Assemblée générale de la FDSEA 58
Panorama des enjeux

Chloé Monget
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Le 23 avril, la FDSEA 58 tenait son assemblée générale à Moulins-Engilbert, avec deux tables rondes : la prédation lupine et l'Europe.

Panorama des enjeux
La FDSEA 58 avait prévu deux tables rondes pour animer son assemblée générale : la prédation lupine et l'Europe.

Pour cette 78e assemblée générale de la FDSEA 58, c’est à Moulins-Engilbert le 23 avril que le rendez-vous fut donné aux adhérents. Après l’assemblée ordinaire à huis clos en début d’après-midi, deux tables rondes ouvertes au public étaient organisées avec un focus sur la prédation lupine et un autre sur « l’Europe et nous ». Pour discuter respectivement de ces sujets, Claude Fond, secrétaire général à la Fédération nationale ovine, et Dominique Fayel, administrateur à la FNSEA étaient conviés tout spécialement.

Prédation lupine

Olivier Laporte, vice-président de la FDSEA 58 et chargé du dossier de la prédation, a lancé les débats en insistant : « c’est un problème que nous apprenons à connaître au fur et à mesure des attaques. Nous essayons d’être là pour les éleveurs car le traumatisme en découlant est profond que ce soit professionnellement ou personnellement ; c’est une morsure invisible » et ajoute : « En 2023, dans la Nièvre, nous avons eu 32 attaques et 11 constats n’excluant pas la responsabilité du loup. Beaucoup d’éleveurs sont donc déçus par les conclusions et surtout, dans certains cas, la cause de la mort est indéterminée ; laissant les exploitants sans réponse ». Après son intervention, Claude Fond martèle : « nous sommes rattrapés par la réglementation qui fait du loup une espèce strictement protégée, ce qui complique nos stratégies de défense ». Après avoir rappelé les différents zonages et les éléments de défenses permis par ceux-ci, il pointe le statut de « non protégeabilité » comme un outil à mettre en place. Sur ce point, Cyrielle Franchi, sous-préfète de Clamecy et référente loup, annonce : « ce statut peut être accordé, mais il est nécessaire de faire des diagnostics d’exploitations. Nous sommes d’ailleurs en train de travailler le sujet avec la Chambre d’agriculture de la Nièvre et la FDSEA 58 ». Cela reste une reconnaissance de « non protégeabilité partielle » : l’éleveur doit protéger une partie de son troupeau avec les aides qui lui sont accordées. Puis, les évolutions du nouveau Plan National d’Actions (PNA – 1) 2024-2029 ont été abordées. Claude Fond estime qu’il contient de grandes avancées, à l’image de la possibilité de poster deux ou trois tireurs par lot (dans le cadre d’un arrêté préfectoral autorisant le tir de défense simple) avec la possibilité d’intervention des louvetiers en vision nocturne. Cyrielle Franchi remémore à l’assemblée : « Pour toutes les autorisations de tir, nous sommes dans le cadre d’une protection et en aucun cas dans le contexte de régulation ou de chasse. L’État met en place des dispositifs pour aider les éleveurs à se protéger (mise à disposition de filets notamment), et prendra les arrêtés le cas échéant, si une protection préalable a été positionnée ». Pour l’avenir, Claude Fond espère que : « la perte génétique sera incluse dans les aides indirectes du PNA, car c’est un point essentiel à prendre en compte » et d’exposer, pour conclure : « Dans certains territoires, l’agriculture et plus spécifiquement l’élevage est la seule activité économique restante. Maintenir l’élevage, c’est maintenir la vie dans ces secteurs… Et pour le moment, dans quelques cas, la prédation met en péril cette activité ». Cyrielle Franchi assure enfin : « l’État essaye de vous donner les outils permettant la coexistance avec le loup, même si nous comprenons tout à fait les problématiques que cela engendre ». Pour terminer, l’importance d’identifier rapidement des détenteurs de permis de chasse valides a été mise en évidence comme un des points à travailler pour accélérer la mise en action des arrêtés préfectoraux pour les tirs de défense. Même si le sujet de la prédation lupine a une résonance de plus en plus locale dans la Nièvre, Jean-Luc Leroy, directeur de la Safer et animant les deux tables rondes, a rappelé que ce dossier était régi, comme d’autres, par l’Union Européenne ; lien tout naturel pour aborder « l’Europe et nous », autre thème de débats choisi par la FDSEA 58 pour son assemblée générale.

