Gestion de l'eau
Le changement, c'est maintenant

AG
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Christiane Lambert était en Côte-d'Or le 20 juillet. La présidente de la FNSEA accompagnait Frédéric Veau, délégué interministériel, pour une journée dédiée à l’accès à l’eau en France et dans le département.

Le changement, c'est maintenant
La visite du bassin de rétention d'eau de pluie de Fauverney a été suivie par de nombreuses personnes.

L'eau, c'est la vie. C'est aussi -et malheureusement- un sujet devenu très délicat en France. En agriculture, nombre de producteurs se voient « recaler » des projets, notamment de retenues d'eau. Pour la FNSEA, cette situation a beaucoup trop duré. Il y a urgence d'agir, d'alléger les démarches administratives, d'accélérer les processus et de changer certaines mentalités, surtout devant la récente volonté française d'aller (enfin) chercher une souveraineté alimentaire. « Il faut mettre le turbo », insiste Christiane Lambert, qui se lance dans une argumentation chiffrée : « la France accumule beaucoup trop de retard, notamment en terme d'irrigation. Nous ne stockons que 1,7% des eaux de pluie, alors que certains pays en stockent 20%. Sur les dix dernières années, nous avons augmenté nos réserves de 1,3%, c'est-à-dire rien du tout, sachant que la moyenne en Europe s'élève à 13,3% ! Même les pays situés plus au nord constituent des réserves ». La présidente de la FNSEA profite de l'occasion pour « tacler » Ségolène Royal, l'ancienne ministre de l'écologie. À l'évidence, les deux femmes ne partiront pas en vacances ensemble cet été : « en France, nous sommes scotchés et bloqués par une idéologie poussée à l'extrême, qui a été initiée dans la région Poitou-Charentes où était élue Ségolène Royal. Sa responsabilité est importante dans ce dossier, elle a transposé cette idéologie dans son ministère. La médiatisation autour de ce sujet a été très forte et nous en payons aujourd'hui les conséquences. Des agriculteurs, qui ont parfois es projets à l'âge de 40 ans, ne voient toujours pas le bout du tunnel une décennie plus tard. Il y a de quoi se poser des questions ».

Un délégué interministériel

En amont du salon de l'agriculture 2021, Christiane Lambert avait déjà alerté Emmanuel Macron sur son maigre bilan en matière d'irrigation, à un an de la fin de son premier mandat. Cet échange avait motivé la tenue, au niveau national, du Varenne de l'eau. Ses travaux visent à construire une feuille de route pour répondre aux enjeux de gestion de l’eau et de l’adaptation au changement climatique. Les conclusions de ce Varenne, clôturé en février dernier, ont effectivement souligné l’urgence d’agir, en identifiant l’ensemble des leviers qui devront être actionnés à court et moyen termes. La nomination d’un délégué interministériel, chargé du suivi des travaux, illustre une volonté « d’avancer » pour sécuriser et garantir les volumes d’eau pour les irrigants. Le Préfet Frédéric Veau, nommé dans cette fonction, sillonne actuellement le pays, à la recherche de pistes, d'exemples et de réalisation sur lesquels s'appuyer. Le bassin de rétention d'eau de pluie de Fauverney, opérationnel depuis 2015, avait été choisi comme destination ce 20 juillet. Cette réserve a été crée en même temps que la zone d'aménagement concerté de Boulouze. Dix millimètres de pluie sur les 54 ha de cette zone permettent de recueillir entre 3 000 et 4 000 m3, cette eau est ensuite utilisée par huit exploitations de Fauverney et Rouvres-en-Plaine, toutes adhérentes de l'Asa du Champaison. 

Avancer ensemble

Cette visite du bassin a été suivie d'une réunion en salle. Les prises de paroles étaient unanimes : le changement climatique entraîne de plus en plus d’effets pour les agriculteurs, des adaptations sont plus que nécessaires pour garantir la pérennité des productions. La présidente de la FNSEA a affiche un optimisme certain devant le Varenne de l’eau, dans lequel plusieurs groupes de travail sont constitués pour « enfin avancer ». « Tout sera fait pour gagner en efficacité », assure Christiane Lambert, « l''agriculture et l'écologie sont co-pilotes de ces dossiers, nous y tenions, c'est ensemble que nous y arriverons ».

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Témoignages

Vincent Lavier, président de la Chambre agriculture : « Nous devons saisir toutes les opportunités qui se présentent à nous pour apporter des solutions à nos problématiques locales. Il ne faut jamais agir seuls contre les autres, mais plutôt ensemble. Les projets qui réunissent de multiples acteurs de l'eau sont les plus susceptibles d'aboutir ».

Baptiste Colson, président de Jeunes agriculteurs : « JA défend le renouvellement des générations, celui-ci passe inévitablement par le maintien de nos moyens de production mais aussi par une bonne gestion de l'eau. Sans une politique durable sur ce dossier, nous n'arriverons plus à produire dans certains secteurs du département. La gestion de l'eau, au-delà de l'irrigation, est très importante, notamment dans la zone élevage où les projets ne vont pas assez vite. Nous devons travailler tous ensemble et avec du bon-sens face dans ce contexte de changement climatique ».

Fabrice Genin, président de la FDSEA : « La bassin de Fauverney est exemplaire. À chaque fois que le monde agricole subit une emprise, il devrait y avoir une compensation de ce type. Il suffit parfois de quelques millimètres pour sauver des cultures. Un telle réalisation permet aussi d'aller chercher de la valeur ajoutée et de créer des emplois. C'est un gage d'attractivité pour nos territoires ».

Pascal Chadoeuf, président du syndicat des irrigants : « Notre bassin nous donne entière satisfaction depuis sa création. Au-delà de la recherche de valeur ajoutée, face au changement climatique, l'eau est tout simplement indispensable pour s'assurer un minimum de récolte et de la qualité. Je salue une nouvelle fois la volonté politique de notre communauté de communes qui s'était très impliquée dans ce dossier ».

Le mot de la FDSEA

Ce moment d'échange a permis de montrer des projets qui marchent, comme la retenue de la Boulouze. Mais l'illustration des problématiques de gestion quantitative était beaucoup plus globale : en Côte d'Or, en tête de bassin, avec une faible réserve utile, pas de grande nappe souterraine, nous subissons de plein fouet tous les aléas et toutes les règlementations. Nous avons défendu, avec nos instances nationales : 1) l'accès facilité aux projets de stockage destinés à l'irrigation pour les zones qui peuvent en bénéficier, 2) l'usage partagé de l'eau en période d'étiage, avec des besoins agricoles qui doivent être prioritaires, 3) l'assouplissement des règlementations loi sur l'eau et zones lumides pour pouvoir faire des travaux sur les petits cours d'eau ou à côté, y compris des petites réserves destinées plutôt à l'abreuvement, 4)la bonne gestion et valorisation du pluvial des zones imperméabilisées, 5) la recherche de toutes les solutions d'adaptation possible, y compris les nouvelles biotechnologies de sélection végétale.