Productions végétales
La moutarde bio monte en puissance

AG
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Un agriculteur du village de Barges, au sud de Dijon, vient de récolter sa toute première moutarde AB.

La moutarde bio monte en puissance
Damien Baumont a réussi à moissonner quelques heures avant l'orage du 11 juillet.

Petit à petit, l’oiseau fait son nid. La moutarde bio se développe de plus en plus dans la région, elle qui a pointé le bout de son nez il y a seulement deux ans au sein de l’APGMB. « De 10 tonnes en 2021, la commande des industriels est passée à 50 tonnes en 2022, 250 tonnes cette année, et elle sera encore deux fois plus importante en 2024 », informe Damien Baumont, exploitant agricole à Barges et vice-président de l’association des producteurs. Celui-ci s’est lancé dans l’aventure bio cette année : sa moisson a été réalisée le 11 juillet, juste avant le gros orage qui a sévi dans plusieurs départements du grand Est. « Pour l’anecdote, ma moissonneuse était en panne, il y avait urgence d’agir avant l’arrivée de la grêle. J’ai pu compter sur la disponibilité et les services d’un voisin pour me dépanner avec sa machine. Merci à lui ! », confie le Côte-d’orien, qui enregistre un rendement de 5 q/ha sur ses 7,5 ha de cultures.

Entre 2 et 3 q/ha de moyenne ?

Ce résultat est certes « un peu décevant », mais en bio, les volumes sont toujours limités. « Comme en conventionnel, nous observons une baisse de rendements de 30 à 40 % par rapport à ce que nous avions prévu de récolter. À l’évidence, le coup de sec a impacté les cultures. Les grains sont très petits, il y a eu également quelques problèmes à la floraison. Dans mon cas, en bio, j’ai été impacté par la gestion du vulpin, mais aussi par le sclérotinia, l’alternaria et un peu par la rouille blanche. Heureusement, la pression d’insectes a été un peu moindre que d’ordinaire, avec des semis assez tardifs réalisés après le 15 octobre. Même avec 5 q/ha, je sauve encore la mise car la culture était dans de bonnes terres. La moyenne en bio cette année, dans la région, variera plutôt entre 2 et 3 q/ha ». Le lot de consolation des producteurs en AB vient du prix de la tonne de moutarde, qui s’élève à 3 000 euros : « avec un rendement de 3 q/ha, le chiffre d’affaires est tout de même à 900 euros. Les nouvelles variétés qui arrivent, plus tolérantes aux insectes et aux maladies, devraient nous permettre de viser un peu plus haut. Même si elle est très technique et avec des moyens limités, la culture de moutarde bio a de l’avenir, j’en suis persuadé. Dans mon cas, je vais passer à une quinzaine d’hectares pour 2024 ».

Avis aux amateurs

La prochaine campagne de moutarde est déjà au cœur de l’actualité. Les engagements des producteurs, c’est en ce moment, comme le rappelle Damien Baumont. « Au 12 juillet, nous sommes déjà à 8 000 ha d’intentions de semis. Le prix du bio restera à 3 000 euros. Le conventionnel, lui, passera à 1 500 euros, après un tarif exceptionnel de 2 000 euros/tonne cette année. La commande des industriels diminue à 11 000 tonnes, contre 15 000 en 2023. Cela ne veut pas dire que nous allons baisser les surfaces de production, bien au contraire. Cette année, nous avions 12 000 ha : il nous en faudra au moins autant car nous allons baisser nos prévisions de rendements. Aussi et surtout : nous avons la volonté de développer un stock tampon qui sera mis en place chez nos différents OS. L’idée est d’éviter les ruptures de stocks comme ce fut le cas en 2022. Nous sommes au stade des réflexions, rien n’est calé, mais il serait bien de pouvoir stocker 3 000 voire 4 000 tonnes. Les différentes modalités de ce projet sont actuellement étudiées ».

Des grêlons, mais une belle moisson
photo encadré

Des grêlons, mais une belle moisson

Damien Baumont et ses associés ont réalisé leur toute première moisson bio, y compris dans d’autres cultures. Les rendements et la qualité sont en rendez-vous dans le triticale (41 q/ha) et dans les blés (entre 40 et 45 q/ha, PS entre 82 et 85, protéines entre 9 et 13). Les résultats sont tout aussi encourageants dans les orges de printemps, qui dépassent les 50 q/ha. Ces orges seront vendues au Beaunois Michel Couvreur, mondialement connu pour son whisky. Les céréales de Damien Baumont ne se retrouveront donc sur le marché que dans une vingtaine d’années, le temps de fabriquer ce produit dans les règles de l’art. Dans la partie des « déceptions », il y a malheureusement l’orage du 11 juillet, qui a impacté les blés non récoltés de Damien Baumont : « cela concerne 50 hectares : sur 11 d’entre eux, les dégâts se chiffrent aux environs de 50 %. Dans 20 autres hectares, nous sommes aux alentours de 30 %. Tout n’est cependant pas négatif car les fortes précipitations, quand celles-ci n’étaient pas accompagnées de grêle, ont certainement fait le plus grand bien au tournesol, au soja ainsi qu’au sarrasin, nos trois autres cultures ».