Prédation
Au fait, bonne année

AG
-

Un loup a attaqué des ovins il y a quelques jours dans le Châtillonnais. Quatre brebis ont été tuées, trois autres ont dû être euthanasiées. Les jeunes éleveurs, qui avaient investi beaucoup de temps, d’énergie et d'argent pour lancer leur troupe, sont forcément dégoûtés.

Au fait, bonne année

Rien n'est fait, alors le loup continue de faire des ravages en Côte-d'Or. La dernière attaque (ou l'une des dernières attaques, sait-on jamais…), date de la nuit du 29 au 30 décembre à Étais. « Dix brebis ont été attaquées, quatre sont mortes sur le coup et nous avons dû en piquer trois… Les autres sont blessées, l'une d'elles est très mal embarquée », déplore Félicien Saunois, propriétaire des animaux avec sa compagne Alexia Chevallier. Ce jeune homme de 25 ans domicilié à Marcenay, près de Laignes, est d'autant plus dépité que sa troupe venait de prendre forme : « nous avons monté notre micro-entreprise il y a quelques mois seulement. Le loup, j'y pensais tout le temps, mais je n'imaginais pas y avoir droit aussi tôt… Nous n'avons même pas eu le temps de faire un deuxième agnelage digne de ce nom… ».

Un projet 100 % ovin

L'activité de Félicien Saunois et Alexia Chevallier est intégralement basée sur les moutons. Félicien est l'un des trois tondeurs professionnels que compte la Côte-d'Or. Fils d'éleveur ovin, il venait de monter sa propre troupe avec plusieurs races élevées en plein air. Alexia, elle, a créé la marque O'farm'iente pour transformer la laine. La jeune femme de 23 ans s'est aussitôt confiée sur les réseaux sociaux : « Dans notre conte de fées à nous, il n’y avait pas de grand méchant loup… Un bout du rêve s’est éteint ce matin. Élevées d’abord pour leur rusticité, puis pour leur laine et leurs agneaux. Une volonté de maîtriser de A à Z, de mener une agriculture moderne, respectueuse de la nature. Tout était échographié plein, nous rêvions du printemps et des petits agneaux noirs dans le pré. Nos économies de jeunes apprentis agricoles, nos nuits à se réveiller, nos deux dernières années sans partir en vacances, voici l’aboutissement de nos sacrifices ». Alexia Chevallier devait intégrer la ferme-auberge de Flavigny au printemps, pour mettre à disposition et cuisiner de la viande ovine à la clientèle. « Il est certain que ce projet est remis en question, et même tout le reste », redoute son compagnon, « tout s'est vraiment écroulé il y a quelques jours… Nous n'imaginons même pas les pertes indirectes que nous allons avoir avec cette attaque et tout le stress engendré chez les brebis. En plus des animaux morts, il pourrait y avoir beaucoup d'avortements, un manque de lait et des problèmes de toute sorte… ».

« N'importe quoi »

Félicien Saunois en veut aujourd'hui à « un peu tout le monde » : « il est incroyable que ceux qui nous gouvernent cautionnent cela. Faut-il encore le répéter ? Le loup n'est pas compatible avec nos élevages. Nos ancêtres avaient éradiqué ce prédateur, il y avait bien une raison. Quand il n'y aura plus d'éleveurs sur notre territoire, il sera trop tard pour agir. Les protections contre le loup ? Cela n'est possible qu'à petite échelle, donc c'est impossible chez nous ! J'ai un lot de moutons à Marcenay et j'ai joué le jeu en faisant un parc de nuit avec un filet électrique d'1,20 m de haut. Si le loup prend un peu d'élan, il franchit cet obstacle très facilement, en rigolant… C'est n'importe quoi. Les agents de l'OFB m'ont parlé des Patous, mais c'est hors de question. Des gens viennent voir assez régulièrement nos moutons, ils pourraient se faire attaquer à leur tour avec ce genre de chiens. Cela créerait bien d'autres problèmes ». Félicien Saunois en veut également à l'OFB : « à part l'un des deux agents présents pour la constatation, les autres nous prennent de haut et nous disent qu'il n'y a pas de meute en Côte-d'Or. Je n'y crois pas. Le loup responsable de cette attaque n'a qu'un an ou deux selon l'OFB, il ne vient donc pas de très loin… Et que penser des pro loups : je leur ai envoyé beaucoup de photos du sinistre et je n'ai pas eu la moindre réponse. C'était silence radio cette fois. Et personne n'est venu m'aider à monter les filets électriques… Cette situation est vraiment très compliquée. Tant que rien ne sera fait, nous n'aurons que nos yeux pour pleurer. C'est un énorme gâchis ». L'autorisation de tir n'était pas à l'ordre du jour au lendemain de l'attaque, ajoute Félicien Saunois : « nous étions encore en 2024 et la venue des louvetiers n'était plus possible ! En effet, leur quota de tirs était atteint pour l'année en cours, sachant qu'aucun loup n'a été tué en 2024 en Côte-d'Or ! ».

2e photo
L'empreinte laissée par le loup.