Initiative
Réanimer un village par le commerce rural
Comme Chaumard (lien), la Chapelle-Saint-André bénéficie d’un soutien de l’État dans le cadre du Plan de reconquête du commerce rural. Explications avec Janny Siméon, maire de la commune.
À l’instar de la mairie de Chaumard, celle de la Chapelle-Saint-André a obtenu une subvention de l’État de 50 000 euros via le Plan de reconquête du commerce rural. Ce dernier vise à soutenir les communes pour la réimplantation d’un commerce multiservices. « Nous remercions la sous-préfecture de Clamecy de nous avoir parlé de cet appel projet » pointe Janny Siméon, maire de la Chapelle-Saint-André. « Mais nous voulons aller au-delà du trépied bar - restaurant - épicerie ». Ainsi, le projet, déjà labellisé par les 1 000 cafés (voir : https://www.1000cafes.org/), alliera ces trois points, avec éventuellement en plus une bibliothèque, des chambres d’hôte, un relais colis, une vente de jeux… « Si nous voulons que cela marche, il faut que l’offre réponde à nombre de problématiques » souligne le maire.
Disparition progressive
Pour comprendre cette situation, il est nécessaire de faire un pas dans le passé. « J’ai toujours vécu ici et je me rappelle que le village était très vivant quand j’étais enfant. Mais, au fil des années, cela s’est effiloché à cause des fermetures successives de la scierie, du restaurant, de la boulangerie, du café… Le monde que j’ai connu n’est plus le même mais on ne peut pas continuer à assister à la mort de notre village sans rien faire ». Avec environ 300 âmes contre plus de 500 autrefois, la Chapelle-Saint-André compte environ 90 personnes de plus de 70 ans, et environ 30 enfants de mois de 12 ans. « On ne voit plus personne dans les rues, à part un peu l’été quand les maisons secondaires sont occupées. Mais ce n’est pas cela qui fera renaître notre village – en tout cas je ne compte pas trop dessus ». Pour lui, l’important est de s’attacher aux attentes des résidents à l’année et des travailleurs locaux. « Je suis persuadé qu’en proposant une offre diversifiée, le futur établissement aura un bel avenir tout en ayant un rôle central dans notre village ».
Le projet
Ainsi, c’est un bâtiment de 160 m2 qui sera entièrement rénové. Le rez-de-chaussée concentrera une cuisine, une salle de bar/restaurant, une épicerie dont le comptoir fera également office de relais colis ainsi qu’un point de vente de la Française des Jeux. Au même niveau, une terrasse extérieure sera installée. Dans un second temps, à l’étage, dont l’accès se fera par l’extérieur, des chambres d’hôtes avec salles de bains privatives seront aménagées. « Nous avons beaucoup de travailleurs en déplacement et il n’y a pas d’hôtel dans les environs. Nous voulons donc combler ce manque ». Le coût de la première phase des travaux s’élève à 500 000 euros et comprend la réfection totale du rez-de-chaussée ainsi que le gros œuvre dont la toiture, l’électricité, le réseau d’eau pour le premier étage. La seconde phase, concernant l’étage, est estimée à environ 200 000 euros. « C’est un coût non négligeable, il faudra donc que les gestionnaires soient très impliqués dans leur travail pour que cela fonctionne. Le conseil municipal sera là pour veiller au grain ». Si les travaux ne sont pas encore commencés, Janny Siméon a déjà une idée du profil recherché pour tenir cet endroit : « il faudra un bon cuisinier proposant des plats copieux, simples, et goûteux. Il faudra aussi accepter d’ajuster les horaires en fonction de l’activité du bourg et être force de propositions via l’organisation d’événements comme des concerts. En somme, il faut une personne investie ». Afin de faciliter l’installation du ou des gestionnaires, le maire est prêt à proposer un logement communal. La fin des travaux est prévue pour août ou septembre 2024. Janny Siméon conclut : « nous mettons beaucoup d’espoir dans ce projet, et espérons qu’il répondra aux besoins de notre territoire ».
Un goût amer
Si Janny Siméon remercie tous les partenaires financiers du projet (communauté de communes, Conseil départemental, Région et État), il insiste : « On ne peut pas piquer l’État pour cette initiative, mais on peut tout de même rappeler que l’association des maires ruraux alerte les institutions sur la désertification des commerces de campagnes depuis longtemps. Pour y remédier, l’agenda des maires ruraux de 2019 mentionnait dans ses 200 propositions, un soutien identique au plan de reconquête du commerce rural au travers du projet des 1 000 cafés. D’ailleurs, notre projet a été labellisé et devra donc répondre à un cahier des charges précis ». Il poursuit : « Au vu de tout cela, je ne sais pas si l’engagement de l’État arrive trop tard, mais en tout cas il aurait pu être fait plus tôt. De plus, si un soutien avait été offert antérieurement, il est certain que cela aurait demandé moins d’argent. Même si je salue son intervention aujourd’hui, il ne faut pas être dupe sur ses choix de société. En effet, pour le moment, il semble que l’État oublie les 33 % d’habitants qui vivent sur 66 % du territoire. On le constate notamment avec le retrait massif des services publics, et sans hôpital ou encore sans maternité, nous allons avoir du mal à faire venir de nouveaux administrés. C’est bien beau de distribuer de l’argent aux collectivités rurales, mais quoi et à qui cela pourra-t-il servir si les campagnes sont désertées ? ».