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Gel

Sueurs froides pour les viticulteurs et arboriculteurs icaunais

Les vignobles et vergers ont été frappés par quatre nuits de gel les 5, 12, 13 et 14 avril. Les pertes en cours d’estimation semblent limitées en viticulture mais bien plus préoccupantes pour les arbres fruitiers.
Par Orianne Mouton
Sueurs froides pour les viticulteurs et arboriculteurs icaunais
Ballots de paille et bougies de paraffine ont réchauffé l’atmosphère autour de certaines vignes.
En vigne comme en arboriculture, 2018 a été une année de soulagement suivant des années de «galères» liées aux aléas climatiques. Soulagement qui se voit déjà terni par les premières alertes météos de ce début de mois d’avril, où le froid a durement repris ses droits après un redoux précoce qui avait relancé la végétation. Des températures négatives qui sont descendues jusqu’à -7 °C à certains endroits. Dans les vignes, les viticulteurs ont passé de difficiles nuits blanches pour tenter de sauver leur production dans les parcelles les plus prometteuses : aspersion, bougies, bottes de pailles ou chaufferettes ont mouillé et chauffé toute la nuit, voire plus. «À Chablis, l’aspersion a tourné dès le samedi 13 à 21 h jusqu’à 14 h le lendemain !» raconte Régis Ségault, viticulteur à Maligny. «Chez moi, les vignes sont au stade débourrement ou pointe verte, ce n’est pas le plus sensible, tant que le bourgeon n’est pas ouvert. Mais on a quand même eu -5 °C à Maligny…»

Le réseau de stations météo connectées déjà utile
Le réseau de stations météo installé récemment par la Chambre d’agriculture a déjà servi aux viticulteurs comme Régis pour adapter leur protection contre le gel : «J’adhère au réseau de stations météo de la Chambre d’agriculture, j’avais mis une alerte pour m’avertir quand la température atteignait les 0,5 °C, température sous abri, soit environ -1 °C dans les vignes, comme ça je pouvais dormir un peu plus longtemps avant de mettre en place des bougies de chauffage dans une parcelle de Chablis juste au bon moment. Après ces trois nuits blanches exténuantes, on s’est rattrapés sur le sommeil mardi matin !»

Des dégâts modérés en vignes
Il faut attendre encore un peu pour quantifier l’étendue des dégâts, qui s’annoncent quand même légers sur le vignoble icaunais. «D’après les premières observations, il y a un peu de dégâts, de l’ordre de quelques pourcents, sauf ponctuellement où on trouve des situations avec des pertes qui pourraient aller jusqu’à 40 %» explique Guillaume Morvan, spécialiste vigne et vin à la Chambre d’agriculture. «Ce qui a sauvé la situation, c’est la sécheresse de l’air. Quand la température descend progressivement, comme ça a été le cas avec des premières nuits de gel aux températures de -2 °C, -3 °C, et que l’air est sec, les bourgeons résistent mieux. La nuit de samedi à dimanche, qui a été la plus froide, a donc été mieux supportée par la vigne. On est passé entre les mailles cette fois mais ce n’est pas encore gagné, il reste un mois de sensibilité au gel…»

Coup dur en arboriculture
En arboriculture, les dégâts ne sont pas encore quantifiés, mais semblent bien plus importants. Alain Duruz, producteur de cerises, abricots, pêches, nectarines et prunes à Jussy, n’a rien pu faire pour tenter de protéger ses vergers : «Avec 52 îlots pour 8 ha de vergers, c’est impossible de mettre en place une protection efficace et intéressante !» Après une année 2018 très correcte, le secteur repart sur une année compliquée : le gel a probablement eu de lourdes conséquences, qui seront estimées prochainement. «Les vergers étaient en floraison, particulièrement longue cette année. Avec des températures qui sont descendues à -7 °C ici, les dégâts sont là… le cerisier est sensible au gel dès -2,9 °C, donc dans les zones qui ont été les plus touchées, les fonds de vallée et les plateaux, les arbres ont subi le froid. On a attendu 72 heures après la dernière gelée pour effectuer le comptage et avoir une estimation des pertes, on le saura bientôt. En abricots, pêches et nectarines, les dégâts sont sûrement très importants. En cerises, on ne sait pas, entre 40 et 80 % de pertes peut-être… Et en prunes, on verra… En plus des dégâts, il y a un risque que le froid ait provoqué un arrêt de sève : avec les variations de températures, l’arbre est «perdu» et arrête la circulation de la sève, ce qui veut dire plus aucun fruit…» Après une série d’années noires, le secteur arboricole icaunais repart pour une saison économiquement compliquée.