Mortalité élévée dans un élevage
Une antenne relais soupçonnée

AG
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Un éleveur du canton d'Arnay-le-Duc rencontre un taux de mortalité anormalement élevé dans son cheptel. Une géobiologue soupçonne une antenne relais d'en être la cause.

Une antenne relais soupçonnée
Guy Drouhin ne veut pas revivre le même calvaire que l'hiver dernier, au cours duquel 27 de ses bovins ont été retrouvés morts.

C’est une « histoire » dont se serait bien passé Guy Drouhin, éleveur au lieu-dit Les Baraudins sur la commune de Lacanche. Cet éleveur de 110 vaches allaitantes (deux tiers Salers, le reste en Charolais) collectionne les « pépins » depuis l’hiver dernier. « Cela a commencé par ma caméra de surveillance pour les vêlages, elle ne marchait plus, tout était brouillé. L’électricien n’expliquait pas cette panne, malgré plusieurs tentatives de réparation », indique l’homme de 58 ans, « dans le même temps, j’ai constaté que plusieurs de mes vaches étaient de plus en plus nerveuses, elles se montraient très agitées au cornadis. Certaines d’entre elles perdaient des poils, des oreilles jusqu’à l’épaule, cela n’était jamais arrivé. Elles étaient pourtant tondues, déparasitées… Le vétérinaire trouvait cela très bizarre. Un traitement contre les poux n’a rien changé. Pour ne rien arranger, un matin en arrivant, j’ai aperçu l’un de mes bovins qui avait la moitié de la tête enflée : le vétérinaire n’avait jamais vu ça, il était d’autant plus stupéfait… Grâce à une injection de cortisone, tout est heureusement rentré dans l’ordre ». Guy Drouhin n’était pas au bout de ses peines : « une vache et un taureau sont tombés malades, ils perdaient du poids et présentaient chacun les mêmes symptômes, avec notamment des diarrhées chroniques. Nous avons tout tenté avec le vétérinaire, mais ces deux animaux très amaigris ont terminé par l’euthanasie… Pire encore, et c’est là le plus navrant : la mortalité des veaux n’a cessé de croître, avec de nouveaux problèmes de diarrhées, et aussi de la grippe. J’ai terminé l’hiver sur le nombre impressionnant de 23 veaux morts, en plus de quatre bovins adultes. J’ai toujours quelques pertes chaque hiver ici, mais jamais autant, je suis à sept morts en moyenne sur les deux années précédentes. Un dernier exemple me revient à l’esprit : mes génisses de renouvellement inséminées et échographiées pleines revenaient en chaleurs. Une, cela peut arriver, mais pas plusieurs… Quelque chose ne tournait vraiment pas rond ».

Quelle cause ?

Sur conseil de son vétérinaire, désemparé lui aussi, Guy Drouhin prend contact avec une spécialiste de la géobiologie. Cette activité étudie et détermine les « agressions » telluriques (de la Terre) ainsi que les pollutions liées aux technologies modernes et/ou activités humaines (électromagnétisme, téléphonie mobile, radars, antennes relais, radioactivité, qualité de l’air, qualité de l’eau…). Edwige Raillard est réquisitionné, cette jeune femme originaire de Coulmier-le-Sec se déplace à plusieurs reprises à Lacanche et relève à chaque fois d’importants champs électromagnétiques : « Il y en a partout, dans toutes les structures du bâtiment, à savoir les cornadis, les barrières, les poteaux, la charpente… Un problème comme celui-ci peut s’expliquer par plusieurs raisons, comme un transformateur déplacé ou une ligne enterrée qui seraient à l’origine d’une pollution électrique par le sol. Ce n’est pas le cas chez Guy Drouhin. Une mauvaise qualité de prise de terre pourrait aussi en être en cause : cette hypothèse a vite été écartée après mesure de la résistance. Nous avons continué à chercher : il n’y a eu aucune modification sur l’installation électrique du bâtiment, aucun ventilateur installé ou autre appareil… Le compteur Linky ? Il n’y en a pas. Cette piste a donc été éliminée à son tour. Il est important de préciser que l’éleveur dispose d’un autre site, à 2 km à vol d’oiseau : là-bas, il n’y a aucune pathologie. Le vétérinaire n’y vient jamais, à part pour les vaccinations ». Le faisceau d’hypothèses s’est donc considérablement réduit. « Toutes les éventualités étaient écartées sauf une. En effet, une antenne relais est située à seulement 300 mètres de la ferme. Notre recherche a abouti sur une information importante, voire capitale : une modification de fréquence a été effectuée en mai 2021, avec un passage de la 4G à 4G ++. Le site Cartoradio nous l’a confirmé », souligne Edwige Raillard, pour qui la responsabilité de l’antenne ne fait plus de doute.

Quels remèdes ?

