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Développement durable

Quand les eaux usées se soignent par les plantes

Le village d’Escamps dans l’Yonne, a depuis longtemps fait du développement durable un atout majeur pour l’amélioration du cadre de vie de ses habitants. Elle est la première commune du département à s’être dotée de jardins filtrants pour le traitement de ses eaux usées domestiques.

Par Dominique Bernerd
Quand les eaux usées se soignent par les plantes
Christian Chaton le maire d’Escamps, devant les deux premiers bassins filtrants plantés de roseaux

Depuis longtemps engagée dans le développement durable, la commune d’Escamps, dans l’Yonne, sous l’impulsion de son maire, Christian Chaton, a été la première du département à s’équiper d’une station d’épuration zéro rejet, utilisant le principe des jardins filtrants. Il y a plus de dix ans qu’elle a été inaugurée et ne cesse depuis de jouer le rôle de « pompes » biologiques à nitrates et à phosphates pour le traitement des eaux usées des 900 habitants du village.

La phytorestauration est basée sur une biotechnologie utilisant les plantes comme principal agent de traitement des pollutions des eaux. Le concept de filtre végétalisé permettant, via un système de filtres successifs, d’éliminer charges organiques, germes, azote, phosphore et autres polluants. Le principe est simple et repose sur la loi de gravitation naturelle, les jardins filtrants d’Escamps, se composant de trois bassins successifs aménagés en paliers successifs, dans lesquels minéraux et végétaux font office de filtres et d’usine dépolluante. Après être passées par un système de séparation, les eaux domestiques des habitants sont acheminées par des canaux enterrés jusqu’à une cuve de 600 litres, avant de se déverser en aval dans les deux premiers bassins plantés de roseaux phragmites. Elles traversent alors successivement 25 cm de pouzzolane, « une pierre volcanique véritable HLM à bactéries… », selon Christian Chaton, puis différentes couches de granulats de différents diamètres, ainsi que du sable. Cette première filtration fait perdre aux effluents 90 % de leurs matières en suspension, les boues retenues étant déshydratées et compostées sur place, grâce à l’action conjuguée des bactéries et des plantes, pour être ensuite utilisées comme engrais. Phosphates et nitrates sont ensuite captés dans le troisième bassin, où sont implantés joncs, iris aquatiques et roseaux typhas à massette, autant de plantes actives et résistantes, pouvant être utilisées dans les cas de pollution les plus divers. En fin de processus, l’eau résiduelle éventuelle est absorbée par une plantation de saules, aulnes et frênes afin d’éviter tout rejet dans le ru voisin. Et comme ici rien ne se perd, les plantes fauchées et transformées en compost iront enrichir le jardin pédagogique planté à proximité. 

 

Une commune triplement récompensée

Si le procédé s’inscrit dans une optique de développement durable, il ne dénature en rien l’environnement, parfaitement intégré au cœur d’un parc paysagé situé en lisière du village, regroupant une aire de jeux pour jeunes enfants, ainsi que des terrains de sports. Si le coût initial du projet aura été pour la commune de 122 000 €, la réduction des frais de maintenance est une aubaine. Inspirée de la nature, la technologie utilisée réduit les interventions humaines : un dégrillage, une manœuvre de vannes hebdomadaire, un fauchage et un nettoyage annuels suffisent à son fonctionnement. La matière résiduelle des boues étant supprimée de la surface des filtres une fois seulement tous les sept ans. 

Si la station d’épuration «zéro rejet» fait la renommée d’Escamps, il y a longtemps que le maire (dont c’est le 5e mandat !) et son conseil municipal ont œuvré en faveur de l’environnement et du développement durable, plus vécus par les administrés comme une amélioration de leur cadre de vie qu’une contrainte. Il suffit de faire un tour dans le village pour s’en convaincre : éco-parkings, lotissement avec maisons équipées de panneaux solaires, école maternelle à ossature bois, bassin de rétention se transformant l’été en parc paysager, trottoirs enherbés, éclairages leds, récupération des eaux pluviales pour l’arrosage des massifs fleuris… Autant d’initiatives qui ont valu à la commune de se voir décerner en 2013 le Prix départemental de l’environnement, après avoir remporté à deux reprises en 2004 et 2010 la Super palme de l’animation départementale pour ses jardins filtrants et l’aménagement de sa place.