Quelles plantes seront le mieux adaptées à notre climat dans 10, 15, 20 ans ? La question est sérieusement étudiée par l'Alliance BFC, qui a mis en place deux plateformes d'essais « nouvelles cultures » en Bourgogne-Franche-Comté.

Avec l'accent du sud
Hervé Martin, coordinateur des essais, il y a quelques jours près de l'ancienne sucrerie d'Aiserey.

Le temps change, et ce n’est sans doute pas près de s’arrêter. Si les projections se vérifient, le réchauffement climatique va se poursuivre et modifier considérablement la donne au niveau végétal. Plus de chaleur et des précipitations inégales selon les saisons : certaines plantes pourraient en pâtir. À l’inverse, d’autres pourraient mieux s’adapter à ce nouvel environnement et se faire un nid dans notre région.

L’Alliance BFC, union des trois coopératives Bourgogne du Sud, Dijon Céréales et Terre Comtoise, étudie le sujet sur deux plateformes d’essais mises en place à partir du printemps 2021 à Aiserey et Jours-lès-Baigneux. « Ces deux sites, bientôt suivis d’un troisième en Saône-et-Loire, de presque deux hectares chacun, sont implantés dans des contextes pédoclimatiques très différents. C’est un choix volontaire de notre part, pour mener à bien nos travaux au profit de l’ensemble les adhérents de l’Alliance BFC », présente Hervé Martin, responsable « développement filières, nouvelles cultures et HVE » au sein de l’Alliance BFC.

Ça sent bon les plantes aromatiques

Du thym, du romarin, de la lavande, de la silphie, du chia, du fenugrec et même des abricotiers, en attendant prochainement des nectariniers ou encore des pêchers : l’Alliance BFC ne ferme aucune porte pour ses expérimentations, comme l’explique Hervé Martin : « l’idée est d’avoir un maximum de références et d’ouvrir un large panorama. Nous nous intéressons aussi à l’agroforesterie sur ces deux sites en partenariat avec les Pépinières Naudet. Une évaluation agronomique est menée pour chaque espèce, chaque variété, avec une attention particulière sur leur résilience par rapport au stress hydrique. En parallèle, nous commençons d’étudier différents débouchés. Sur les deux plateformes, nous trouvons à peu près les mêmes plantes, à l’exception des arbres fruitiers, plantés uniquement sur la plaine dijonnaise car nous avons la possibilité d’irriguer au goutte-à-goutte sur place. Ces travaux vont durer plusieurs années, peut-être même plus d’une décennie ».

Avoir un temps d’avance

Frédéric Imbert, directeur R & D de l’Alliance BFC, rappelle qu’il n’y aura aucune concurrence avec les grandes cultures : « à terme, si nos adhérents étaient invités à opter pour une ou plusieurs de ces nouvelles plantes, seules dans un premier temps de petites surfaces seraient concernées. C’est un axe stratégique pour l’Alliance BFC qui s’accompagne d’une réflexion importante pour construire ces nouvelles filières et maîtriser les débouchés de commercialisation. Il n’y aurait bien sûr aucune concurrence avec nos productions classiques. L’actualité du moment concerne forcément les grandes cultures et leur pénurie dans le monde. Néanmoins, ces travaux relatifs à l’arrivée de nouvelles cultures doivent être engagés dès maintenant. Si nous ne les réalisons pas aujourd’hui, nous n’aurons aucune donnée fiable dans 10 ans, à l’heure où, peut-être, certaines de ces plantes pourraient avoir leur place dans notre région. Des marchés existent, mieux vaut disposer d’un temps d’avance sur ces expérimentations, c’est le but de ces essais et de l’effort engagé par le service R & D de notre union régionale ».

Premières tendances

Il est bien sûr trop tôt pour émettre la moindre conclusion à ce stade expérimental, d’autant que l’été 2021 a été particulièrement pluvieux, à l’opposé total de celui de celui que nous vivons actuellement. Les arbres fruitiers, eux, ne seront en production qu’en 2024. De premières tendances sont toutefois observées, comme l’explique Hervé Martin : « les récentes récoltes de lavande et de thym, pour ne citer qu’elles, ont été prometteuses. Leur tolérance au sec est indiscutable, tout comme la vitesse à laquelle elles se développent. Des difficultés sont en revanche rencontrées pour les cultures annuelles comme le pois chiche, la chia, ou le carthame, nous travaillons avec Inrae, les différents instituts ou nos partenaires industriels pour résoudre différentes problématiques relatives notamment à la maîtrise du désherbage, la fixation de nodosités, les dates de semis optimales, la maîtrise des ravageurs, ou encore mieux appréhender les besoins et la gestion de l’eau… ».