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L'info juridique

Succession : l'attribution préférentielle au profit de l'héritier exploitant

Il n’est pas rare que les exploitations agricoles soient en partie ou totalement constituées de terres et / ou bâtiment qui appartiennent aux parents, au conjoint ou au partenaire d’un PACS du chef d’exploitation en place.

Par Caroline Lombardo

Au moment de l’ouverture de la succession et tant que les opérations de partage ne sont pas terminées, pour éviter le morcellement de l’entreprise agricole, les dispositions des articles 831 et suivants du Code civil prévoient que le conjoint ou tout héritier copropriétaire peut demander l’attribution préférentielle, en propriété ou en jouissance, de l’entreprise agricole à laquelle il participe ou a effectivement participé. L’attribution préférentielle vaut aussi bien pour des biens immobiliers, un fonds agricole, les éléments mobiliers nécessaires à l’exploitation d’un bien rural cultivé par le défunt à titre de fermier, lorsque le bail continue au profit du demandeur à l’attribution, ou sur des parts sociales de société d’exploitation. Elle est de droit, c’est-à-dire que le juge ne peut s’y opposer, lorsque l’attributaire rempli les conditions d’exploitation et que les exploitations ne dépassent pas une superficie qui est fixée par l’arrêté du 22 août 1975 relatif aux limites de superficie donnant droit à l’attribution préférentielle des exploitations agricoles, définit par département et petites régions naturelles. Dans le cadre d’une attribution préférentielle en propriété, les biens issus de la succession seront estimés en valeur libre, quand bien même l’héritier ou le conjoint attributaire dispose d’un bail sur ces biens.

Versement d’une soulte

Notons que la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 3 novembre 2016, a considéré qu’une exploitation agricole a nécessairement une valeur économique identifiable, dès lors que c’est une entité qui dégage des revenus et quand bien même elle n’est exploitée que par bail, qui lui n’a aucune valeur patrimoniale (Cass. Civ. 3e, 3 novembre 2016, pourvoi n°15-20366). L’attributaire devra donc verser une soulte à ses copartageants, qui peut être garantie par une hypothèque prise sur les biens immobiliers attribués ou tout autre gage. En cas de désaccord entre copartageants et lorsque l’attribution préférentielle est soumise à l’appréciation du juge, ce dernier peut prendre en compte la solvabilité du demandeur qui déterminera sa capacité à payer la soulte pour préserver les intérêts en présence. Pour anticiper d’éventuels conflits lors du partage d’une succession comprenant une exploitation agricole et lorsque l’entente le permet, il est vivement conseillé d’évoquer l’ensemble de ces points du vivant des parents / conjoints, en présence des membres de la famille ayant vocation à hériter, au besoin en prenant des renseignements auprès d’un notaire ou d’un juriste pouvant apporter toutes précisions sur ce dispositif. En présence d’une fratrie, il n’est pas rare en effet que l’approche patrimoniale des héritiers, non exploitants, vienne se heurter à l’approche économique de celui qui exploite. L’anticipation permettra de prévenir des conflits familiaux énergivores.