Juges en concours
Tenue de sortie

AG
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Plusieurs éleveurs côte-d'oriens sont régulièrement sollicités pour juger des animaux en concours. Témoignages.

Tenue de sortie
Parmi les personnes contactées : Alain Terrillon, éleveur dans le Châtillonnais, a été « réquisitionné » pour le concours brun de Cournon.

Un peu comme un arbitre sur un terrain de football : il n’est pas l’acteur principal mais son rôle est capital. Juge, dans un concours d’animaux, est une mission confiée à plusieurs Côte-d’oriens tous les ans, parfois sur les plus prestigieux événements. Il ne faut pas remonter bien loin pour l’illustrer : deux éleveurs ont eu l’honneur de juger des vaches brunes très récemment, en l’occurrence Émeric Loosli (Chazeuil) au dernier Space et Alain Terrillon (Griselles) au Sommet de l’Élevage. « C’était l’inverse l’an passé : Émeric s’était rendu à Cournon et moi à Rennes », fait remarquer Alain Terrillon, pour qui tout a commencé en 2013 : « cette année-là, notre syndicat et BGS avaient proposé une formation pour devenir juge. L’idée était de recruter des éleveurs dans notre secteur. Je m’étais lancé avec plusieurs collègues passionnés tout comme moi par la génétique et les concours ». Alain Terrillon a été sollicité plusieurs fois par des organisateurs depuis cette formation : « je dois en être à sept ou huit concours à ce jour. Le dernier appel date d’environ trois mois, avec une proposition de la fédération Opti’Brune qui organise le concours brun de Cournon. J’ai accepté volontiers, même si j’avais déjà occupé ce poste au Sommet de l’Élevage il y a plusieurs années ».

Être impartial

Alain Terrillon partage avec nous les différentes facettes de l’exercice : « être juge dans un concours, cela va sans dire, c’est tout d’abord mettre une croix sur la possibilité de concourir nous-mêmes avec nos propres vaches… Avant cet appel d’Opti’Brune, je ne savais pas encore si j’allais emmener des animaux ou non, la décision a donc été prise très rapidement. En pratique, cette mission n’est pas toujours facile : nous avons une certaine responsabilité, pour ne pas dire une grande responsabilité ! En effet, nous avons en face de nous 20, 30 voire 40 éleveurs qui ont préalablement passé beaucoup de temps à préparer leurs vaches, toute erreur de jugement n’est vraiment pas la bienvenue, celle-ci pourrait ruiner les espoirs de certains. Le stress et la pression sont obligatoires le jour J : à mon humble avis, si nous ne les avons pas, ce n’est pas bon signe… Malgré mon expérience, je peux vous assurer que je l’avais encore, cette pression, à Cournon ! Lors du jugement, nous devons faire le vide dans notre tête, être parfaitement impartiaux, rester droits dans nos bottes et mettre de côté notre chauvinisme, si nous en avons un ! Au Sommet de l’Élevage par exemple, je connaissais bien les personnes qui menaient les vaches, plusieurs étaient même de mon département. Quoi qu’il arrive, notre ligne de conduite doit rester la même tout au long du concours, nous devons être en mesure de justifier constamment nos choix. Il y a d’ailleurs de petits débriefings à l’issue des épreuves, avec les éleveurs et les organisateurs. Avec un bon argumentaire, tout se passe toujours très bien ».

En pleine harmonie

La grande championne d’un concours doit être la même, quel que soit le juge désigné. « C’est ce qu’il doit se passer, en théorie », commente Alain Terrillon, « ce n’est pas toujours évident car chaque juge a souvent son petit cachet et sa ligne de conduite. Certains vont peut-être donner un peu plus d’importance à la mamelle, d’autres à la solidité, à la ligne de dos, aux membres… Différentes harmonisations sont parfois organisées entre juges pour avoir une même vision : des Français et des Européens ont d’ailleurs rendez-vous dans cet objectif les 8 et 9 novembre prochains chez Laurent Changarnier, à Montmoyen ». L’éleveur de Griselles ajoute une anecdote lui tenant tout particulièrement à cœur : « un juge est toujours accompagné d’un ring man, qui est là pour placer les vaches et assurer la fluidité de ces dernières. Cela fait trois ou quatre concours que j’évolue en pleine complicité avec Yanic Weber, mon ancien apprenti venant du Jura. C’est une grande fierté de m’être rendu il y a peu à un concours à Hazebrouck, dans le département du Nord, où Yanic était cette fois-ci le juge et moi le ring man ! ».

Zoom chez les ovins

Le concours charollais du dernier Salon de l’agriculture avait été jugé par deux éleveurs Côte-d’oriens : Thierry Maréchal, de Viévy, et Baptiste Guyot, de Diancey. Claire Debrut, technicienne à l’OS Mouton Charollais, explique à son tour les différentes facettes de l’organisation : « Nous fonctionnons généralement par binôme, avec un juge expérimenté, qui s’est déjà prêté à l’exercice et qui a fait ses preuves en tant que sélectionneur et un jeune, afin que ce dernier puisse se former en même temps. Le choix des jurys pour un concours est décidé en conseil d’administration, le premier critère qui nous limite dans les possibilités est que le juge ne doit bien sûr pas présenter d’animaux en concours ! Il arrive cependant qu’il soit le naisseur d’un ou plusieurs animaux. Dans ce cas, il se retire généralement du jugement sur la section et c’est le deuxième jury, éventuellement aidé de quelqu’un d’autre, qui tranche. Dans la mesure du possible, nous essayons également de ne pas prendre toujours les mêmes juges, de changer de département, voire de région. Avec l’expérience, nous connaissons également ceux qui sont les plus doués pour commenter leurs choix et parler au micro ». Baptiste Guyot avait donc vécu sa toute première expérience lors du Sia 2022. Le jeune homme de 26 ans revient sur cette participation : « L’OS m’avait préalablement sondé, leur proposition n’était donc pas une grande surprise pour moi. Cette aventure a été très enrichissante, elle m’a permis de découvrir un grand concours de l’intérieur. Être juge représente beaucoup de responsabilités, surtout à Paris. Le fait d’être entouré de Thierry Maréchal et d’une troisième personne, un juge international, m’a quelque part rassuré. Tout s’est finalement bien passé. Si l’on me sollicite de nouveau à l’avenir, j’accepterai volontiers. Ce jugement au salon de l’agriculture m’a aussi et surtout donner l’envie d’y aller avec mes propres animaux, car c’est un concours de très haut niveau ! ».