Guy Drouhin a multiplié les requêtes ces derniers mois, en vain : « j’ai essayé de contacter un paquet de monde pour savoir ce qu’il était possible d’envisager. J’aurais souhaité, dans l’idéal, que cette antenne soit coupée une dizaine de minutes, le temps de refaire des mesures dans mon bâtiment, pour bien s’assurer que le problème vient de là. Mais ma demande n’a pas pu aboutir, du moins pour l’instant, car toutes les portes se sont refermées devant moi ». La géobiologue, à son niveau, préconise à Guy Drouhin de réaliser des liaisons équipotentielles. Ce dispositif consiste à relier chaque poteau, bout de charpente et cornadis à la terre : « des problèmes du même type, certes moins violents, ont été réglés dans d’autres élevages où je suis intervenue, et où cette technique a été mise en place. En revanche, il s’agissait à chaque fois du réseau 4G, mais pas de la 4G ++ qui est une sorte de fausse 5G. Quelques interrogations subsistent donc quant au résultat final », commente Edwige Raillard. Malgré ces incertitudes, Guy Drouhin n’a pas hésité bien longtemps pour s’engager et donner son aval pour la réalisation de ces travaux, dont le montant avoisinera les 8 000 euros : « de grands câbles en cuivre vont être installés pour mettre à la terre ces champs électromagnétiques. Je n’ai pas le choix, je dois tenter. Je ne peux pas continuer un hiver comme ça. Il est impossible de reperdre autant d’animaux, tout en continuant de payer des factures pour tenter de résoudre ces problèmes ».

Une rencontre pour en parler

Une rencontre avec plusieurs personnes – dont des élus — s’est déroulée début novembre sur l’exploitation de Guy Drouhin : « il y avait Marc Frot, du Conseil départemental, Jacques Brémont un assistant du sénateur Alain Houpert, un sourcier Édouard Vieillard et la géobiologue Edwige Raillard, mon vétérinaire Pierre Stellian, Nathalie Raze qui est déléguée cantonale du GDS, les maires de Lacanche et Maligny, ainsi mon électricien et plusieurs voisins. Il y avait aussi Ludovic Lelong, un éleveur de Champignolles qui se pose des questions similaires pour un de ses bâtiments situé à Vernusse. Tout le monde semble comprendre mon problème. J’espère que nous allons trouver des solutions, et vite ». Guy Drouhin affirme d’ores et déjà qu’il ne « lâchera rien », si les liaisons équipotentielles ne donnent pas entière satisfaction.

 

 

Témoignage

Pierre Stellian (vétérinaire à Arnay-le-Duc) : « Je travaille avec Guy Drouhin depuis plus d’une vingtaine d’années. Comme dans tous les élevages, il est habituel de rencontrer quelques problèmes pathologiques, surtout dans la catégorie des veaux de 0 à 6 mois. Nous avions mis en place des protocoles de prévention et de soins qui marchaient relativement bien. Seulement quatre, voire cinq mortalités étaient observées chaque année. Mais l’hiver dernier, les chiffres ont explosé. Nous ne comprenions pas ce qui se passait, les résultats n’étaient pas bons du tout malgré la prévention et les traitements. Le fait de retrouver trois ulcères de la caillette consécutivement n’était vraiment pas courant. Les animaux adultes se battaient entre eux et étaient stressés en permanence, l’éleveur a été obligé de les écorner. Certains adultes ont présenté des troubles diarrhéiques et toutes nos recherches parasitaires, de certaines maladies comme la para-tuberculose ont été vaines. Il n’y avait pas eu de changements dans la conduite de l’élevage, ni dans les protocoles de prévention, de vaccination, ou autres traitements antiparasitaires. Face aux soupçons grandissants sur l’antenne, nous avons réalisé un dosage d’hormones thyroïdiennes, la thyroïde étant une glande sensible aux ondes. Les résultats allaient bien dans le sens de nos soupçons… Ce changement d’antenne est intervenu en mai : à cette période, les animaux étaient au pré. Ceux qui sont restés dehors et ceux qui se sont dirigés vers le bâtiment de Guy Drouhin à Lacanche n’ont eu aucun problème… Les ondes, nous n’en parlions pas à l’époque. Quand j’étais à l’école il y a 35 ans, ce n’était pas à l’ordre du jour et pour cause, il y en avait beaucoup moins… C’est vraiment la première fois que je vois cela. J’ai déjà eu écho de problèmes de ce type dans les médias. En production laitière, les éleveurs arrivent plus rapidement à les détecter, car la baisse de la lactation et l’augmentation des cellules dans le lait sont immédiates ».

 

2e photo
L'antenne située à seulement 300 mètres des animaux a subi un changement de fréquences en mai 2021. Une autre antenne se trouve à 600 mètres de l'exploitation.