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Viticulture

Visite préfectorale en terre chablisienne

Après la profession agricole le 30 août dernier, le préfet Latron est allé à la rencontre des vignerons du chablisien, en se rendant sur le Domaine Seguinot-Bordet, à Maligny.
Par Dominique Bernerd
Visite préfectorale en terre chablisienne
Une table ronde pour évoquer les grands sujets du vignoble chablisien.
Le nouveau préfet de l’Yonne, Patrice Latron, multiplie les visites sur le terrain pour prendre le pouls du département. Après Daniel Simonnet, exploitant céréalier à Noyers-sur-Serein, c’est chez Jean-François Bordet, viticulteur à Maligny, qu’il s’est rendu ce mercredi, pour une première découverte du vignoble chablisien. Un vignoble dont l’une des particularités, comme l’a rappelé Frédéric Gueguen, président du Syndicat de Défense de l’Appellation Chablis, est d’être particulièrement gélif au printemps : «c’est même dans l’ADN des vignerons chablisiens et c’est ce qui a permis de développer le vignoble. Il faut savoir que dans les années 60, on ne comptait que 800 ha de vignes, contre 5 500 ha aujourd’hui et c’est la découverte de moyens de lutte contre le gel printanier, comme le système d’aspersion, les câbles électriques, les toiles hors gel, qui lui a permis de prendre son essor». La mise en place au printemps dernier d’une quarantaine de diffuseurs à iodures d’argent en amont des vignobles, pour réduire la taille des grêlons, est venue compléter le dispositif : «même si le résultat escompté ne dépasse pas 50% de réussite et que l’on peut continuer à être attaqué par la grêle, on le soupçonne d’être efficace, au vu de plusieurs orages assez violents cette année, avec de fortes précipitations, où seules de grosses gouttes d’eau sont arrivées au sol».

Une Cité des vins à l’horizon 2019
Une autre particularité du vignoble chablisien est d’être à l’origine du système de Volume Complémentaire Individuel (VCI), créé en 2005 et qui permet la mise en réserve d’une partie de la production en cas de rendements excédentaires, à utiliser les années de déficit : «la meilleure des assurances, car cela nous permet de satisfaire et conserver la clientèle en évitant qu’elle se détourne de l’appellation». Une réflexion est menée aujourd’hui au niveau de l’ODG afin de faire passer le rendement butoir autorisant ces réserves à 75 hl par ha (il est aujourd’hui de 70 hl), et d’obtenir une marge de manœuvre plus importante. Seule appellation du BIVB à assurer sa propre communication, Chablis effectue un travail de prospection important pour la renommée de ses vins à travers le monde. Formant notamment plusieurs milliers de personnes chaque année, en partenariat avec des écoles de sommellerie, en réponse à la problématique des «faux chablis» qui s’est développée un temps aux états-Unis. Un sujet majeur, quand on sait que 70% de la production totale, partent à l’export.
Autre sujet évoqué : la Cité des vins devant voir le jour au cœur même de Chablis, à l’horizon 2019. Un lieu à destination du grand public, pour y présenter toute la diversité du vignoble icaunais et qui s’inscrit dans un projet global, avec Beaune et Mâcon. Une convention sera signée en octobre prochain entre les collectivités et la profession, partie prenante du projet, avec une participation à hauteur de 50% de l’enveloppe globale estimée à 2,2 Millions €. Le sujet est d’importance, souligne Louis Moreau, vice-président de la Commission Chablis au BIVB : «nous avons, par rapport au reste de la Bourgogne, l’avantage de la proximité de Paris, avec un cinquième de la population française vivant à moins de 200 kms d’ici. Et ce projet correspond aux attentes du consommateur d’aujourd’hui, plus enclin à venir partager un moment, comprendre le métier et découvrir le territoire».

Eoliennes et méthanisation
Parmi les autres sujets abordés, celui des éoliennes, qui suscitent la colère des viticulteurs du chablisien et du grand auxerrois, de par leur multiplicité : «le vignoble en est cerné, elles poussent comme des champignons... Nous sommes bien conscients qu’il faut effectivement de l’énergie renouvelable, mais trop d’éolien tue l’éolien !» Message entendu par le préfet de l’Yonne, visiblement conquis par les coteaux chablisiens : «c’est un bijou végétal qu’il faut préserver et mon sentiment est qu’il faut parvenir à maîtriser le développement du parc éolien». Rappelant que l’Yonne était particulièrement en pointe sur le sujet, «représentant à lui seul 41% de tout le projet éolien de Bourgogne France-Comté et 30% en terme de pylônes installés». Pour preuve de leur non hostilité aux énergies renouvelables, les viticulteurs ont aussi évoqué le projet de méthanisation porté par la profession. Avec l’objectif de créer du gaz à partir des mouts de raisins chablisiens, pour le revendre ensuite au fournisseur historique. Les digestats étant récupérés pour servir d’engrais dans les vignes. Un projet entrant parfaitement dans le cadre des circuits courts et la preuve, rajoute Louis Moreau, «que si on ne veut pas d’éolien, on veut montrer que nous aussi, on fait de l’écologie !»