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Politique

Propos de campagne

À l’invitation du sénateur LR Jean-Baptiste Lemoyne, le candidat à la primaire de la droite et du centre Alain Juppé s’est rendu dans le jovinien, visitant notamment un élevage laitier à Saint-Loup-d’Ordon
Par Dominique Bernerd
Propos de campagne
De gauche à droite : Mathilde Lemaître, présidente de JA 89, Alain Juppé, Jean-Baptiste Lemoyne, sénateur de l’Yonne, Francis Letellier, président de la FDSEA 89.
À quelques jours du premier tour des primaires, le candidat Juppé multiplie les visites sur le terrain. Ce mercredi, l’ancien Premier ministre avait rendez-vous avec les acteurs de la ruralité icaunaise à Saint-Loup d’Ordon, une commune à la frontière du Jovinien et du Gâtinais. Au programme du jour : rencontre avec les élus, table ronde en mairie et visite du Gaec des Hirondelles, une exploitation en polyculture élevage laitier.

Francis et Bruno Dewulf y cultivent 325 ha, pour un cheptel de 135 vaches laitières. L’année a été rude et l’heure des comptes est arrivée : «nous sommes passés d’une moyenne quinquennale de 78 q/ha, à 29 q/ha cette année, à peine 36% du rendement de référence. On perd 170 000 € de chiffre d’affaires sur les céréales et la chute du prix du lait n’a fait qu’empirer les choses, avec là encore, un peu plus de 30 000€ de perdus…» Le décor est tracé, la visite de l’exploitation peut commencer. Une visite au pas de charge, timing oblige, encadrée par un barnum médiatique façon visite présidentielle au Salon de l’agriculture.

À quatre jours du premier tour, les médias nationaux sont en quête de «petites phrases» et les télés sont toutes là. Petit tour par l’enclos des veaux et premier bouchon, avant un passage par la salle de traite. L’occasion pour Bruno Dewulf de rappeler l’enjeu du numérique pour le monde rural : «le travail sur écran est important avec un robot de traite et l’Internet Haut Débit indispensable, pour pouvoir se faire dépanner à distance par des réparateurs situés à trois heures de route de la ferme…»     
 
Remettre l’agriculture française au premier rang
Autour de la table : des agriculteurs et des représentants syndicaux, pour un temps d’échange avec le candidat en campagne. L’occasion d’évoquer les sujets d’actualité et rappeler la crise sans précédent que traverse l’agriculture, notamment dans le département. Ces chiffres évoqués par le président de la FDSEA de l’Yonne, Francis Letellier : «selon la MSA de Bourgogne, 7 000 des 17 000 exploitations que compte la région ont des revenus annuels inférieurs à  4 000 €. Et ça, ce sont des chiffres de l’an dernier !»

Appelant à une harmonisation européenne de la fiscalité agricole française : «un exemple simple : le revenu d’un exploitant en Allemagne est inscrit dans les charges, nous en France, il se fait avec ce qu’il reste… À un moment, il va bien falloir reconnaître que le revenu ne peut plus être la variable d’ajustement» L’ancien ministre du budget se dit favorable : «il faut que l’on fasse évoluer le statut fiscal et juridique de l’exploitation agricole, pour qu’elle soit traitée à égalité avec ce qui se passe dans le commerce, l’industrie ou autres secteurs d’activité, notamment sur le lissage de l’imposition…» Sur la crise laitière et les difficultés pour les organisations de producteurs à lutter pour une revalorisation des prix, Alain Juppé est catégorique : «il faut absolument rééquilibrer les relations entre producteurs, centrales d’achat et distributeurs, revoir la loi LME et convaincre Bruxelles que cette vision de la concurrence et des positions dominantes, est d’un autre âge. L’on a besoin d’une organisation suffisamment puissante, pour rééquilibrer les prix par rapport à des secteurs qui eux, se sont déjà regroupés…»

Dénoncée également par le président Letellier : la «sur-transposition» nationale des règles environnementales dictées par Bruxelles : «aujourd’hui, je crois qu’on atteint des sommets ! Il faut simplifier, être clair et surtout, être stable ! On ne peut pas changer de politique environnementale tous les trois jours. Là encore, on a des boulets aux pieds et c’est très démobilisateur, notamment dans le secteur de l’élevage…» Propos de circonstance ou réelle volonté de faire bouger les choses, le candidat aux primaires acquiesce : «je suis évidemment comme vous, sensible à l’avenir de la planète et la nécessité de lutter contre le réchauffement climatique, quitte à faire évoluer les choses, mais il faut le faire dans la durée, en évitant tous les six mois, de nouvelles règles qui bouleversent le jeu…» Citant pour exemple le Comité Interprofessionnel des Vins de Bordeaux, qui s’est fixé un objectif de cinq ans pour recourir à une stratégie durable dans le traitement des vignes. Avec pour conclure, ce vœu formulé par le visiteur du jour : «mon objectif est de remettre l’agriculture française au premier rang de l’agriculture européenne et il faut agir pour cela à tous les niveaux : charges, normes, revenus, investissement, innovation…»

Ils ont dit…

«Il paraît qu’on est des Gaulois…» (A. Juppé)
«On attend de vous et des autres candidats, d’entendre de temps en temps, un message positif sur l’agriculture…» (F. Letellier)
«Je me méfie toujours des ayatollahs de tout poil…» (A. Juppé)
«Aujourd’hui, les générations qui arrivent, ne se sacrifieront pas comme nous nous sommes sacrifiés et je leur donne raison…» (F. letellier)
«On a un talent fou en France, pour vouloir casser ce qui marche…» (A. Juppé)
«Comme tous ces trucs qui viennent de Paris, à un moment donné, quand on est sur le terrain, on va voir le banquier, mais c’est tellement compliqué, qu’on négocie sans l’aide de Manuel Valls…» (B. Dewulf)
«Les journalistes sont restés dehors. Ils sont bien, ils sont à l’air libre, ils vont respirer, ça va leur faire du bien…» (A. Juppé)
«Il faut peut-être travailler à ce que l’Europe soit un peu plus flexible dans son approche budgétaire, pour coller à une agriculture, à des marchés et à des climats qui sont très changeants…» (A. Rondeau)
«On ne nie pas non plus le changement climatique. Arrêtons de dire que c’est pas vrai. Nous le vivons ce changement et on voit bien que ça se dégrade…» (F. Letellier)