Transition agricole
Journée biosolutions avec Agronov

Berty Robert
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Le pôle d’innovation en agroécologie Agronov organisait le 17 novembre une journée consacrée aux biosolutions. Un bon moyen d’en savoir plus grâce à des approches expertes et nuancées.

Journée biosolutions avec Agronov
Cette journée consacrée au sol et aux biosolutions aura été une vrai réussite pour Agronov grâce aux interventions de nombreux experts.

Face aux aléas climatiques, à la hausse des coûts de production, à la fragilisation des rendements agricoles et aux enjeux de la souveraineté alimentaire, l’agriculture est plongée dans la recherche de solutions de résilience. Un des leviers se trouve peut-être dans la montée en puissance des biosolutions. Le thème était au cœur de l’évènement organisé le 17 novembre à Bretenière, près de Dijon, par le pôle régional d’innovation en agroécologie Agronov. Un rendez-vous d’autant plus pertinent que, le 24 octobre, a pris fin une consultation européenne qui participe à l’objectif de préparer une future loi de protection des sols. Entre conférences et présence d’une douzaine d’entreprises concernées par la question, le rendez-vous se voulait complet.

Que dit la réglementation ?

Il importait de s’accorder sur ce que recouvre ce terme de biosolutions, décliné en biocontrôle et biosimulants. Deux intervenants ont replacé le cadre juridique dans lequel ces approches agronomiques s’inscrivent. Flora Limache, responsable des affaires techniques et réglementaires au sein d’IBMA, association française des producteurs de solution de biocontrôle, rappelait que « le biocontrôle est défini en France par le code rural et comprend quatre catégories : macro-organismes, micro-organismes, médiateurs chimiques et substances naturelles. La réglementation est très exigeante mais le biocontrôle peut être utilisé en agriculture bio ou en conventionnelle ». Elle ajoutait que les produits de biocontrôle sont évalués par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Pour sa part, Laurent Largant, directeur de l’Afaïa, syndicat regroupant les fabricants de fertilisants biosourcés ou renouvelables, attirait l’attention sur une évolution récente avec un règlement européen en vigueur depuis juillet, qui n’écrase pas pour autant les réglementations nationales en termes de biostimulants. « Ces derniers, précisait-il, remplissent quatre fonctions : la mise à disposition d’éléments nutritifs, l’absorption d’élément nutritifs, l’amélioration de la qualité des productions et l’aide apportée aux plantes pour résister au stress abiotique. Les biostimulants sont soumis à cinq normes d’évaluations : une générique et les quatre autres qui évaluent les quatre fonctions citées ».

Souci environnemental, technique, et marketing

Une fois ce cadre posé, on pouvait aller plus loin dans ces biosolutions et leur rapport avec les sols agricoles, avec une table ronde portant sur le thème « Biosolutions : Atouts et contraintes agronomiques pour la durabilité de l’exploitation agricole ». Un fait, tout d’abord : entre 2015 et 2020, l’utilisation de biostimulants en France a augmenté de 11 %. « Cela traduit plusieurs choses, expliquait Lionel Ranjard, directeur de recherches à l’UMR Agroécologie de l’Inrae Dijon : la volonté de préserver le sol, sous un angle patrimonial mais aussi fonctionnel, le souci de la transition agroécologique pour réduire les intrants de synthèse. On peut aussi penser qu’il y a une ambition marketing dans un contexte où les pesticides et la pétrochimie vont baisser ». Il était rejoint dans son raisonnement par Cécile Le Gall, chargée d’études environnement et agriculture biologique chez Terres Inovia, qui remarquait que « sur les biostimulants, les revendications concernent la nutrition, la croissance des cultures et les gains de biomasse, en lien avec la productivité. Ils sont regardés de près par les agriculteurs, avec la volonté d’avoir moins recours aux engrais classiques. Ce qu’ils apportent en termes de tolérance au stress abiotique et hydrique intéresse aussi beaucoup ». Le constat est plus nuancé du côté de l’agriculture biologique : « Il y a une grande diversité de propositions et il est difficile de faire le tri, soulignait Julien Halska, conseiller grandes cultures biologiques chez Bio Bourgogne. Je constate, pour ma part, un usage relativement modéré des biosolutions en grandes cultures. En revanche, sur des cultures plus spécialisées, on y fait plus appel ».

C’est d’abord du vivant

Pour Lionel Ranjard, il ne faut jamais oublier que les biosolutions, c’est du vivant. Elles sont porteuses d’une variabilité qui doit être prise en compte, contrairement à la régularité chimique. « Avant d’opter pour des biosolutions, le producteur doit analyser ce qu’il fait. Il faut passer en revue ses itinéraires techniques. Les questions de travail du sol et de couverture doivent faire partie de la réflexion ». Au terme des échanges, il semblait impossible de conclure que ces solutions agronomiques fonctionnent ou pas. L’exemple des expérimentations sur le biocontrôle et les biostimulants menées au sein de la coopérative Dijon Céréales le démontre, selon Margaux Blondon, chargée du dossier Sol au sein d’Alliance BFC : « Selon qu’on doit répondre à des problématiques ponctuelles ou plus systémiques, c’est différent. On tente de gérer et d’accompagner l’hétérogénéité intraparcellaire. Nous ne sommes pas encore en mesure d’avoir des réponses catégoriques, en faveur ou en défaveur de ces biosolutions. Cela dépend beaucoup des pratiques des agriculteurs ». La conclusion, c’est Florent Bidaut, responsable expérimentation viticole au Vinipôle Sud Bourgogne, qui l’apportait : « s’il y a un intérêt marketing à avoir recours aux biosolutions, on ne peut négliger l’intérêt technique de ces produits : ils ne sont pas soumis à des résistances de la part des pathogènes, contrairement à des solutions plus classiques et leur innocuité plus forte permet d’intervenir plus près de la récolte. En viticulture, c’est une souplesse supplémentaire ».