Grêle
Le ciel leur est tombé sur la tête

AG
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Un orage a dévasté plusieurs exploitations agricoles et de nombreuses habitations autour de Liernais.

 

Le ciel leur est tombé sur la tête
Jean-Pierre Fleury n'avait bien sûr jamais vu ça, à Saint-Martin-de-la-Mer.

Mardi 21 juin, à 21 heures dans le 21 : certains étaient tranquillement posés à la fête de la musique, d'autres regardaient peut-être la finale de Koh Lanta sur TF1. À Liernais, rien de tout ça. L'ambiance était tout autre. Un nuage « très particulier » est soudainement arrivé, sans prévenir. « Il avait une couleur rougeâtre, on aurait cru qu'il était en feu », raconte Jean-Pierre Fleury, présent sur l'exploitation familiale à Saint-Martin-de-la-Mer. Un premier grêlon est tombé, puis deux, puis trois... Ce compte-goutte n'a pas duré bien longtemps, celui-ci a rapidement pris fin pour laisser place au déluge. « Sans la moindre pluie », précise le Côte-d'orien, qui témoigne de la violence extrême de ce phénomène dans une vidéo postée sur la page Facebook de Terres de Bourgogne, au lendemain du sinistre. « Nous avons vu les velux s'effondrer, il pleuvait dans la maison, des grêlons comme le poing descendaient même les escaliers. Pendant près de quarante minutes, nous aurions cru à la fin du monde, il y avait énormément de bruit, les rafales de vent devaient atteindre les 100 km/h ... », partage Jean-Pierre Fleury, qui a accepté ce reportage pour être le relais médiatique de tous les sinistrés de son secteur : « je m'adresse bien entendu au nom de tous les agriculteurs et tous les particuliers touchés par cet énorme orage. Les dégâts sont colossaux. La zone impactée part d'Alligny-en-Morvan pour aller bien au-delà de Liernais, je pense que la coulée s'étend sur 25 km de long, sur une largeur de 3 à 5 km ».

Bâcher au plus vite

Rencontré le lendemain matin du sinistre, Jean-Pierre Fleury était forcément indigné devant l'ampleur des dégâts, avec des toitures entièrement endommagées. Les panneaux photovoltaïques étaient pulvérisés. « La priorité du moment est de bâcher au plus vite pour pouvoir sécuriser ce qui peut l'être avant le retour de nouveaux orages. C'est une course contre la montre », s'impatientait l'homme de 68 ans, en faisant allusion aux maisons d'habitation mais aussi aux stockages de fourrages et de céréales. Recontacté en ce début de semaine, Jean-Pierre Fleury tenait à remercier infiniment tous les amis de Sylvain (son fils) venus spontanément l'aider avec des télescopiques, des remorques et des bâches plusieurs pendant jours pour mettre hors d'eau les douze toitures touchées et refaire le bâchage des trois silos. Terres de Bourgogne communiquera de nouveau sur cet événement et sur les suites données à celui-ci dans ses prochaines éditions.

« Totalement impuissants »
Matthieu Beurton, ici à droite avec Mathis, son stagiaire, fait partie des agriculteurs les plus sinistrés à Liernais.

« Totalement impuissants »

De « drôles » de nuages étaient en train arriver : Matthieu Beurton, agriculteur à Liernais, s'est vite réfugié à l'intérieur de sa maison avec sa compagne et leurs trois enfants. Les dégâts après le déluge sont énormes : « Tout est par terre ou presque... Les toitures de tous nos bâtiments sont HS, il y en a une douzaine, y compris la maison de mes parents et un corps de ferme que nous étions en train de rénover en gîte. Que ce soit des tuiles, de l'ardoise ou du fibrociment, tout y est passé. Seuls les vieux hangars en tôle ondulée ont un peu mieux résisté. Il pleuvait dans la maison, il y avait beaucoup de bruit, mes trois filles sont encore choquées. À l'heure où je vous parle, je n'ai pas encore terminé le tour de mes prés, un veau est déjà mort et le bilan pourrait ne pas s'arrêter là. Je n'ai pas encore vu toutes mes cultures mais cela ne sent pas bon... À mon avis, l'orge et le blé vont y rester. C'est vraiment un grand sentiment d'impuissance face à un tel phénomène ». L'homme de 39 ans a désormais les yeux rivés sur les assurances : « j'espère qu'elles vont jouer le jeu. Les toitures, il y en a qui ont 5, 15, 20 ans.... Il va y avoir de la vétusté : on va y laisser des plumes, comme pour les différentes récoles. Les démarches administratives vont commencer et ça aussi, je m'en serais bien passer. Je recherche un salarié depuis un petit moment car j'ai du travail par-dessus la tête : il va m'être très difficile de consacrer des heures et des heures sur le téléphone et l'ordinateur ». L'agriculteur de Liernais analyse ce phénomène directement lié, selon lui, au dérèglement climatique : « de la grêle, nous avons déjà eue mais jamais comme ça. De tels aléas se multiplient, ce n'est pas un hasard selon moi. Sans vouloir être plus écolo que les autres, je pense que nous sommes tous responsables de ce qui arrive. Je voudrais que cela serve de leçon : non pas pour Liernais mais pour l'ensemble de l'Humanité. Nous sommes à mon avis trop nombreux et nous consommons bien de trop. Je ne sais pas quel monde nous allons laisser à nos enfants. Aujourd'hui, après ce qui vient de se passer, l'essentiel est d'être en bonne santé ».

 

Réactions

Fabrice Genin, président de la FDSEA21 : « Nous apportons bien évidemment tout notre soutien aux sinistrés. Compte-tenu de l'ampleur des dégâts, je ne doute pas un seul instant que l'état de catastrophe naturel sera reconnu, et très rapidement. Si les démarches n'avancent pas assez vite, nous saurons mettre la pression auprès de nos responsables politiques. L'esprit de solidarité est encore plus le bienvenu dans ce type d'évènement, la FDSEA répondra à toute demande des agriculteurs en cas de besoin ».

Jérôme Cap, président de la commission bovins viande de la FDSEA : « Quel désastre... La FDSEA se joint aux côtés des exploitants agricoles dans ce moment difficile. Se retrouver sous tel orage n'est à souhaiter à personne. Notre réseau se tient à la disposition des sinistrés pour les aider à colmater leurs toitures, en attendant la réparation de celles-ci. Il y a beaucoup de dégâts en ce moment en France, les assureurs doivent avoir la tête sous l'eau, mais nous saurons mettre la pression en cas de besoin : cet événement côte-d'orien doit être une priorité dans le traitement des dossiers ».

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