Accès au contenu
Coopérative Cocebi

Une capacité de stockage doublée

La coopérative bio Cocebi, qui a tenu son assemblée générale le 13 décembre dernier, poursuit son extension avec le doublement des capacités de stockage de son site historique, à Nitry
Par Dominique Bernerd
Une capacité de stockage doublée
Après 31 ans à la présidence de la coopérative, Jean-Marie Pautard a annoncé qu’il tournait la page
«Ca devait être la moisson du siècle. Dans les faits, ça l’a été, mais pas dans le bon sens ! Ni nous les paysans, ni nos grands instituts de prévisions avec leurs satellites, ni nos institutions agricoles, personne n’avait rien vu venir ! Ce fut un désastre dont on se souviendra longtemps, pour peu que le dérèglement climatique ne nous habitue pas à ce genre de déconvenue…» Comme l’a rappelé son président, Jean-Marie Pautard, la moisson 2016 aura été la pire collecte que les adhérents de Cocebi aient pu connaître, depuis la création de la coopérative en 1983. Seule l’année 1976, de sinistre mémoire, avait affiché d’aussi faibles rendements. Toutes les productions ont été touchées et au final, la collecte de l’exercice 2016/2017 ne dépasse pas les 14 000 tonnes, à peine plus de la moitié de ce qui était attendu. Pour un chiffre d’affaires en baisse de 9%, à 11,4 Millions €, les prix en hausse sur la majorité des produits ayant permis d’amoindrir en partie la baisse de volume. Pour autant, souligne Jean Buet, directeur de la Cocebi, «imaginons l’impact pour la coopérative si nous n’avions pas vu dans le même temps, nos surfaces augmenter…» Pour sa part, l’activité semences certifiées subit un effet double peine, avec 700 tonnes collectées sur l’exercice, soit moins du quart de la récolté annoncée, et de faibles facultés germinatives, rappelle Jean Buet : «très compliqué de faire de la semence avec ce que l’on a reçu en 2016, compte tenu d’un taux de déchet au tri d’environ 50% pour 25 à 30% selon les années habituellement et des facultés de germination particulièrement basses et aléatoires sur un bon nombre de lots…»
Dès le 14 septembre, le Conseil d’administration de la coopérative mettait en place des mesures d’accompagnement des adhérents, avec notamment un prix de base payé aux producteurs au moins identique à celui de 2015, des compléments de prix payés avec plus de deux mois d’avance et un report sans frais des échéances à la moisson 2017, pour les approvisionnements en semences et fertilisants.
La collecte 2017 s’annonce heureusement sous de meilleurs auspices, avec des rendements, à quelques exceptions près, qualifiés de «très bons» et des volumes pour la coopérative, proches de 30 000 tonnes. Au total, l’union de commercialisation Fermes Bio (qui regroupe, outre Cocebi, les coopératives Probiolor, Corab et Biocer), devrait être amenée cette année à mettre en marché plus de 62 000 tonnes, pour un chiffre d’affaires prévisionnel dépassant les 30 millions €. La situant parmi les premières places des metteurs en marché bios en France.

Des investissements de deux millions d’euros
La récolte désastreuse de 2016 n’a pas empêché la coopérative de Nitry de décider d’investissements majeurs pour son avenir, avec notamment la création de 12 nouvelles cellules venant s’additionner à l’existant, pour y stocker 3 800 tonnes supplémentaires, une augmentation du débit d’ensilage et un nouveau séparateur. Actuellement en cours de réalisation, les travaux devraient s’achever en avril prochain, pour être pleinement opérationnels à la moisson 2018. Une galerie permettant de mettre à l’abri l’ensemble de la manutention et de chargement est également en construction, ainsi que le renforcement de la tour de triage afin d’y traiter l’intégralité des volumes qui sont amenés à y transiter. Le circuit d’évacuation des balles et des déchets sera revu en conséquence dans les mois à venir. Le coût total de l’investissement avoisine les 2 M€, avec une enveloppe de subvention de 684 K€, octroyée par l’Agence de l’Eau Seine-Normandie. D’autres pistes seront menées pour accompagner la croissance de la production en agriculture biologique, rappelle le directeur de la coopérative, Jean Buet : «comme de favoriser au maximum le stockage en ferme, au moins par des stockages tampon sur des périodes pas très longues pour permettre la fluidité au moment de la récolte. Si tout arrivait en même temps, nous serions submergés…» Ou encore, de mener des partenariats avec des agriculteurs ayant une capacité de stockage, sous forme de prestations, voire, d’envisager déjà d’autres investissements : «aucune décision n’a encore été prise en la matière, mais nous savons que nous aurons inévitablement à créer un nouveau site de stockage dans le département, même si le lieu n’a as encore été choisi, pour faire face à l’augmentation de production attendue. Sauf à penser que le bio arrête de se développer et que la croissance de la collecte s’arrête…» L’été dernier, la Cocebi a par ailleurs fait l’acquisition d’un terrain de 1,5 ha, dans l’objectif d’une réserve foncière pour construire une usine de transformation sur place, à Nitry.

Le président Pautard tourne la page
Un changement d’échelle annoncé pour la coopérative bio du département, qui s’est fixée pour objectif de se différencier par rapport au «bio mondialisé», explique Jean Buet : «un groupe a été créé dans le cadre de Fermes Bio pour travailler à une distinction, à un label ou toute chose identifiable, permettant d’apporter de la valeur. Cela nous ramène à une question fondamentale : pourquoi 100% bio ? Parce que cela correspond à une certaine attente d’une partie des consommateurs, prêts à payer un peu plus cher, pour avoir autre chose que de l’agricole UE ou non UE…»
Après 31 ans de bons et loyaux services à la présidence de la coopérative, Jean-Marie Pautard a décidé de tirer sa révérence : «je pense que c’est l’heure… Désormais, même les dictateurs africains ne perdurent plus au pouvoir au-delà de 80 ans !» Sans pour autant quitter le Conseil l’an prochain, et «accompagner le futur nouveau président si besoin…» L’occasion, dans ce qui sera son dernier rapport moral et d’intervention en qualité de président de livrer quelques réflexions personnelles, sur ce développement de l’agriculture bio (6% des SAU françaises aujourd’hui), qui ne sera pas sans conséquence pour la filière : «comment nous situer sur cette autoroute où nous sommes doublés, à droite, à gauche, un peu comme dans un film d’animation, où même des nouveaux venus, vont voler par-dessus nos têtes ? Ce développement de la bio que nous avons si souvent appelé de nos vœux est là… Nous ne pouvons que nous en réjouir ! Mais nous pouvons légitimement nous inquiéter ou nous poser la question suivante : cela est-il pérenne ? Quid du moyen terme de notre vision bio ? Et quelle place devons-nous prendre dans ce concert, cette cacophonie… ? »