Emploi
Livre sur le recrutement et le management en agriculture

Berty Robert
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Améliorer le recrutement et le management fait partie des notions de base dans le monde de l’entreprise… mais rarement en agriculture. L’ouvrage coécrit par Émilie Callot et Yves Le Guay ambitionne de combler ce manque, avec pertinence, humour, et le souci de rester accessible.

Livre sur le recrutement et le management en agriculture
Yves Le Guay est convaincu de la nécessité de faire progresser le management et la qualité des recrutements en agriculture.

Être employeur agricole est une compétence technique, au même titre que celles mises en avant dans la conduite d’une culture ou d’un élevage. Pourtant, elle n’est jamais mise en avant. Les choses vont peut-être changer avec le livre Recruter et manager sereinement des salariés agricoles (1). Publié début octobre, il résulte d’un travail mené par Émilie Callot et Yves Le Guay, à l’initiative de ce dernier. Émilie Callot est coach professionnelle. Basée en Côte-d’Or, elle intervient partout en France, en majorité sur des problématiques du monde agricole. Par le passé, cette juriste de formation a œuvré en appui technique pour les juristes de la FDSEA 21. Yves Le Guay est consultant formateur en relations humaines depuis vingt ans. Installé à Lyon, il a des racines familiales et agricoles en Saône-et-Loire et est ingénieur agronome de formation. C’est lui qui a proposé à Émilie Callot de travailler à la réalisation d’un ouvrage pratique consacré au recrutement et au management de salariés agricoles.

Pratique sans être rébarbatif

De fait, dans ce domaine, l’agriculture était jusqu’alors une zone laissée « en jachère ». « On s’adresse trop peu aux agriculteurs dans leur fonction d’employeur, déplore Yves Le Guay. Très peu sont formés à exercer la fonction. Parfois, ils l’exercent avec maladresse, pas délibérément, mais par manque de formation. Il y avait un besoin à combler et c’est pourquoi nous avons voulu faire ce livre à leur intention ». En participant au projet, Émilie Callot ne souhaitait pas faire un ouvrage juridique rébarbatif mais plutôt quelque chose de pratique en apportant des éléments de réflexion un peu décalés, avec un côté ludique assumé. L’ouvrage, organisé en dix chapitres, qui sont autant de clés de progression dans le management et le recrutement, est jalonné de quiz, de dessins humoristiques dus à Didier Marandin, et d’exemples de situations qui peuvent être vécues par les lecteurs. L’humour se mesure notamment, page 41, par cette « Recette pour démotiver efficacement les salariés », qui liste toutes les erreurs à commettre si l’on veut obtenir ce brillant résultat… L’ouvrage est facile à parcourir et permet de se poser les bonnes questions. « Plutôt que des réponses, explique Émilie Callot, nous avons voulu apporter des axes de réflexion ». « Nous n’avons pas inventé une théorie du management, ajoute Yves Le Guay, mais utilisé des concepts qui existent déjà et que l’on met à la portée des agriculteurs en utilisant des exemples adaptés à leur activité. Nous voulons aider à devenir manager de manière plus professionnelle, afin que chacun – employeur et salarié — se sente à sa place et soit serein et vigilant dans sa fonction ».

Des expériences précieuses

L’ouvrage est nourri des expériences de ses coauteurs. Émilie Callot a eu, par le passé, à assumer des fonctions de gestion des ressources humaines : elle s’est confrontée aux recrutements, aux plans de formation, à l’intégration de nouveaux collaborateurs. Lorsqu’elle travaillait pour la FNSEA en Bourgogne, elle avait pour mission d’animer le dialogue social avec les partenaires, sur le plan local. Elle devait aussi coordonner des projets sur l’emploi et la formation. « J’ai fait ça pendant dix ans et j’ai adoré cette fonction » précise-t-elle. Elle a aussi œuvré dans le champ de la médiation professionnelle : « En 2013, j’ai monté un projet pilote avec la FNSEA auprès d’exploitants agricoles, qui concernait les relations entre employeurs agricoles et salariés, et celles entre associés d’une structure agricole. J’ai constaté qu’il existait peu d’outils pour aider à la gestion du projet humain qu’un recrutement ou une association entre agriculteurs peut représenter. Cela conduisait à négliger un aspect important et menait parfois à des situations de rupture ». Aujourd’hui, elle intervient souvent auprès d’exploitants dans le cadre de démarches portées par des Organisations professionnelles agricoles (OPA). Elle mène aussi des formations sur la qualité relationnelle au travail entre employeurs et salariés et forme des conciliateurs de Gaec. « Dans le livre, ajoute-t-elle, on s’adresse à des gens qui sont eux-mêmes le premier ouvrier de leur exploitation, mais aussi le directeur administratif et financier, le directeur des ressources humaines… On n’entend jamais parler du monde agricole comme d’un univers où il faut manager, où on ne recrute pas par défaut. Parfois, les exploitants agricoles ont du mal à se percevoir comme employeurs. Mais, même s’ils n’ont qu’un apprenti, ou des saisonniers, ils sont chef d’entreprise, et donc, employeur à part entière. Il y a un vrai besoin de compétences en agriculture. L’emploi, dans ce domaine, dépoussière son image et on comprend qu’on peut maintenant penser à des évolutions de carrière dans ce domaine ».

Penser l’évolution des carrières

Aider à structurer une gestion des ressources humaines et à mettre en place une stratégie managériale peut d’ailleurs intéresser des services de remplacement ou des groupements d’employeurs agricoles. Émilie Callot doit assurer une formation dans ce cadre, avec l’Ifocap, en début d’année 2023. En conclusion Yves Le Guay apporte le constat suivant : « Les agriculteurs employeurs doivent progresser : ils se plaignent de ne pas trouver de salariés compétents et suffisamment engagés, les salariés se plaignent du traitement que leur infligent parfois les employeurs. Il y a sûrement beaucoup de progrès à faire et si nous pouvons y contribuer, j’en serais heureux ».

(1) Recruter et manager sereinement des salariés agricoles. Éditions France Agricole, Collection « 10 clés », 262 pages.