Soirée élevage de la FDSEA 58
Des enjeux collectifs

Chloé Monget
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Le 9 novembre à Rouy, la FDSEA 58 tenait sa traditionnelle soirée élevage. Cette année, le thème était : « Entre décapitalisation et évolution de la consommation : quelles perspectives pour nos outils d’abattages ? ».

Des enjeux collectifs
La soirée élevage de la FDSEA 58 a réuni à la tribune (de gauche à droite) : Dominique Guineheux, Romaric Gobillot, Emmanuel Bernard, Amélie Brisson et Caroline Mousseron.

Afin d’échanger sur les enjeux d’actualité de l’élevage, la FDSEA 58 organise tous les ans une soirée dédiée. Avec un thème différent à chaque fois, c’est un focus sur les outils d’abattage qui a été choisi pour 2023. Ainsi, près de 60 éleveurs étaient présents pour assister aux échanges à Rouy le 9 novembre.

Romaric Gobillot, président de la section bovine de la FDSEA 58, justifie ce thème : « La France compte 233 abattoirs dont trois dans la Nièvre (Cosne, Luzy et un en projet de réouverture à Corbigny). Ces derniers ont un rôle majeur dans les filières animales et dans la chaîne alimentaire. En ce sens, ils constituent un point de passage obligatoire pour les animaux de rente. Malgré tout, ils font aujourd’hui face à la décapitalisation des élevages bovins. Dans ce contexte, le Ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, a lancé récemment un plan global d’actions pour consolider le maillage en abattoirs de boucherie… Un sujet central donc qu’il nous semblait intéressant d’aborder ».

Globalement

Pour établir une vision d’ensemble (1), Amélie Brisson, responsable du service élevage-EDE de la Chambre d’agriculture de la Nièvre, fit un état des lieux du cheptel nivernais avant de présenter l’intérêt potentiel de l’engraissement mais nuance : « même si les prix de vente ont augmenté, ils ne couvrent pas les charges de production calculées par l’Idele qui intègrent la rémunération du capital et de l’exploitant (deux Smic) – à cause de l’inflation ». Ensuite, Caroline Mousseron, directrice d’Interbev BFC, détailla l’évolution de la consommation française de viande bovine : « le public mange de la viande, mais leurs habitudes de consommation ont changé pour se diriger vers des produits faciles et rapides à cuisiner ce qui peut soulever la question de la valorisation de certains morceaux ». Enfin, Dominique Guineheux, directeur des achats chez Bigard et représentant de Culture Viande (2) à Interbev (3), pointa les perspectives des outils d’abattage sur le moyen long terme au regard des évolutions actuelles de l’élevage français : « Le tableau n’est pas très réjouissant, mais il ne faut pas pleurer dessus. Au contraire, nous devons tous (les acteurs de la filière) travailler ensemble pour porter des projets communs afin de sauver l’élevage français et les outils d’abattage. Je pense, pour ma part, que cela passe notamment par une organisation précise de la rémunération via la contractualisation ».

Travailler sereinement

Emmanuel Bernard, président de la FDSEA 58 conclut : « Merci aux intervenants et aux éleveurs de leur présence ce soir. Je voudrais aussi rappeler aux élus présents certains points. Lorsque nous avons une entreprise comme la filière bovine de notre département et que nous avons des personnes engagées prêtent à s’investir pour la conserver et qui la font évoluer tous les jours face aux enjeux d’avenir (climat, bien-être animal, etc.), je ne comprends pas pourquoi il leur est dit de supprimer des animaux de leurs cheptels car ils sont la cause, selon certains, du dérèglement climatique. Il faut que vous preniez conscience que supprimer des animaux c’est réduire le nombre d’élevages, donc le nombre de familles sur le territoire. Cela impliquera aussi de modifier la physionomie du paysage car les prairies deviendront des friches ! Que deviendront ces dernières une fois qu’elles seront à l’abandon ? De plus, vous avez voté des lois qui désormais existent et qui ne sont pas appliquées. Je pense notamment à Égalim. Si la volonté de les faire appliquer avait été là, les agriculteurs Bio seraient très probablement dans une situation moins dramatique qu’aujourd’hui. Cette dernière est donc de votre responsabilité. Je rappelle aussi que l’élevage bovin avec les sapins de Noël et d’autres productions sont là où les services publics ne sont plus ou sont en recul. Enfin, pourquoi certaines lois ne sont pas respectées quand d’autres sont surappliquées ? La profession respecte ce qu’on lui impose, mais elle a ses limites. Nous ne travaillons pas pour avoir des injonctions ou des amendes zélées, ni pour voir des gens - des contrôleurs - rentrer chez nous sans nous prévenir. On atteint le trop-plein. Alors, chers élus, faites appliquer toutes les lois de manière égale et équitable et arrêtez de nous emmerder inutilement ». Le prochain rendez-vous de la FDSEA se déroulera à Pouilly-sur-Loire, le 7 décembre à partir de 18 h 30, pour la soirée grandes cultures.

Notes : (1). Les interventions seront détaillées plus largement dans un prochain numéro de TDB.
(2). Culture Viande : Syndicat qui fédère les entreprises françaises des viandes dites de boucherie (abattage, découpe, préparation et commercialisation) relevant du secteur de la viande bovine, ovine et porcine.
(3). Interbev est l’Association Nationale Interprofessionnelle du Bétail et des Viandes, fondée en 1979 à l’initiative des organisations représentatives de la filière française de l’élevage et des viandes.

À deux

Durant la rencontre, Dominique Guineheux explique qu’un bon contrat est un contrat où les deux parties signent. Suite à cela, quelques éleveurs on fait part de leur scepticisme sur la contractualisation indiquant que s’ils avaient signé un contrat il y a deux ans, ils n’auraient pas pu bénéficier de la hausse des cours et auraient subi la hausse de leur coût de production. Dominique Guineheux en a donc profité pour expliquer qu’il existait plusieurs types de contrat : les contrats à prix ferme qui peuvent provoquer les effets évoqués précédemment ; les contrats à prix minimum garanti c’est-à-dire qu’un prix minimum est garanti mais qu’en cas de cours supérieur au prix minimum garanti les animaux sont payés au prix de marché ; les contrats indexés c’est-à-dire que le prix est défini en fonction d’indicateur comme le coût de production et le marché, ce type de contrat à l’avantage de voir le prix payé suivre l’évolution des charges et du marché. C’est ce dernier qui a fait l’objet d’un accord interprofessionnel en 2019 sur le label Rouge et qui fait aujourd’hui l’objet d’une loi : la loi Égalim. (1). (Signature de l’encadré : FDSEA 58).