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Environnement

Une charte pour l’avenir

Régulièrement pointé du doigt pour la médiocre qualité de sa ressource en eau potable, le département de l’Yonne vient de se doter d’une charte qui s’est fixée pour objectif d’en améliorer les résultats, cosignée par un grand nombre d’acteurs locaux engagés dans la démarche
Par Dominique Bernerd
Une charte pour l’avenir
Les présidents respectifs de la Chambre d’agriculture de l’Yonne et de Dijon Céréales : Etienne Henriot et Marc Patriat
L’évènement est d’importance et le nombre de signataires de cette charte départementale pour la reconquête de la ressource en eau potable suffit à en témoigner, avec pas moins de 29 paraphes apposés en bas du document. Tous réunis désormais, au sein d’un Comité Départemental de l’Eau, qui s’est fixé pour objectif la mise en œuvre de véritables projets de territoire prenant en considération les enjeux socio-économiques locaux, autour de la question cruciale de la qualité des eaux, véritable bien public. Pilotée par le Préfet de l’Yonne, cette charte a été élaborée par les services de l’État, en partenariat avec la Chambre d’agriculture, l’Agence de l’Eau et l’Agence Régionale de Santé. Un acte d’engagement résultat du fruit de dix mois de travail avec les acteurs locaux, tous cosignataires (voir encadré).
 
Un travail entamé il y a plusieurs années
L’alimentation en eau potable est un enjeu majeur dans le département, qui concentre à lui seul 50% des captages prioritaires de la région Bourgogne en matière de lutte contre les pollutions diffuses. Sur le plan de la santé publique, sur les 281 captages en service, 126 ont été abandonnés pour des problèmes de dépassement de normes en matière de nitrates et de pesticides. Le problème est «historique» et ne date pas d’hier reconnaît le préfet de l’Yonne, Jean-Christophe Moraud : «on paye 70 ans de cultures céréalières, viticoles et arboricoles intensives, héritées du plan Marshall. Cela concerne principalement l’agriculture, mais pas seulement ! Sont visées aussi les pratiques des collectivités locales et des particuliers qui, jusqu’à une date récente, utilisaient assez facilement les pesticides…». Soulignant par ailleurs le travail effectué en amont depuis plusieurs années, par la profession agricole notamment, sur certains bassins d’alimentation de captage prioritaires, autour des programmes d’action mis en œuvre : «depuis la fin de la première décennie des années 2000, un travail de fond a été entamé dans le département, mais, même si l’on constate une amélioration, les résultats ne sont ni probants, ni véritablement durables. Pour autant, le travail mené autour des captages Grenelle, même s’il n’a pas complètement porté ses fruits, nous a au moins fourni un terrain d’études et d’analyses qui nous permet de programmer et proposer aujourd’hui une autre démarche» Avec la menace de voir à l’avenir ces programmes d’action volontaires remplacés, comme la loi l’y autorise, par des mesures d’arrêtés fixant des programmes d’action obligatoires. Mais le contexte actuel est à l’apaisement et la charte signée ce vendredi en atteste : «entre la culture conventionnelle type Plan Marshall, qui est quand même largement derrière nous et la culture bio pour tous, on s’est tous dit qu’il y avait peut-être un modus vivendi à trouver, un peu plus progressif, qui devrait apporter des résultats plus durables…»   

Un objectif à atteindre d’ici 3 ans
Parallèlement est mené un travail de rationalisation de la gouvernance, conséquence de la loi Notre et du Schéma de coopération intercommunal, conduisant d’ici le 1er janvier 2020 au plus tard, au transfert des compétences eau potable et assainissement. Passant ainsi pour la gestion de l’eau, de 49 structures pour 177 communes, à neuf entités sur tout le département, constituées de trois syndicats mixtes, une Communauté d’Agglomération, cinq  Communautés de communes. Améliorant d’autant la maîtrise technique des services et donc de la ressource, quand on sait que certains réseaux aujourd’hui, dits «fuyards», font que 60% de l’eau disparaissent avant même d’être distribués.  
La signature de la charte départementale n’est que la première étape d’une démarche qui sera ensuite déclinée sur les différents bassins d’alimentation de captages prioritaires du département. Avec pour principe, de s’accorder pour chacun, avec l’ensemble des acteurs locaux, sur une gouvernance et un programme d’actions concernant aussi bien les pratiques agricoles que celles des collectivités locales et des particuliers. Une reconquête de la qualité de l’eau qui passera par la mise en place d’indicateurs pour évaluer l’objectif à atteindre. Des indicateurs simples, rappelle le préfet Moraud : «mieux vaut s’accorder sur un certain nombre d’objectifs atteignables et ambitieux, mais qui soient lisibles et compréhensibles par tous, si c’est hyper scientifique, il n’y aura pas d’application possible». S’accordant un délai de trois ans, avant de tirer les conclusions des actions mises en place : «il nous faut raisonner en terme de campagnes et de cycles végétatifs, pour tout ce qui relève de l’agriculture et ce n’est qu’au bout de ces trois années, après toute une série d’objectifs intermédiaires pour vérifier si l’on pèse sur la tendance et commence à l’inverser, qu’un état des lieux sera dressé» Un délai cohérent, selon le président de la Chambre d’agriculture, Étienne Henriot, qui rappelle toute l’importance à mobiliser sur le terrain l’ensemble des acteurs locaux : «lorsque la collectivité est motivée et assure vraiment sa responsabilité d’animateur, ça marche mieux, à l’exemple de ce que l’on connaît aujourd’hui avec le BAC de Lasson, où les maires des communes concernées se sont tous impliqués. En parallèle et cela a déjà été expérimenté, il est important que les agriculteurs se regroupent, fassent leurs propres propositions, dans une démarche portée également par le syndicalisme.»
Il est prévu que le Comité Départemental sur l’eau, sous la présidence du Préfet, se réunisse à minima deux fois par an, pour suivre l’état d’avancement des mesures mises en place.

Les signataires de la charte départementale :

Le Préfet de l’Yonne ; l’Agence Régionale de Santé ; l’Agence de l’Eau Seine Normandie ; la Chambre d’agriculture de l’Yonne ; le Conseil départemental ; le Conseil régional BFC ; l’Association des Maires de l’Yonne ; l’Association des Maires Ruraux de l’Yonne ; l’Association UFC Que choisir ; l’Association Défense de l’Environnement et de la Nature de l’Yonne ; la Commission locale de l’Eau de l’Armançon ; la SAFER de l’Yonne ; l’Institut National de la Recherche Agronomique du centre Versailles Grignon ; la FDSEA de l’Yonne ; Jeunes Agriculteurs de l’Yonne ; la Confédération Paysanne ; le Groupement des AgroBiologistes de l’Yonne ; la Fédération de Défense de l’Appellation Chablis ; la Direction Régionale des Autoroutes Paris-Rhin-Rhône ; la Direction Territoriale SNCF Réseau Bourgogne Franche Comté ; l’Union des Productions Végétales de l’Yonne ; 110 Bourgogne ; Cerepy ; Capserval ; Etablissement Ruzé ; Soufflet Agriculture ; Vivescia ; Dijon Céréales ; les Propriétaires Agricoles de l’Yonne