Un choix politique attendu
La Commission mixte paritaire (CMP) avait validé le 30 juin la proposition de loi des sénateurs Laurent Duplomb et Franck Menonville « visant à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur ». Le texte a été adopté le 8 juillet par l’Assemblée nationale.

C'est par 316 voix contre 223 que l'Assemblée nationale a adopté, le 8 juillet, la proposition de loi des sénateurs Laurent Duplomb (LR, Haute-Loire) et Franck Menonville (UDI, Meuse). Après avoir passé sans encombre le cap du Sénat le 2 juillet, la proposition de loi Entraves des sénateurs a été aussi adoptée largement à l’Assemblée nationale. Le texte était passé le 30 juin par une Commission mixte paritaire (CMP) qui avait permis l’écriture d’un texte de compromis entre députés et sénateurs. La grande majorité de la coalition gouvernementale et l’alliance RN-UDR (extrême droite) ont voté pour. Le groupe macroniste Ensemble pour la République a voté aux deux tiers pour (14 contre, 10 abstentions). Neuf députés MoDem et trois Horizons ont voté contre. La gauche et les écologistes se sont frontalement opposés au texte. C’est un « recul majeur », a jugé la députée socialiste Mélanie Thomin. Les parlementaires insoumis, écologistes et socialistes ont annoncé qu’ils déposeraient des recours au Conseil constitutionnel, estimant pour certains que la loi contrevient aux principes de précaution et de non-régression environnementale.
Revenir sur des surtranspositions
Réclamée par la FNSEA et les JA qui ont salué tous deux après le vote « un premier pas pour relancer notre appareil de production agricole », la loi reste critiquée par la Confédération paysanne, pour qui le texte « sacrifie le monde paysan au profit de l’agro-industrie ». Selon la FNSEA, « cette proposition de loi va permettre de revenir sur des surtranspositions en matière de protection des cultures ; d’ouvrir la voie à une simplification des procédures pour les éleveurs ; d’encourager le développement de l’assurance ; de permettre un meilleur accès à l’eau dans le contexte de changement climatique ; et de tendre à apaiser les relations entre les agriculteurs et l’Office français de la biodiversité (OFB) ». À la veille de l'examen de la proposition de loi, la Coordination rurale (CR) avait indiqué par communiqué le 7 juillet que le texte issu de la CMP était « encourageant mais pas assez ambitieux face aux enjeux agricoles ». Parmi les bons points, la CR soulignait notamment le retour de l'acétamipride, le relèvement des seuils des installations classées (ICPE) en élevage et l'assouplissement des procédures pour le stockage d'eau d'irrigation. Dans leurs communiqués, la FNSEA et les JA avaient salué un texte « qui témoigne d'une écoute attentive des réalités du terrain », mais appelé à une loi spécifique aux ICPE.
« Essai transformé »
La FNSEA parle aujourd'hui d'un « Essai transformé pour l'agriculture française ». « Face aux obstacles, poursuit la FNSEA, aux résistances et aux tentatives de blocage via la diffusion de contrevérités, notre détermination n'a jamais faibli. Ce vote solennel sanctuarise dans un cadre législatif les attentes des agriculteurs. Il apporte une réponse politique claire face à l'exaspération exprimée par le monde agricole et envoie un signal fort à celles et ceux qui, chaque jour, font vivre notre agriculture. C’est un premier pas pour relancer notre appareil de production agricole et poser les fondations d'une reconquête de notre souveraineté alimentaire. Jeunes Agriculteurs et la FNSEA saluent les députés qui ont fait le choix courageux de redonner aux agriculteurs français les moyens de produire et de faire face à une concurrence étrangère souvent déloyale ainsi que l'engagement de la ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire en faveur de ce texte. Ce vote marque un tournant : il traduit une prise de conscience et une réponse attendue à la détresse exprimée depuis de longs mois par le monde agricole. C'est un signal fort envoyé à celles et ceux qui, chaque jour, produisent pour nous nourrir. La Loi d'Orientation Agricole adoptée au printemps dernier avait fixé un cap clair : la reconquête de notre souveraineté alimentaire, dans la perspective du renouvellement des générations en agriculture. Aujourd'hui, cette nouvelle loi met enfin entre les mains des agriculteurs les outils concrets pour y parvenir. Loin des polémiques stériles et des postures idéologiques, elle remet au cœur du débat des mesures de bon sens : protection des cultures, accès à l'eau, construction de bâtiments agricoles, assurance climatique, et simplification des contrôles environnementaux. Autant de leviers essentiels pour permettre aux agriculteurs de produire dans des conditions justes, durables et compétitives, en mettant fin à des surtranspositions françaises incompréhensibles ».
« Moment charnière »
« Ce 8 juillet, précise Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, restera comme un moment charnière pour l'agriculture française. L'adoption de la proposition de loi marque l'aboutissement de plus de 18 mois de mobilisation ininterrompue de nos réseaux Jeunes Agriculteurs et FNSEA. Aujourd'hui, l'ambition de souveraineté alimentaire sort enfin du discours pour entrer dans le droit. Les parlementaires ont pris leurs responsabilités. En votant ce texte, ils ont respecté les engagements pris et reconnu, par leur geste, l'urgence absolue de redonner à notre agriculture les moyens de se relever, de produire, et de durer. Ce vote n'efface pas les difficultés, mais il trace une perspective ». Pour Pierre Horel, président des Jeunes Agriculteurs : « Les promesses formulées par le Gouvernement auprès du monde agricole, il y a un an et demi, sont enfin tenues. Cette loi permettra aux jeunes qui souhaitent s'installer, d'évoluer dans un cadre réglementaire stable et réaliste, qui n'entravera pas leur capacité d'entreprendre. Après avoir franchi cette première étape, nous continuerons de travailler au quotidien pour prévenir les risques qui menacent la pérennité des exploitations. C'est en défendant la souveraineté alimentaire française que nous relèverons les défis économiques, démographiques et climatiques auxquels sont confrontées les prochaines générations. »