Coopératives
Un travail important reste à faire
À l’issue de moissons qui resteront dans les annales comme les pires enregistrées jusqu’alors, les coopératives céréalières vont avoir un travail important à effectuer en aval, pour tenter d’améliorer la qualité des grains.
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«Votre délai c’est quoi ? On va essayer de vous livrer du blé autour de 73 à 74 de PS, techniquement, on ne peut pas remonter plus, mais on va trouver une solution, ne vous inquiétez pas». Au téléphone, Jean-Luc Billard tente de rassurer un importateur belge, inquiet de ne pas recevoir sa marchandise dans les délais. Des appels de ce genre, le directeur de la coopérative Capserval en reçoit quotidiennement, avec le souci supplémentaire d’attendre le feu vert des laboratoires d’analyse avant d’expédier : «on est ici, sur du blé type «babyfood» et nous devons attendre l’analyse libératoire avant de faire partir le blé». Avec une collecte réduite de plus de moitié, ce ne sera pas facile cette année pour la coopérative de Véron, d’honorer tous ses contrats et priorité sera donnée aux partenaires historiques : «nous sommes essentiellement tournés vers la meunerie intérieure et le problème aujourd’hui est qu’il nous manque de la quantité, notamment pour ce qui est de notre filière CRC, où nous avons à peine 55% de disponible par rapport au marché». Toutes productions confondues, le groupe Capserval enregistre un déficit de collecte de - 40%, mais c’est en blé que la moisson s’est avérée la plus catastrophique, avec un chiffre global à - 54% : «le cumul de trois leviers négatifs : une quantité faible, un poids spécifique moyen à 71, là où la moyenne quinquennale est entre 77 et 78, voire 80 comme l’an passé et les prix » Seule solution : retravailler le grain pour ramener le PS à une norme acceptable pour les deux parties, que ce soit la coopérative à travers ses adhérents ou la meunerie. Un véritable sujet économique, avec au final entre 5 et 15 % de déchets aujourd’hui non commercialisables : «une fois triés, il faut attendre qu’un marché se mette en place pour ces petits grains sans amande et à faible PS, à un niveau de prix acceptable pour tous». Tous les moyens vont être mis en œuvre pour ce travail de tri, qui s’avère déjà chronophage et couteux en énergie. L’objectif étant de travailler avec plusieurs machines à la fois : calibreurs, table densitométrique, nettoyeur séparateur, mais un choix sera à faire : «économiquement aujourd’hui, la question, c’est cette dualité entre le fait d’alimenter le marché meunier ou de se dire : je trie moins et sure l’alimentation du bétail». Pas mieux pour les orges, avec là aussi, des quantités en retrait et des PS très faibles, en dehors des normes de contractualisation : «les chiffres parlent d’eux même : 38 000 tonnes d’orges de brasserie l’an passé, contre 9 000 tonnes cette année ! Du jamais vu» Tout le reste passera en fourrager, mais avec là aussi, des marchés qui se cherchent et risquent vite d’être saturés.
Autre challenge pour Capserval : la défense de ses adhérents : «c’est même notre problématique première. Aujourd’hui, on a des gars qui sont vraiment en grande difficulté et vont avoir du mal à faire face au rachat d’intrants pour mettre en terre de nouvelles productions». Des mesures d’accompagnements sont en train d’être mises en place, notamment dans le cadre d’accords tripartites avec les banques, mais il y a urgence : «la coopérative n’est qu’un maillon parmi d’autres, on ne peut pas tout faire tout seul et il est primordial qu’une véritable chaine de solidarité se mette en place». Au sein même de la coopérative des mesures restrictives vont être instaurées : gel des recrutements, gel des salaires, stabilisation des coûts d’investissement, réduction des frais d’entretien… Avec pour objectif premier de passer le cap : «et on va le passer ! On a la chance pour cela, d’avoir une coopérative bien gérée par nos parents et grands-parents, mais il ne faut pas que ça dure 2 ans !»
Les bonnes terres pénalisées
«Des rendements en blé à 20 q/ha, comme sur le secteur de Brienon, là où l’an passé, on frôlait les 100 q/ha ! Les chiffres sont catastrophiques». Le constat fait par Germain Bour, directeur de la coopérative Cerepy est sans appel : «on ne fera même pas une demi-récolte cette année en blé, à peine 45% d’une année normale». Les autres cultures sont au diapason, avec des rendements en baisse de 20% en colza et de 30% en orge d’hiver : «les pois, j’en parle même pas, on fait 180 tonnes, pour 1 500 t habituellement». Un marasme un peu amoindri par ce qui caractérise la coopérative de Saint-Julien-du-Sault : la diversité de ses productions : «avoine nue, sarrasin et pois chiche représentent jusqu’à 15% de l’assolement total, dans la ferme Cerepy, contre 2 à 3% ailleurs. C’est vrai que cela amène un petit ballon d’oxygène».
