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Filière bio

Un projet politique pour dessiner l’avenir

Face à l’essor sans précédent que connait la filière bio depuis ces trois dernières années, la coopérative Cocebi a élaboré un projet politique pour les dix ans à venir.
Par Dominique Bernerd
Un projet politique pour dessiner l’avenir
La présentation du projet politique a donné lieu à de nombreuses interventions des adhérents présents dans la salle.
Le bio a le vent en poupe, mais comment conserver le cap et qui tiendra la barre  ? Par delà la métaphore, le sujet est suffisamment d’importance pour que la coopérative Cocebi ait décidé de travailler à un projet politique engageant son avenir pour la prochaine décennie. Projet présenté aux adhérents et débattu, lors de l’assemblée générale du 12 décembre dernier à Nitry.
«Cocebi est une coopérative 100% bio, qui regroupe des agriculteurs aux productions diverses… Notre agriculture biologique est plus qu’un mode de production, c’est un modèle qui porte et accompagne le changement social, environnemental et économique de nos territoires» Des mots forts, inscrits dans le marbre du projet, sur lesquels le président de la coopérative, Jean-Marie Pautard, a livré quelques réflexions : «100% bio, ce n’est pas anodin car aujourd’hui, bon nombre de structures considèrent que la bio est un élément de diversification dans une palette de produits alimentaires, pour laquelle la bio est une niche et une aubaine. Certains ont cette conception de la bio, ce n’est pas la nôtre et cela peut avoir beaucoup d’incidences dans le choix que l’on fait et dans les investissements à venir».

Ne pas être intégriste
Si la juridiction autorise aujourd’hui la juxtaposition de deux structures, l’une en bio, l’autre en conventionnel, sur une même exploitation, le sujet fait débat, parmi les adhérents présents  : «le fait de faire les deux sur une même exploitation, risque à terme de faire perdre de la crédibilité à nos produits, qui n’auront plus le même aspect aux yeux des consommateurs». Pas d’accord répond Jean Massé, figure tutélaire (courant «canal historique !»  ) de l’agribio dans le département  : «j’adhère au 100% bio, c’est l’idéal, mais on ne va pas refaire un cahier des charges pour différencier un «bio+ !»   Je pense qu’il ne faut pas être intégriste, ça n’a jamais été ma politique. Il faut laisser le libre choix aux gens, d’avancer à leur vitesse». Rappelant que la coopérative avait aujourd’hui embauché deux techniciens pour accompagner les adhérents dans leur conversion. Mais les aides proposées aujourd’hui, qu’elles soient pour le maintien ou la conversion, sont plafonnées et n’œuvrent pas en faveur de fermes 100% bio, rappelle cet autre adhérent, qui dénonce un manque de lucidité de certains acteurs de la filière  : «qui s’imaginaient que les aides à la bio, c’était comme le bandit manchot, on tirait sur la manette et ça tombait automatiquement  !»

La concurrence d’un bio «mondialisé»
Si l’agriculture bio connait un changement d’échelle, elle doit aujourd’hui faire face à une bio «mondialisée» avec plus ou moins de contraintes suivant les pays et les cahiers des charges. La concurrence n’est pas anodine  : «à la Cocebi, nous nous situons délibérément dans une «bio +» avec plus de cohérence et c’est ce dont les consommateurs ont besoin aujourd’hui». L’objectif de fermes 100% bio défendu par le projet politique, n’appelle pas pour autant à jouer les «ayatollahs», précise Jean-Marie Pautard  : «on ne coupe pas des têtes et des mains, mais à un moment donné, quand on aura tout mis sur la table, il y aura des choses à faire et on s’est donnée 5 ans pour cela. C’est-à-dire qu’une personne engagée sur une première parcelle en bio, devra au bout de cette période, avoir passé l’ensemble de son exploitation en bio».
Parmi les intervenants au débat, Laurent Poncet, président de la coopérative partenaire Ynovae : «nous avons chez nous des agriculteurs qui se cherchent, d’autres avec des problématiques en terme de Bac pour certaines zones et passer en bio sera certainement pour eux la seule solution et nous devons les accompagner… Arrêtons de nous tirer dans les pattes ! Le bio français doit exister, car moi, je suis très méfiant vis-à-vis du bio importé pour satisfaire un marché de mode. Et ce qui fait la valeur du bio français, c’est  qu’existe à côté une agriculture conventionnelle  ! Car si on généralise le bio à toute la production française, en termes économiques, je pense que cela deviendra très compliqué pour la filière bio dans son ensemble».