Polyvalence
Trois troupeaux réunis en un seul bâtiment

P. Olivieri
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C'est une stabulation aux dimensions peu communes qui est sortie de terre, non sans mal, au Gaec de l'Authre à Ytrac, près d'Aurillac, dans le Cantal. Une conception qui conjugue bien-être animal, luminosité, travail simplifié… 

Trois troupeaux réunis en un seul bâtiment
Le pan sud du bâtiment ouvert sur toute sa longueur, un vrai plus pour la luminosité et l'ambiance, mais perfectible les jours de forte humidité, selon les trois associés, ici avec Vincent Charbonnel. (crédit P. Olivieri)

Dans la nouvelle stabulation du Gaec de l'Authre à Ytrac, dans le Cantal, à l'ouest d'Aurillac, qui compte un troupeau de 500 bêtes sur 235 ha, on pourrait s'entraîner au 100 mètres ou encore installer à chaque bout une cage de foot, le bâtiment affichant 120 mètres de long par 31 de large (et 10 m au faîtage). Un petit air de cathédrale sans encens mais surtout une nécessité pour rassembler dans une même et seule structure, sur aire paillée, les 210 mères salers et leurs veaux (séparés dans des parcs), issu du regroupement de trois exploitations, celles de Pierre Faucher, de son cousin Richard Fau et de Bruno Baladier, qui devrait bientôt faire valoir ses droits à la retraite. Installés en 2020 en Gaec, les deux cousins rejoints par leur associé ont dû cependant attendre janvier 2024 pour pouvoir rentrer leurs animaux dans le bâtiment. La faute à un Plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) au sein duquel l'emplacement de la stabulation, en proximité immédiate des anciens bâtiments, était cartographié en zone agricole protégée. « Personne n'avait été sur le terrain pour s'assurer de la situation avant d'élaborer ce PLUi, même nous, on n'était pas au courant », confie Pierre. Déplacer le projet en hauteur pour s'extraire de cette zone ? Impossible sauf à se coller à la maison d'habitation du propriétaire des terrains. Il a donc fallu s'armer de patience et de perspicacité pour faire bouger les lignes et faire réviser le PLUi.

Retard à l'allumage

Trois ans auront ainsi été nécessaires avant que les travaux puissent débuter mi-2023. Avec comme fil conducteur pour la conception de ce projet : le regroupement des animaux, leur bien-être avec des aires de vie qui approchent les 13,30 m2 par couple (mère-veau) et un système en aire paillée « qui vit avec l'air extérieur », ainsi que la simplification du travail des éleveurs, précise Vincent Charbonnel, conseiller bâtiments de la Chambre d'agriculture qui a accompagné le Gaec. En effet, particularité de la stabulation, outre sa taille : un pan Sud entièrement ouvert permettant un renouvellement très important de l'air intérieur, gage de litière propre avec, même en plein hiver, lors des journées ensoleillées, une luminosité des plus appréciables confortée par l'insertion de panneaux translucides. Le bâtiment comprend également une partie de stockage du fourrage.

Un air sain dans un bâtiment semi-ouvert

« Le défi a été de concilier les règles d'urbanisme (imposant un décroché de toiture par exemple, N.D.L.R.), une architecture compatible avec une charpente en bois et une centrale photovoltaïque (de 500 kW), la façon dont les éleveurs souhaitaient travailler, en aire paillée… le tout en imaginant un bâtiment évolutif qui permette d'aménager un jour si besoin, un appentis, des logettes… » expose Vincent Charbonnel qui confie avoir réalisé plusieurs esquisses avant d'arriver à des plans conformes avec cette commande multifactorielle. Sachant que parallèlement, l'ancienne étable entravée a été agrandie et aménagée pour engraisser les vaches destinées au Label rouge salers et accueillir des broutards. Même s'ils ne disposent que de peu de recul, Richard Fau et Pierre Faucher apprécient le gain de temps libéré par cette nouvelle installation, du temps accru pour la surveillance et le soin aux animaux. « Le dimanche, on se limite à repousser le fourrage et à surveiller les bêtes », ajoute Pierre. Seul bémol : par temps fortement pluvieux, une brume humide parvient à rentrer dans le bâtiment, d'où la réflexion des éleveurs en faveur de l'installation d'un filet brise-vent électrique, comme celui déjà opérationnel sur l'ancien bâtiment. Coût du bâtiment : 670 000 € (hors photovoltaïque), que les deux jeunes éleveurs n'auraient pu consentir sans l'apport de la production d'énergie photovoltaïque, et ce malgré les aides du Plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAEA) à hauteur de 43 %. « Clairement, c'est l'électricité qui paie le bâtiment et pas les vaches… » relève Richard Fau, tout en regrettant les retards pris dans le paiement de cette électricité pourtant déjà injectée dans le réseau EDF. « En ce moment, on fait l'avance de trésorerie… » regrette-t-il.