Une Europe à revoir

Pour dépeindre l’influence de l’Europe dans divers dossiers, aux répercussions locales, Stéphane Aurousseau, membre de la FDSEA 58 et de la FNSEA, fut invité à revenir sur les manifestations du début d’année : « Ce fut exceptionnel avec une mobilisation commune et massive des exploitants de nombreux pays européens » souligne-t-il et poursuit : « cela étant, pour chaque pays, les revendications n’étaient pas identiques puisque les problématiques ne sont pas similaires ». Pour la France, il cite les quatre axes principaux de revendications : « un revenu juste, un retour de la dignité, des normes allégées et le renouvellement des générations – avec des aides à l’installation revues ». Ensuite, Dominique Fayel pris la parole sur la question des avancées obtenues : « il y a une prise de conscience des représentants européens de l’incohérence de certaines réglementations. Si cela peut paraître évident pour nous exploitants, pour eux, cela ne l’est pas toujours car ils ont placé l’environnement avant tous les autres intérêts. L’actualité, avec les manifestations et la guerre en Ukraine, entre autres, a permis de leur remettre les pieds sur terre. Le climat et la protection de l’environnement sont des buts louables mais ne peuvent pas se poursuivre en éludant la sécurité, la défense, la souveraineté alimentaire ou industrielle… La politique agricole de l’Europe doit être revue de manière pratique, logique et rapide. Cela doit ensuite se décliner au niveau national. Vous avez d’ailleurs un rôle à jouer pour les élections européennes. Si vous n’allez pas à la source de la décision politique, vous n’aurez aucune chance de changer la déclinaison technique de cette dite politique ». Ainsi, Stéphane Aurousseau retrace l’importance d’un traitement uniforme et égal pour l’avenir : « Nous avons des cahiers des charges différents, et certains accords passés au niveau européen sont clairement de la concurrence déloyale. Nous sommes prêts à accepter toutes les règles que l’on nous impose, mais faut-il qu’elles soient les mêmes pour tout le monde ! ». Toujours dans la veine d’un avenir à trouver, Simon Gauche, président des JA 58 et secrétaire des JA BFC, pointe le traitement des dossiers en matière de PCAE et DJA : « il y a un gros problème. Certains sont encore en attente de paiement, rendant la survie des exploitations de plus en plus difficile. Comment donner envie aux jeunes de se lancer dans cette voie professionnelle, lorsque les aides tardent – ce n’est rien de le dire – à arriver et que les revenus sont sabotés par des lois non appliquées (Égalim, loi résilience et climat, etc.) ou des accords ahurissants avec des pays hors de l’UE pour certaines productions ? ». Emmanuel Bernard conclut les deux tables rondes : « la FDSEA 58 a toujours et suivra toujours les grands principes de la responsabilité, de l’action et de la proposition ; pans indispensables à la construction de notre avenir. Nous voulons simplement vivre dignement de notre métier que l’on soit en conventionnel ou en bio, et cela doit être respecté. Le projet de loi d’orientation agricole doit remettre l’agriculture au centre des intérêts et au même niveau que l’environnement. Pour toutes les questions qui nous animent aujourd’hui, je pense qu’il faut garder à l’esprit une seule chose : l’agriculture est notre futur ». L’assemblée générale de la FDSEA 58 s’est clôturée dans la soirée par un verre de l’amitié.

1. https://biodiversite.gouv.fr/projet-pna/wp-content/uploads/PNA-Loup.pdf