Productions végétales
Une petite filière est née

AG
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Plusieurs exploitations cultivent du chanvre au nord de Dijon. La production est livrée à une entreprise locale, qui l'utilise dans la construction de bâtiments.

 

Une petite filière est née
Jean-Sébastien Juret a récolté une parcelle de 2,5 ha, le 9 août à Chaignay.

Six adhérents du Geda de la Tille se lancent dans la culture du chanvre. « C’est une grande première pour nous et même pour notre secteur. Les chanvrières les plus proches d’ici sont plutôt du côté de Gray ou dans l’Aube », indique Jean-Sébastien Juret, l’un des exploitants concernés. Une rencontre avec Serge Wrobleski, gérant de l’entreprise Alentour basée à Lux, a été à l’origine de cette aventure lancée au printemps 2021, comme l’explique le Côte-d’orien de 35 ans : « un brevet sur des panneaux à ossature bois noyé dans du béton de chanvre a été déposé par cette entreprise spécialisée dans la construction. L’idée, avec cette plante, est de l’utiliser comme isolant. L’approvisionnement se faisait jusqu’à présent à l’extérieur du département, et parfois même très loin, à plusieurs centaines de kilomètres. Serge Wrobleski a émis le souhait de se fournir dans un rayon de 20 km autour de chez lui. Nous avons répondu à sa demande en nous engageant sur un prix rémunérateur, supérieur à celui du marché. Notre démarche a été appuyée techniquement par la Covati, la Chambre d’agriculture et des étudiants d’AgroSup Dijon ».

Ça part pas mal

Les résultats de la campagne 2021 ont été encourageants avec des rendements allant parfois jusqu’à 6 tMS/ha sur les 12 premiers hectares de production. Malgré la sécheresse de l’année en cours, le second exercice est en passe de livrer des tonnages à peu près similaires sur une surface plus importante (27 ha). Jean-Sébastien Juret, devenu référent chanvre au Geda de la Tille, affiche une certaine satisfaction : « cette culture est à la mode, elle a clairement le vent en poupe. Je m’étais déjà renseigné sur son itinéraire technique avant la sollicitation d’Alentour, j’avais bien compris que la principale difficulté résidait avant tout dans la recherche de débouchés. Cette réunion de mars 2021 est donc plutôt bien tombée ». Comme l’indique l’agriculteur de Chaignay, le chanvre demande un peu moins d’eau que le maïs : « c’est un avantage certain dans notre zone. Il y en a aussi un autre, et non des moindres : la culture ne nécessite aucun produit phyto. Il faut quand même un minimum de terre pour espérer un minimum de résultat… Pour ma part, j’ai semé début mai sur la partie en bio de mon exploitation, avec un précédent luzerne. Les semences ne sont pas traitées, il n’y a donc aucun problème. Il n’y aurait pas eu le chanvre, j’aurais certainement opté pour du triticale ».

Des réflexions

Jean-Sébastien Juret précise que la plante entière est fournie à l’entreprise de Lux : « nous ne récoltons pas les graines pour le moment, mais c’est une piste à creuser car le prix de la tonne est actuellement aux alentours de 2 000 euros. Il nous faudra trouver le procédé et le matériel adéquat. La société de Serge Wrobleski n’a besoin que de la tige, celle-ci sera broyée et malaxée avec un mélange chaux-plâtre. La production est livrée en balle ronde. Notre petite filière se met tout doucement en place. À la base, nous ne sommes pas parfaitement équipés, ne serait-ce que pour stocker ». Une réunion se tiendra certainement courant septembre pour définir les futurs besoins de 2023 et l’assolement pour y répondre. Jean-Sébastien Juret se montre motivé à l’idée de reconduire l’expérience et de la pérenniser dans le temps : « il est toujours intéressant de créer autre chose. Dans notre cas, une filière 100 % locale est en train de naître et de se développer ! Et puis, du chanvre, ce n’est pas tout à fait nouveau, il y en avait plus de 200 000 ha en France au début du siècle dernier. Cette plante est aussi utilisée dans le textile : il me paraîtrait plus cohérent d’en faire davantage chez nous plutôt que d’importer du coton de l’autre bout de la planète… Dans notre utilisation actuelle, le carbone est stocké dans les maisons ne sera jamais libéré, il n’est pas perdu et c’est une satisfaction supplémentaire ».

2e photo

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La densité importante de semis a permis d'obtenir des brins fins, grands jusqu'à 2,20m, qui ont tous séché très vite après avoir été fauchés.