AG de la SDAE
La guerre en Ukraine : un conflit aux multiples conséquences agricoles

Christopher Levé
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Lors de l'assemblée générale de la section des anciens exploitants de l'Yonne, qui a eu lieu le vendredi 9 septembre, à Appoigny, Arnaud Rondeau, chargé de mission syndicale à la FOP, est intervenu sur « l’impact de la guerre en Ukraine sur les marchés agricoles ». 

Ukraine
Arnaud Rondeau, chargé de mission syndicale à la FOP.

Le vendredi 9 septembre a eu lieu l’assemblée générale de la SDAE de l’Yonne, à Appoigny. À cette occasion, Arnaud Rondeau, chargé de mission syndicale à la FOP, est intervenu sur le sujet de la guerre en Ukraine et son impact sur l’agriculture.
Ce dernier a d’ailleurs rappelé que l’Ukraine « est un grand pays agricole. La guerre a des impacts sur l’agriculture et sur certains marchés agricoles, qui nous touchent tout particulièrement en Europe et en France ».
À commencer par les productions céréalières. L’Ukraine, mais aussi la Russie, sont deux puissances agricoles en la matière. La guerre impact donc fortement les importations vers les autres pays de l’UE. « Au niveau du blé, l’Ukraine produit 30 à 35 Mt/an (équivalent à la France). Ce blé est destiné à 70 % à l’export (cela représente 12 % des exports mondiaux) », détaille Arnaud Rondeau. « Au niveau de la Mer Noire (Ukraine + Russie), c’est 115 Mt (30 % des exports mondiaux) ». Pour le maïs, l’Ukraine produit 40 Mt/an dont 80 % dédiées à l’export. « En ce qui concerne le colza, la Mer Noire produit 8 % des productions mondiales de colza et est à l’origine de 23 % des exportations de graines, de 17 % de l’huile et de 7 % des tourteaux. C’est, là encore, un acteur majeur de ce marché ». L’Ukraine a elle seule est le deuxième exportateur de colza au monde : 76 % des graines (soit 2 Mt), 53 % des huiles (55 k) et 58 % des tourteaux (73 k) importés dans l’UE proviennent d’Ukraine.
Quant au tournesol, « l’Ukraine écrase le marché mondial », assure Arnaud Rondeau. « C’est une production de 17,5 Mt par an, soit l’équivalent de ce que l’on produit sur l’UE (27 pays) ». La Russie est aussi très haute placée avec une production annuelle de 15,5 Mt. « Ensemble, c’est une production trois fois plus importante que celle de l’UE (33 Mt contre 10, Mt). Aussi, la Mer Noire assure 80 % des exportations mondiales de tourteaux et d’huiles de tournesol. Et à elle seule, l’Ukraine est à l’origine de 50 % des exportations d’huile de tournesol et de 60 % des exportations de tourteaux. Cela pose donc un sérieux problème, notamment en France, car il a fallu trouver des tourteaux ailleurs, depuis le début de la guerre ».
Les filières animales sont également impactées. Pour exemple, 20 % du tonnage de poulets de chair consommés en France proviennent d’Ukraine.

Des silos pleins

Alors, qu’en est-il de la situation actuelle ? La main-d’œuvre agricole est partie à la guerre ou s’est réfugiée en Europe (beaucoup en Pologne) et les outils agro-industriels sont détruits ou à l’arrêt. « Par exemple, il n’y a plus d’usine de trituration de graine de tournesol en état de fonctionner sur le territoire ukrainien. La récolte de 2021 est alors encore dans les silos et la récolte de 2022, qui représente deux tiers d’une récolte normale (une surprise pour Arnaud Rondeau), est aussi dans les silos », constate Arnaud Rondeau. « Il y a très peu de mouvements (le peu concerne la Roumanie, la Hongrie et la Pologne) car il est très compliqué de le faire par les rails ou la route. Les premiers bateaux d’exportation qui ont repris leur activité sur la Mer Noire transportent du maïs, du blé et du colza, mais pas de tournesol. Les volumes sortants sont très faibles ».
Ce sont des problèmes d’approvisionnement en carburant et énergies, des problèmes de maintenance, des problématiques pour importer des produits phytos, des engrais et des produits vétérinaires (qui manquent et sont devenus chers).
Les courts sont également perturbés. « Sur le blé, au 15 février, à la veille de la guerre, on était à 250 euros la tonne sur les marchés, ce qui était déjà un prix relativement important. En quelques semaines, entre le 15 avril et le 15 mai, ce prix est passé à 440 €/t. Aujourd’hui, il est redescendu à 320 €/t ». En maïs, il était à 230 €/t, monté à 380 €/t et redescendu à 315 €/t (le colza : 600 – 1 080 – 610 ; le tournesol : 600 – 1 000 – 720).
Les consommables ont connu une inflation des prix, comme l’huile de tournesol, mais aussi le gazole, le gaz naturel et le gaz de ville ou encore les engrais. Le conflit en Ukraine a donc des conséquences fortes pour l’agriculture mondiale, mais aussi pour l’économie.