Prédation lupine
« J'en ai ras-le-bol ! »

Chloé Monget
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Le 30 août, Florian Guy (installé à Biches) a fait la macabre découverte de trois de ses brebis massacrées. Après intervention des services concernés, la prédation lupine n'est pas exclue. 

« J'en ai ras-le-bol ! »
Les croix rouges représentent les endroits approximatifs où Florian Guy a retrouvé ses animaux.

« On nous indemnise, mais l’argent je m’en fous ! » martèle Florian Guy, installé à Biches, suite à la découverte de trois de ses brebis « massacrées » le 30 août dans la commune de Brinay. Si les conclusions de l’OFB n’excluent pas la responsabilité du loup dans cette attaque, selon Florian Guy, il n’en reste pas moins que cette situation est inacceptable.

« Nous avons de plus en plus de pressions qu’elles soient sociétales ou administratives. Et, s’ajoute à cela la présence du loup, que nous n’avons pas demandé ! Je suis persuadé que cet élément sera, pour nombre d’éleveurs, la goutte d’eau pour tout bazarder. Une fois qu’il n’y aura plus personne pour élever des animaux dans la Nièvre voir en France, et qu’il n’y aura plus rien à bouffer, il sera peut-être temps pour les instances publiques de prendre leurs responsabilités ! En attendant, moi j’en ai ras le bol que personne ne nous dise rien sur la présence de cette prédation ».

Chemin de croix

Excédé, il raconte sa découverte du 30 août : « comme tous les matins j’ai fait mon tour pour voir mes animaux. Et là, je trouve une brebis la trachée arrachée, puis une autre la gorge tranchée et les cervicales écrasées, et une dernière avec la mâchoire broyée. Je peux vous assurer qu’on ne fait pas ce métier pour voir ses bêtes dans cet état ». Après avoir constaté cela, il prend son téléphone et un long chemin de croix commence : « j’ai appelé la gendarmerie pour déclarer le sinistre – ils ont été réactifs et sont venus directement. Puis, ne connaissant pas trop la marche à suivre dans ces cas-là, j’ai contacté les administrations d’usage… personne n’a su me renseigner… Et, pire, on m’a transféré pour certains sur des serveurs vocaux ! ». Après une à deux heures à chercher un contact, il est rappelé par la DDT, pour lui transmettre les coordonnées des agents de l’OFB affectés à son secteur : « Je ne remercie l’agent de la DDT que j’ai eu au téléphone et qui a pu me donner des informations ». Après un rappel de l’OFB, les agents arrivent pour constater les dégâts en fin de matinée : « Il faisait déjà chaud et le tableau n’était pas réjouissant ».

Sous silence ?

Pour lui, cette journée est le témoin d’une situation particulière dans le département : « On dirait qu’il ne faut pas parler du loup ou de sa présence dans nos campagnes. Mais, c’est une réalité ! Il semble qu’il n’y ait aucune volonté des institutions représentantes de l’autorité pour nous tenir au courant des attaques à proximité. Comme s’il fallait passer sous silence tout cela ; à un moment ça commence à se voir et se savoir. Je crois que si l’État ne se positionne pas ou ne nous fournis pas des moyens de protections dignes de ce nom, certains régleront le problème à leur manière. Car qu’on se le dise, ce n’est pas des clôtures d’un mètre qui peuvent nous prémunir efficacement contre des attaques. Les chiens de protection peuvent être une solution mais qui peut avoir des conséquences désastreuses pour les éleveurs si le chien ne vient qu’à croquer un pêcheur ou un promeneur… J’ai sincèrement le sentiment que l’on veut acheter notre silence avec des indemnisations. Sauf qu’au-delà des brebis massacrées, je rappelle tout de même que ces attaques engendrent du stress pour les animaux survivants. Pour ma part, mon cheptel présent durant l’événement est complètement perdu depuis 10 jours. Les brebis se jettent dans les clôtures au moindre bruit, elles deviennent folles, je n’ai jamais vu ça. Ces comportements m’inquiètent également pour la suite puisqu’elles sont en pleine période de reproduction et qu’il est possible que cela ait des conséquences sur les naissances, ce qui serait catastrophique ! ». Il conclut : « Avoir une communication claire en cas d’attaque permettrait de mettre en place un tissu de surveillance dans ces secteurs afin de prémunir les autres éleveurs de ce problème. L’État et toutes ses succursales doivent agir efficacement car il y en a assez ! ».

La procédure en cas d’attaque de grand canidé dans la Nièvre est détaillée sur le site de la préfecture.

En cours

Pour rappel, le plan national d’actions sur le loup et les activités d’élevage 2024-2029 a été présenté le 18 septembre aux membres du Groupe National Loup, par Fabienne Buccio, préfète coordonnatrice de ce plan. Dans un communiqué, il est indiqué que l’estimation provisoire de la population lupine 2023 est établie à 1 104 individus et que de ce fait : « il peut être considéré que les quatre premiers plans ont permis d’atteindre le seuil démographique de sauvetage de l’espèce depuis son retour naturel dans les années 1990. Le cinquième plan d’actions aura ainsi pour objectif principal de renforcer l’action engagée pour l’équilibrer entre la préservation du loup et la protection des activités d’élevage et du pastoralisme. Il entrera en vigueur le 1er janvier 2024, à l’issue de la phase de consultation ».