Gouvernement
Marc Fesneau, nouveau ministre de l'Agriculture

Mathieu Robert
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Marc Fesneau est devenu ministre de l’Agriculture sous la présidence d’Emmanuel Macron. Ancien député Modem, élu rural de la Beauce, ancien cadre de Chambre d’agriculture, sa nomination est perçue comme une promesse de continuité et d’ « ambition maintenue » pour l’agriculture par les professionnels du syndicalisme majoritaire.

Marc Fesneau, nouveau ministre de l'Agriculture
Lors de la passation de pouvoir entre Marc Fesneau (à droite) et Julien Denormandie (Crédit Réussir)

Cela fait quelques années que son nom circulait dans le landerneau agricole, mais il avait été à chaque fois devancé, par Stéphane Travert, Didier Guillaume, puis Julien Denormandie. C’est cette fois chose faite. Marc Fesneau a été nommé Rue de Varenne, avec un intitulé de poste légèrement modifié : ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire. Ancien président du groupe Modem à l’Assemblée nationale, il était depuis 2018 ministre en charge des Relations avec le Parlement. Il remplace Julien Denormandie, dont le nom n’est pas apparu dans le nouveau gouvernement, à la surprise générale. Attendu à Matignon ou au secrétariat général de l’Élysée, il a finalement annoncé, sur Twitter, sa « décision personnelle et importante pour [lui], mûrie de longue date : celle de pouvoir enfin consacrer plus de temps à [sa] famille ». Et d’ajouter : « C’est le choix du cœur : j’ai trop manqué à ma famille, et elle m’a trop manqué. C’est désormais à elle que je veux consacrer l’essentiel de mon énergie ».

Un parcours et des attaches

Comme Julien Denormandie, Marc Fesneau est un bon connaisseur du secteur agricole, pour avoir travaillé plusieurs années à la Chambre d’agriculture du Loir-et-Cher. En 2002, il en était directeur du service chargé des politiques de développement local. Il a également des attaches familiales dans le secteur ; son père François Fesneau fut conseiller technique du cabinet de Michel Rocard, lorsque ce dernier était ministre de l’Agriculture (1983-1985), mais aussi directeur général de l’Association française des comités économiques de fruits et légumes (Afcofel) – et président du conseil d’administration d’Agra. Pour les professionnels agricoles, l’arrivée de Marc Fesneau est le signe d’une volonté de continuité, notamment par son projet technique et proche du secteur agricole. Sa nomination est le « signe d’une ambition agricole maintenue », confie à Agra presse le président des Chambres d’agriculture France Sébastien Windsor, pour qui Marc Fesneau est un connaisseur des « enjeux techniques » de l’agriculture. Le président de la Coopération agricole, Dominique Chargé, se dit lui « satisfait » de la nomination de Marc Fesneau qu’il « apprécie et qui connaît bien les sujets d’agriculture et d’alimentation ». Le nouveau ministre est par ailleurs un défenseur de la chasse, qu’il pratique ; en 2018, il a cosigné une tribune de défense de la chasse à courre. C’est lui qu’Emmanuel Macron avait envoyé au dernier congrès de la FNC au printemps pour y présenter son programme. Il proposa notamment une réforme du dispositif des dégâts de gibier, ou « un accès plus rapide au permis de chasse ».

Défenseur de la ruralité

« Très satisfait » de sa nomination, le président de la fédération de chasse du Loir-et-Cher Hubert-Louis Vuitton revendique des « contacts amicaux » avec lui : « il pourra être un pont entre les chasseurs et l’agriculture. Nous pourrons compter sur lui », prédit-il. De ce fait, la nomination de Marc Fesneau ne devrait pas plaire aux vegans et aux antispécistes. Ses déclarations passées ne les rassureront pas. Dans un portrait dressé par le journal Challenges pour les élections régionales 2020, Marc Fesneau disait vouloir mener un combat contre « les végans et les antispécistes, ceux qui comparent les élevages de poulets à des camps de concentration SS. Ce sont des fous dangereux qui ont perdu le sens commun ». Il est un élu rural, et défenseur affirmé de la ruralité. Après avoir grandi à Paris, il s’est installé à Marchenoir, commune de quelque 600 habitants de la Beauce, entre Vendôme et Orléans, dont sa famille est originaire. Élu conseiller régional du Centre en 2004, maire de Marchenoir en 2008, et tête de liste du MoDem pour les régionales de 2010, il est promu la même année secrétaire général du parti. « Il a gardé un ancrage local. Il continue de venir chasser, même si c’est moins souvent », assure Hubert-Louis Vuitton. « Il est resté très proche des gens et de la ruralité », abonde Didier Delerue, président de la FDSEA du Loir-et-Cher, interrogé par Agra presse. Marc Fesneau est aussi un homme réputé influent à l’Assemblée, ce qui lui a valu d’être nommé ministre des Relations avec le Parlement.

Un premier déplacement dans le Cher

Élu député en juin 2017 avec le soutien d’En Marche, il était devenu président du groupe MoDem à l’Assemblée. Sa popularité s’était étendue chez les « marcheurs », analyse l’AFP : en 2018, il récoltait 86 voix lors de l’élection du président de l’Assemblée nationale, bien au-delà de celles des 46 députés MoDem, face à Richard Ferrand (LREM). Sa personnalité reste peu connue du grand public. « Il a de la finesse politique et sait aplanir les conflits », salue le député Jean-Louis Bourlanges, interrogé par l’AFP quand son collègue Erwan Balanant estime « difficile de lui trouver des défauts ». Un élu d’opposition juge ce bon vivant « assez sympathique » mais allant « un peu au gré du vent ». Localement, Didier Delerue le perçoit comme quelqu’un « qui n’a pas pris la grosse tête » et qui « n’hésitait pas à passer un coup de fil quand il voulait comprendre un dossier ». C’est non loin de ses terres qu’il a effectué son premier déplacement de ministre de l’Agriculture, dans le Cher, touché par la sécheresse printanière. Il y a expliqué que la « question de la souveraineté alimentaire » n’était pas résolue, dans la lignée de son prédécesseur. Évoquant la guerre en Ukraine, Marc Fesneau a souligné que cette crise vient « rappeler qu’on a besoin de produire. La question quantitative n’est pas une question qui est derrière nous. La question de se nourrir n’est jamais une question derrière soi et les dérèglements climatiques viennent poser des questions quantitatives qui ne sont pas des petites questions », a-t-il estimé. « Ce n’est pas chez nous que le problème va se poser là, mais parlons aux Égyptiens, à l’Algérie, à la Tunisie », qui peuvent se poser la question « de savoir s’ils vont pouvoir se nourrir », a-t-il ajouté, rappelant la nécessité d'« assurer la production et en même temps d’œuvrer en direction de l’environnement ». Des déclarations qui collent, pour l’instant, avec la promesse de continuité que laissait présager son profil.