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Qualité de l’eau

Une bonne volonté partagée et efficace

Les actions mises en place sur le Bassin d’Alimentation de Captage du Puits des Perrières, à Lasson, sont une première déclinaison locale de la charte départementale sur l’utilisation des phytosanitaires, signée en juin 2016 en préfecture, par l’ensemble des acteurs agricoles.
Par Dominique Bernerd
Une bonne volonté partagée et efficace
Le président de la Chambre d’agriculture de l’Yonne, Étienne Henriot et le maire de Lasson, Patrice Baillet.
Il y a deux ans, l’Yonne était le premier département à se doter d’une charte sur l’utilisation des phytosanitaires, dans le cadre du plan Écophyto 2. Co-signée par l’ensemble des acteurs de la profession agricole, mais également les prescripteurs et collectivités territoriales, elle s’est fixé l’objectif ambitieux de diminuer de 25 % l’utilisation des produits phyto.

C’est dans le prolongement de cet engagement qu’une première déclinaison locale a vu le jour sur le Bac du Puits des Perrières, à Lasson, commune limitrophe du département de l’Aube. Grâce à la mobilisation de tous les acteurs, au premier rang desquels 26 des 29 agriculteurs présents sur le périmètre concerné, un certain nombre d’actions, tant au niveau agricole que non agricole, ont été formalisées dans un arrêté inter-préfectoral co-signé par le préfet de l’Yonne, Patrice Latron et son homologue de l’Aube, Thierry Mosimann.

Un engagement collectif
C’est dans le cadre du Grenelle de l’environnement, en 2007, que ce captage fut identifié comme prioritaire, suite à la dégradation constatée de la ressource en eau. Le Bac du Puits des

Perrières alimente près de 900 personnes en eau potable, réparties sur les communes de Lasson et Neuvy-Sautour. Un premier programme d’actions volontaires a été édifié en 2011, mais avorté au bout de quelques années, faute de gouvernance suffisante autour de la démarche, qui, rappelle Patrice Latron, «est une démarche volontaire, l’État n’ayant pas à ce stade, la capacité d’obliger qui que ce soit à mener des actions». Cet exploitant, aujourd’hui encore impliqué dans le processus mis en place se souvient : «pendant 5 ans, nous étions un peu livrés à nous-même. On était alors seulement une poignée d’agriculteurs, avec l’impression d’être abandonnés de tous». C’est avec la volonté de changer de méthode, que fut initiée la charte de 2016, faisant du Bac de Lasson un territoire pilote pour la mise en pratique de mesures adaptées à la protection de la ressource en eau. Avec à sa tête un Comité de pilotage animé par le maire de la commune, Patrice Baillet. L’implication d’un grand nombre d’agriculteurs dans la démarche est saluée à sa juste mesure par le préfet de l’Yonne : «ce qui est significatif et que je tiens à souligner, c’est que 83 % des exploitants présents sur les territoires du Bac ont adhéré et intégré cette démarche». Si les agriculteurs en sont les premiers acteurs, les collectivités sont également impliquées, que ce soit au travers de la réhabilitation d’assainissements non collectifs, sous l’égide de la Communauté de Communes Serein et Armance, d’une gestion des déchets, par les maires des communes concernées, en phase avec la vulnérabilité du territoire ou encore, de la sécurisation par l’État, de la RN 77, pour prévenir toute pollution accidentelle liée au trafic routier. La Chambre d’agriculture de l’Yonne pour sa part, assure une mission d’assistance et de conseil à la contractualisation des MAE auprès des exploitants concernés.

Ne pas pénaliser financièrement les agriculteurs
Les actions menées par les agriculteurs de la zone pour adapter leurs pratiques culturales sont multiples, passant notamment par une limitation de la fertilisation azotée et une gestion des apports au plus près des besoins de la culture, à la parcelle : gestion du 1er apport d’azote au moyen de la méthode «Limaux» (ou méthode Bande Double Densité) sur toutes les parcelles de blé, mesures de biomasse en entrée et sortie d’hiver, mesures de reliquats en sorte d’hiver, etc. Sont également mis en œuvre : l’introduction d’au moins 20% de cultures moins consommatrices en azote, par période 5 années successives, l’implantation de couverts au plus tôt après la récolte, le maintien des repousses de colza au minimum jusqu’au 1er septembre et le plus longtemps possible selon les conditions de l’année, sur toutes les parcelles connaissant une interculture courte après une récolte de colza avant l’implantation d’une culture d’hiver… Sont également réalisés des aménagements spécifiques, comme l’enherbement de tous les fossés de collecte de drainage. Avec pour objectif final, à moyen terme, de passer sous le seuil de 40 mg/l, en conformité avec le programme 2016-2021 fixé par le Sdage Seine-Normandie.

Une première évaluation du dispositif est prévue d’ici 3 ans, l’objectif étant d’étendre la démarche à d’autres territoires, notamment dans le Migennois, sur le captage de la Fontaine aux Seigneurs ou dans l’Auxerrois, en zones Plaine du Saulce et des Boisseaux.

Soulignant toute l’importance à impliquer les agriculteurs le plus tôt et le plus en amont possible dans ce type de démarche, le président de la Chambre d’agriculture de l’Yonne, Étienne Henriot, s’est pour sa part félicité du fait que «l’on soit parti du principe cette fois-ci, de ne pas pénaliser l’agriculteur sur ses revenus, face aux mesures mises en œuvre, ce qui n’avait pas du tout été pris en compte lors de la première tentative. À partir de là, on mobilise plus facilement». Des propos relatés par le préfet de l’Yonne, Patrice Latron : «Mettre en œuvre sans se pénaliser financièrement, c’est très important. Personne autour de cette table n’accepterait d’être payé moins cher pour faire un effort au service de la collectivité !»