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Productions végétales

Une campagne à vite oublier

Un agriculteur d’Épernay-sous-Gevrey évoque ses différentes récoltes de l’année.
Par Aurélien Genest
Une campagne à vite oublier
Laurent Garnier, en train de faucher sa dernière parcelle.
Jeudi 29 septembre, Laurent Garnier sortait sa moissonneuse pour la dernière fois de l’année. Son dernier champ de soja avait du mal à dépasser les 20q/ha. «C’est extrêmement bas, un peu à l’image de tous les autres rendements de 2016» déplorait l’agriculteur d’Épernay-sous-Gevrey, village situé entre Nuits-Saint-Georges et Gevrey-Chambertin. Un résultat qualifié d’«extrêmement décevant» au vu des 35q/ha que cet exploitant de 59 ans pouvait espérer dans cette culture. Laurent Garnier ne cachait pas son envie «d’en terminer avec cette campagne» : «je ne dois pas être le seul... C’est vrai, je suis vraiment pressé de passer à la suivante. En plus des rendements très médiocres et de toutes les difficultés économiques que cela va engendrer, il n’y a aucun enseignement à tirer de cette campagne. D’habitude, quand on constate un échec dans la technique de production, on réfléchit et on tente de corriger ce qui n’a pas marché. Cette année, je pense qu’il n’y avait rien à faire compte tenu des conditions climatiques déplorables que nous avons eues».

30q/ha en blé
Le Côte d’orien installé en 1977 n’avait jamais connu pareils résultats dans ses cultures de blé, avec des rendements 2016 variant de 45 à 48q/ha : «je suis même descendu à 30q/ha dans un champ à très bon potentiel, très uniforme, où tout avait été réalisé en temps et en heure d’un point de vue technique entre l’apport d’azote et les fongicides. Le désherbage avait été réussi lui aussi. Malheureusement, les conditions climatiques avec une très forte pluviométrie ont tout planté». Sa parcelle de pois d’hiver a terminé à 6q/ha alors qu’un tonnage sept fois plus important pouvait être escompté : «la bactériose s’est développée au printemps et a détruit toutes les plantes. J’étais proche des 40q/ha en 2015 après avoir semé au printemps. J’espérais en tirer davantage cette année en ayant introduit la culture durant l’hiver. C’est raté !» Le colza termine pour sa part à 31q/ha, quand la moyenne quinquennale de l’exploitation était encore à 39q/ha avant cette récolte. La seule bonne nouvelle de l’été est venue de l’orge d’hiver : «j’ai obtenu un rendement final de 70q/ha, en variété Esterel. Ce résultat est très bon par rapport à la moyenne départementale, et même par rapport à ce qui a été enregistré dans les alentours. Je n’ai pourtant rien fait de particulier.... Encore une fois, il n’y a aucun enseignement à tirer de cette campagne vraiment atypique».

24q/ha au mieux en soja
Laurent Garnier comptait sur son soja pour rattraper quelque peu la donne : «la culture se présentait plutôt bien jusqu’en août. Mais plusieurs jours de canicule ont arrêté brutalement la végétation. En l’espace de deux jours, les champs sont passés du vert foncé à une couleur de pelure d’oignon... Ce n’était pas bon signe. Pourtant, la forte pluie qui a suivi a permis une maturité normale. Je pensais que le potentiel de rendement allait se refaire une santé, avec un poids de mille grains susceptible de remonter».

Le producteur a finalement essuyé une nouvelle déception la semaine dernière, malgré de très bonnes conditions de récolte. Son rendement final en soja devrait osciller entre 23 et 24q/ha sur ses 30 hectares de cultures : «j’ai terminé dans un champ où l’implantation en mai avait été très délicate. Les très fortes précipitations du 13 mai avaient impacté la parcelle. Il n’y avait plus de pieds dans certains endroits. Des semences étaient même empilées sur plusieurs centimètres dans les bassières... C’était du jamais vu. J’ai re-semé comme j’ai pu dans les zones où il n’y avait plus rien».
Pour Laurent Garnier, il n’y a aucun doute : avec de tels niveaux de rendements et de prix, le bilan sera négatif pour de nombreux agriculteurs dont il fait partie : «les exploitants vont devoir réinjecter de l’argent privé, s’ils en ont, dans leur activité, ou alors aller à l’emprunt... Le problème, c’est que nous attendons encore des propositions des banques et du gouvernement. Pour l’instant, il ne se passe rien, nous n’avons aucune information, c’est le flou total. Il serait intéressant que des éléments officiels soient publiés rapidement pour que nous retrouvions de la trésorerie pour aller jusqu’à la récolte 2017. Ce n’est pas à la coopérative de jouer le rôle de banquier. L’État et la Région doivent faire leur travail pour sauver la dernière économie de production française. Il faut reporter les annuités en fin de tableau, aménager la DPA et une vraie assurance revenus, ne pas prélever les taxes gouvernementales liées a l’environnement cette année et alléger les contraintes environnementales !»