«A l’année prochaine… Enfin, peut-être !»

Le soleil estival qui aura marqué l’édition 2014 du Concours charolais d’Avallon semblait presque incongru ce samedi, au regard de la morosité ambiante qui se dégageait des conversations et à l’heure des discours, le Président du Syndicat des éleveurs charolais de l’Yonne, Jean-Louis Riotte, s’en est fait l’écho : «les exploitations d’élevage sont aujourd’hui prises en étau, entre le cours des broutards qui baisse de 10 à 15 centimes chaque semaine sur les marchés, la viande qui a perdu 80 cts ces six derniers mois et l’inexorable augmentation des charges. Les exploitations en polyculture élevage subissant de plein fouet la double baisse des céréales et de la viande…» Face à une réglementation de plus en plus stricte et une législation de plus en plus sophistiquée, le président s’interroge : «les agriculteurs passeront bientôt plus de temps à faire des taches administratives et remplir des dossiers de plus en plus nombreux et complexes, qu’à produire des aliments de qualité… On marche sur la tête !» Rappelant, face au risque de désertification de la région, en cas de disparition des élevages, qu’un agriculteur générait de l’activité pour 7 à 8 personnes, en amont et en aval de la filière.

Deux animaux vendus
L’embargo russe a eu pour conséquence de plomber le marché des broutards à destination de l’Italie, concurrencé par l’arrivée d’animaux en provenance de pays de l’Est comme la Pologne. Confortant un peu plus le marasme actuel. Pierre Cadoux est éleveur depuis plusieurs décennies, mais c’est sans état d’âme qu’il prendra prochainement sa retraite : «Pour faire ce métier, il faut être passionné, voire même parfois, à la limite du raisonnable, mais la passion ne suffit pas, il faut tout de même arriver à en vivre. J’ai deux enfants, j’aurais été content qu’ils reprennent derrière moi, mais dans le contexte actuel, je ne regrette rien ! Je suis content d’avoir fait mon boulot, mais content d’arrêter aussi…» Cheville ouvrière du concours d’Avallon, Michel Chevreux a fait les comptes : «Cette année, il s’est vendu deux animaux, l’an passé un seul ! A Semur en Auxois, où 180 bestiaux étaient présentés, il s’en est vendu 7 ! Aujourd’hui, les gens viennent sur les concours pour prendre des notes et attendent février pour faire baisser les prix en se disant que sur la dizaine d’animaux repérés, il en restera bien un à vendre…»

Bientôt une halle couverte ?
André Villiers l’a confirmé, le laboratoire d’analyses départemental va fermer ses portes, conséquence d’un déficit chronique depuis plusieurs années : «une somme constante de 800 000 €, l’équivalent d’un point de fiscalité…» Un rapprochement avec celui de la Nièvre est en projet, afin de conserver une dimension sanitaire, notamment en matière de prophylaxie animale : «nous allons maintenir sur le département une unité de collecte des échantillons, afin que les éleveurs de l’Yonne et en particulier, de l’Avallonnais, ne soient pas affectés par ces dispositions…» A l’étude notamment, la possibilité d’utiliser la salle d’autopsie de l’antenne de l’école vétérinaire de Maisons-Alfort, installée à Champignelles.
Serpent de mer s’il en est, la construction d’une halle couverte pour accueillir le concours a été une nouvelle fois évoquée, même si en la matière, le président du Syndicat des éleveurs charolais de l’Yonne semble un rien désabusé : «une fois de plus, nous avons organisé le salon sous notre chapiteau provisoire depuis… trente ans !» Confiance des élus en revanche, à l’image du député maire, Jean-Yves Caullet qui, en diapason avec le président de l’intercommunalité de l’Avallonnais, Pascal Germain, a dressé un premier calendrier pour sa réalisation, à l’entrée nord de la ville : «La municipalité va démarrer le projet sous sa maîtrise d’ouvrage communale, dès 2015, par une première étude d’aménagement, avec au bon moment, l’aide de la Communauté de communes. En 2016, une première phase sera programmée, il s’agira des réseaux de viabilité et comme nous n’aurons pas le temps de construire la structure, le chapiteau y sera installé pour une période de 6 mois, le temps de permettre de tester son utilisation…» Reste à espérer que d’ici là, il y ait encore des éleveurs pour y emmener des animaux à concourir… !