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La coopérative La Chanvrière, dans l'Aube, inaugure un nouveau site industriel

Emeline Durand
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À Saint-Lyé, près de Troyes, le site agro-industriel de la coopérative La Chanvrière, qui a doublé ses capacités de production en cinq ans, vient d’être inauguré. Un évènement à la hauteur d’une culture résiliente, vertueuse et qui n’a pas dit son dernier mot puisque la coopérative recherche de nouveaux producteurs, notamment dans l’Yonne.

La coopérative La Chanvrière, dans l'Aube, inaugure un nouveau site industriel
Le déploiement du chanvre, porté depuis un demi-siècle par La Chanvrière ne doit rien au hasard dans l’Aube. « Il est le résultat de la volonté d’agriculteurs qui voulaient valoriser au mieux leurs productions dans une approche audacieuse et visionnaire », souligne le président de la coopérative, Benoît Savourat (deuxième à gauche) en compagnie de Thierry Breton et François Baroin, le maire de Troyes.

« Quand on voit tout ce qu’il peut devenir, sans produits phytosanitaires, sans eau, on se demande pourquoi on ne fait pas plus de chanvre ? » Ces mots prononcés par Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, ancien ministre et chef de grandes entreprises françaises, ont pris tout leur sens le 11 septembre au moment de l’inauguration du site de La Chanvrière à Saint-Lyé. C’est que la coopérative d’agriculteurs – qui a fêté cette année son cinquantième anniversaire - a atteint une taille critique qui la propulse désormais dans le monde des grands. « Ici, nous produisons 100 000 tonnes par an, 50 % du chanvre français, 20 % du chanvre européen. Vous êtes sur le site de transformation de chanvre le plus important au monde, indique Benoît Savourat, président de La Chanvrière. Nous avons multiplié par deux nos surfaces en cinq ans, et ce n’est pas fini », prévient l’élu. La structure est en effet en recherche de nouvelles surfaces de cultures, notamment dans le département voisin de l’Yonne (voir encadré).

« Comme le cochon »

La coopérative, portée par 700 producteurs, ambitionne de passer de 11 500 hectares à 20 000 dans les années à venir. Un développement exponentiel qui dépasse les espérances. C’est que le chanvre, porté par une prise de conscience environnementale, se développe dans de multiples secteurs d’activité. Bien connu dans la papeterie ou le textile, il figure désormais en bonne place dans le marché des composites, dans l’industrie automobile à la place de la fibre de verre, dans le BTP pour l’isolation thermique, mais aussi dans l’agroalimentaire animal et même humaine, avec la graine, riche en nutriments et en protéines. Des applications multiples, en constante évolution pour une culture vertueuse : « le chanvre c’est comme le cochon, résumait Benoît Savourat, on ne jette rien ». Une plante cultivée sans produit phytosanitaire ni eau, qui tient son rôle de tête d’assolement, une transformation mécanique, une plante résiliente, qui résiste aux à-coups climatiques et apporte sa pierre dans la capture du carbone… Que demander de plus ? Saluant l’« extraordinaire capacité du chanvre qui absorbe 15 tonnes de CO2, soit l’équivalent d’un hectare boisé », dont il découvrait les multiples qualités, Thierry Breton a remercié les 700 agriculteurs qui ont développé « un petit miracle de la bioéconomie » dans une région Grand Est qui accompagne l’émergence et la mise en lumière de toute cette filière. « Vous pouvez compter sur moi, depuis Bruxelles, pour accompagner vos projets. Quand il n’y a qu’un endroit au monde où on fait les choses aussi bien, on ne peut pas ne pas l’accompagner », a poursuivi le commissaire européen chargé du marché intérieur et de la politique industrielle.

« Approche audacieuse et visionnaire »

D’autant que le déploiement du chanvre, porté depuis un demi-siècle par La Chanvrière ne doit rien au hasard dans l’Aube. « Il est le résultat de la volonté d’agriculteurs qui voulaient valoriser au mieux leurs productions dans une approche audacieuse et visionnaire » recadre Benoît Savourat. Cinquante ans plus tard, cette ténacité, essentielle au maintien de la production agricole sur le territoire et plus largement, le développement économique, porte ses fruits : 700 coopérateurs, une cinquantaine de salariés, 2M d’euros investis dans une nouvelle ligne de conditionnement pour en doubler les capacités, de nouveaux bâtiments et silos de stockage de paille et de chènevotte en construction pour 2024… Nul doute que La Chanvrière et plus largement le Pôle européen du Chanvre qui œuvre à la mise en place d’un écosystème dans la région, va continuer à dérouler le fil.

Cherche nouveaux producteurs

La Chanvrière n’en finit pas de chercher de nouvelles surfaces de chanvre. Elle souhaite passer de 11 500 à 13 000 hectares dès l’an prochain et recherche donc de nouveaux producteurs, dans un rayon de 120 km autour du site de Saint-Lyé dans l’Aube, la Marne, l’Yonne ou encore la Seine-et-Marne. Avec des perspectives encourageantes : « beaucoup de producteurs de fécule nous rejoignent avec la fermeture du site d’Haussimont » (annoncée par Tereos fin août, ndlr), observe Benoît Savourat qui invite aussi les actuels coopérateurs de La Chanvrière à engager des hectares supplémentaires.