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Charolais

Un climat très difficile

La Fédération charolaise de Côte d’Or et Bovins Croissance ont organisé leur assemblée générale respective la semaine dernière près de Bligny-sur-Ouche. La lourde conjoncture a bien sûr été abordée.
Par Aurélien Genest
Un climat très difficile
Une fois n’est pas coutume, les réunions ne se sont pas déroulées au pôle agricole de Créancey.
Coupler les assemblées de la Fédération charolaise de Côte d’Or et de Bovins Croissance n’était pas anodin, mercredi 19 octobre, à la salle des fêtes de Vic-des-Prés. En plus des avantages économiques et pratiques, la tenue commune de ces deux réunions avait un réel message de solidarité en cette période si difficile, les présidents des deux organismes prônant la voie du travail collectif pour se sortir de cette mauvaise passe.

Cette double réunion était aussi l’occasion de faire le lien entre la génétique et la qualité de la viande avec la présence des éleveurs du Goût d’Ici, filière de proximité dans le Pays beaunois, qui ont proposé un bon repas en fin de journée.

De nombreux aléas
Thierry Lechenault, pour la Fédération charolaise, lançait les hostilités en rappelant les péripéties de 2016 avec des conditions climatiques désastreuses, des sols matraqués par le piétinement des bovins, des conditions de récoltes tardives et des foins de mauvaise qualité.

La liste était longue, «d’autant qu’une telle moisson, avec des rendements aussi bas et une si mauvaise qualité, n’avait jamais été constatée» selon le président côte d’orien. Celui-ci a fustigé le niveau très insuffisant des cours : «là non plus, le compte n’y est pas. Les prix des céréales reviennent à ceux des années 1984-1985. Ceux de la viande bovine et du lait ne font que baisser, étant victimes de l’embargo russe et d’une campagne de communication très négative. Le prix du lait ne cesse de chuter entraînant un abattage massif de vaches laitières chez des éleveurs usés par le travail et désabusés par des coûts de production supérieurs aux prix de vente, encombrant un marché de la viande bovine déjà saturé».

Des interrogations
Thierry Lechenault s’est interrogé sur les jeunes générations: «que pouvons-nous dire à nos jeunes, qui viennent de s’installer ou qui envisageraient de le faire? Continuer à travailler 70 heures par semaine pour gagner moins de 5 000 euros par an ? J’ai bien peur que nous soyons au bout du rouleau... Pouvons-nous encore nous tourner vers nos grands décideurs afin de demander des aides substantielles ? Ce n’est pas la loi NOTRe qui nous apportera des réponses satisfaisantes (ndlr: voir encadré)». Thierry Lechenault s’est aussi questionné sur le devenir de la Fédération : «j’ai bien peur que l’arrêt de l’aide génétique ne signe la mort de notre association, car malgré les bons résultats de la campagne de prophylaxie, il est de plus en plus difficile de vendre des animaux hors département».

Le président est revenu sur les pistes envisagées pour tenter de freiner cette «descente aux enfers» : «la restauration hors domicile commence seulement à se mettre en place, mais pas à un rythme assez soutenu. Que dire de la semaine du goût dernièrement mise en avant au collège, avec un menu végétarien affiché ? Pour l’opération cœur de gamme, où est passée la part promise aux éleveurs ? Il est grand temps que nos Politiques assument leur responsabilités».

Persévérer ensemble
Durant l’intégralité de la réunion, Thierry Lechenault n’a pas cessé de féliciter les éleveurs faisant continuellement la promotion de la race Charolaise, au travers de concours, salons et autres sorties.

à la fin de son discours, le président de la Fédération a tenu à souligner l’excellente ambiance régnant entre tous les acteurs génétiques du département, à savoir les comices et comités d’agriculture, le GIE, Bovins Croissance, la Fédération charolaise, l’union des races et la Chambre d’agriculture, mettant ses bureaux et son personnel à disposition de la génétique. François Sauvadet et Marc Frot ont également été remerciés pour leur soutien permettant de boucler, jusqu’à présent, le budget annuel de la Fédération.

«Ne pas baisser les bras»
L’assemblée générale de Bovins Croissance s’est déroulée dans la foulée. Sans revenir sur les difficultés déjà énumérées par Thierry Lechenault, le président Jean-Pierre Godot a invité les éleveurs à ne pas baisser les bras et à «agir» avec les moyens locaux afin de «défendre un modèle d’agriculture familiale à dimension humaine dans notre département» : «Nous sommes à un carrefour, avec des mutations profondes de nos organisations d’élevage. Nous devons défendre notre vision au niveau national et agir au niveau local avec les outils qui sont à notre disposition».
Le président a rappelé l’intégration de Bovins Croissance au sein de la Chambre d’agriculture, position permettant de rester «indépendant, d’avoir un soutien logistique important et de disposer de nombreuses compétences techniques et économiques» : «il me parait important d’en parler en ces périodes de réflexion de nos organisations. à l’heure où nous réfléchissons aux conséquences de la mise en place du règlement zootechnique européenne sur les OS, BC, EDE, ES, il me parait primordial de rappeler que les principales races allaitantes défendent une BSUE par race (ndlr : Breed Society, pour conserver une unité raciale forte). Dans l’intérêt de nos races et de nos filières, je pense qu’il est essentiel de défendre le peu de liberté qu’il nous reste encore dans nos choix génétiques, nos modes de reproduction... Soyons vigilants et ne nous laissons pas tenter par l’appel des sirènes, évitons que des capitalistes prennent le contrôle de nos exploitations».

Accentuer la communication
Les techniciens de Bovins Croissance ont présenté les différents résultats techniques de l’année écoulée, à la plus grande satisfaction des éleveurs adhérents et du président : «notre œil, associé à nos outils techniques génétiques nous permettent de progresser et d’améliorer notre productivité numérique. D’autres outils technologiques se développent et nous devons nous les approprier».

Les concours de l’Auxois-Sud, de Semur-en-Auxois et la ferme de Côte d’Or ont été cités parmi les rendez-vous à suivre. L’aide génétique a également été abordée par Jean-Pierre Godot : «Bovins Croissance et la Chambre d’agriculture ont défendu devant le Conseil départemental l’intérêt de l’aide génétique. Il nous a été répondu que la loi NOTRe nous obligeait à repenser cette aide à partir de septembre 2017 : à nous de réfléchir à un projet collectif qui s’inscrira dans la stratégie départementale pour avoir un soutien génétique deuxième génération».

Aide génétique : ça coince

Marc Frot, président de la commission agricole du Conseil départemental, est venu parler des incidences de la loi NOTRe sur les actions de l’accord-cadre.
Comme un certain nombre d’orientations, le devenir de l’aide génétique est sérieusement remis en question : «Avec cette nouvelle loi, les aides directes du Conseil départemental ne sont plus permises si elles touchent l’économie et l’agriculture. Nous sommes en pleine négociation avec la Région. Tous les soutiens seront maintenus l’année prochaine mais pour après, ça se complique sérieusement. Nous avons un an pour négocier. Pour que nous puissions encore agir, nous avons besoin de partenariats avec le Conseil régional. La Région doit financer une action pour que nous puissions en faire autant. L’aide aux bâtiments d’élevage est par exemple maintenue car la Région aidait déjà. Ce n’est pas le cas de l’aide génétique et de bien d’autres soutiens. Il va falloir batailler pour trouver des solutions. Hier (ndlr : le 18 octobre), François Sauvadet s’est rendu à Paris avec le président du GDS France et Pascal Martens, le président du GDS de Côte d’Or, afin de mettre en avant l’utilité des différentes aides dans les élevages».