D’autant que les prix, comme en avoine nue, sont contractualisés et donc garantis : «en rendement, on fait 15 à 20% de moins que l’an passé, mais c’est la culture qui s’en sort le mieux, la moins pire des pires !» Une tendance se dégage cette année sur l’ensemble du secteur de la coopérative : l’affaiblissement des bonnes terres : «elles ont moins drainé la flotte, ce qui a eu pour effet d’asphyxier les racines, contrairement aux terres plus filtrantes, type superficielles ou argilo/calcaires, qui s’en sortent mieux».
Ici aussi, un travail du grain sera nécessaire : «avec le souci de faire remonter le PS, car plus il est faible, plus l’enveloppe du grain est importante et plus on produit du son, mais pas de farine». Pour certains lots particulièrement dégradés, Germain Bour envisage même d’utiliser le calibreur, d’ordinaire réservé aux orges : «à 65 ou 66 de PS, ce sera quasiment mission impossible pour le ramener à 74, mais on peut essayer de viser les 68 ou 70, ce sera un pis aller si un marché fourrager se dégage». Avec le souci supplémentaire des parités de transport : «plus le PS est faible, plus le blé prend du volume, pour moins de poids, dans les camions ou les trains». Autant de facteurs négatifs qui engagent la coopérative elle aussi, à la prudence : investissements gelés pendant un an, travaux de maintenance réduits au strict minimum.
Autre challenge pour Capserval : la défense de ses adhérents : «c’est même notre problématique première. Aujourd’hui, on a des gars qui sont vraiment en grande difficulté et vont avoir du mal à faire face au rachat d’intrants pour mettre en terre de nouvelles productions». Des mesures d’accompagnements sont en train d’être mises en place, notamment dans le cadre d’accords tripartites avec les banques, mais il y a urgence : «la coopérative n’est qu’un maillon parmi d’autres, on ne peut pas tout faire tout seul et il est primordial qu’une véritable chaine de solidarité se mette en place». Au sein même de la coopérative des mesures restrictives vont être instaurées : gel des recrutements, gel des salaires, stabilisation des coûts d’investissement, réduction des frais d’entretien… Avec pour objectif premier de passer le cap : «et on va le passer ! On a la chance pour cela, d’avoir une coopérative bien gérée par nos parents et grands-parents, mais il ne faut pas que ça dure 2 ans !»
Les bonnes terres pénalisées
«Des rendements en blé à 20 q/ha, comme sur le secteur de Brienon, là où l’an passé, on frôlait les 100 q/ha ! Les chiffres sont catastrophiques». Le constat fait par Germain Bour, directeur de la coopérative Cerepy est sans appel : «on ne fera même pas une demi-récolte cette année en blé, à peine 45% d’une année normale». Les autres cultures sont au diapason, avec des rendements en baisse de 20% en colza et de 30% en orge d’hiver : «les pois, j’en parle même pas, on fait 180 tonnes, pour 1 500 t habituellement». Un marasme un peu amoindri par ce qui caractérise la coopérative de Saint-Julien-du-Sault : la diversité de ses productions : «avoine nue, sarrasin et pois chiche représentent jusqu’à 15% de l’assolement total, dans la ferme Cerepy, contre 2 à 3% ailleurs. C’est vrai que cela amène un petit ballon d’oxygène».
D’autant que les prix, comme en avoine nue, sont contractualisés et donc garantis : «en rendement, on fait 15 à 20% de moins que l’an passé, mais c’est la culture qui s’en sort le mieux, la moins pire des pires !» Une tendance se dégage cette année sur l’ensemble du secteur de la coopérative : l’affaiblissement des bonnes terres : «elles ont moins drainé la flotte, ce qui a eu pour effet d’asphyxier les racines, contrairement aux terres plus filtrantes, type superficielles ou argilo/calcaires, qui s’en sortent mieux».
Ici aussi, un travail du grain sera nécessaire : «avec le souci de faire remonter le PS, car plus il est faible, plus l’enveloppe du grain est importante et plus on produit du son, mais pas de farine». Pour certains lots particulièrement dégradés, Germain Bour envisage même d’utiliser le calibreur, d’ordinaire réservé aux orges : «à 65 ou 66 de PS, ce sera quasiment mission impossible pour le ramener à 74, mais on peut essayer de viser les 68 ou 70, ce sera un pis aller si un marché fourrager se dégage». Avec le souci supplémentaire des parités de transport : «plus le PS est faible, plus le blé prend du volume, pour moins de poids, dans les camions ou les trains». Autant de facteurs négatifs qui engagent la coopérative elle aussi, à la prudence : investissements gelés pendant un an, travaux de maintenance réduits au strict minimum.