sortir ? », témoigne Mathieu Stroebel. Les six associés, en débattant, se rendent compte à quel point le Gaec était une structure innovante, à cette époque-là. « Avant, les femmes participaient aux travaux sur les exploitations, et puis au moment de la création, il n'y a plus eu de femmes, ça leur a permis de faire autre chose, ce n’était pas forcément un choix de leur part de rester sur l'exploitation », explique Julien Thominet, à ses collègues.

Un Gaec novateur

Quant à Mathieu Stroebel, cette structure lui a permis d'avoir un nouveau souffle. « J'avais prévu de m'installer ailleurs, je viens de l'Aisne. Mon rêve était de m'installer avec un petit troupeau, mais le projet que j'avais dans l'Aisne n'a pas marché. J'avais vendu ma maison, j'avais inscrit mes enfants à l'école et en fait, je me suis retrouvé sans rien. Je suis donc allé voir différentes fermes, avec différents projets. L'avantage du Gaec, c'était qu'on avait un peu l'assurance de réussite, grâce à un projet en commun », se remémore-t-il. Une chance, car venant d'un autre département, l'intégration aurait pu être compliquée. « C'était plus facile de s'installer, et il y avait une ouverture d'esprit, ici à la ferme, où il y avait déjà des gens qui venaient d'ailleurs, et qui s'étaient installés ici et ce n’est pas quelque chose de courant dans le monde agricole, de permettre l'accès à la terre », détaille-t-il. C'est entouré par ses collègues, que Mathieu Stroebel ajoute, « nous sommes “des pièces rapportées”, des personnes hors des fondateurs. Mais Romain Pichon est issu de la troisième génération d'associés du Gaec et Thierry Castelleta est issu de la deuxième génération d'associés », manifeste-t-il, conscient que le Gaec est ancien. D'ailleurs, les agriculteurs sont habitués aux visites des anciens. « Le plus ancien, vient quasiment tous les 15 jours pour voir ce qu'on fait, pour proposer une discussion sur quelque chose, ou prendre des nouvelles. Le Gaec a tellement évolué. En 1965, ils avaient une centaine de vaches laitières, 326 hectares de SAU, tandis que maintenant, nous avons 450 animaux au total, dont 200 vaches à la traite, 150 ha de prairie, 30 ha de luzerne, 80 ha de maïs en ensilage. En culture, nous avons 280 ha de céréales, 30 ha de tournesol, 45 ha de chanvre, 30 ha de betteraves sucrières, 15 ha de maïs grain et 24 ha de jachères, un total de 680 ha », décompte Julien Thominet. « Si on a remporté le Trophée de l'Agriculture, c'est pour eux, c'est la preuve que le pari qu'ils ont fait en 1965, il était le bon », conclut à son tour Mathieu Stroebel.