Pour rester connecté... au fil du bois
4 500 visiteurs ont arpenté les allées du Marault, le week-end dernier, lors de la 2è édition d’Univerbois. C’est 1500 de moins qu’il y a deux ans. Si la satisfaction des organisateurs et des exposants est palpable quant à la diversité des animations et des échanges, le grand public a un peu boudé l’événement...
Sensibiliser les Nivernais, professionnels et citoyens, aux multiples usages de la forêt et du bois demeure une priorité. Le patrimoine naturel, culturel, touristique et de loisirs qu’ils représentent relèvent de la mutli-fonctionnalité invoquée par tous, à commencer par les élus.
Et le potentiel de développement économique qu’ils impliquent dans la Nièvre ne peuvent pas laisser insensibles tant les demandeurs d’emplois que les chefs d’entreprises dynamiques de ce secteur qui ne demande qu’à s’accroître. Reste que cette 2è édition d’Univerbois, dans une livrée à multiples dimensions, tout à la fois ludique, sociale, pédagogique, professionnelle, médiatique, politique, environnementale et même culturelle, n’a pas pleinement rencontré son public. 4 500 visiteurs sont venus au Marault cette année, contre 6 000 en 2012. 1000 scolaires et professionnels vendredi, 1 600 personnes samedi et 1 400 dimanche. Ce n’est pas si mal, mais peut mieux faire...
A l’heure de tirer les bilans sur l’enracinement de cette manifestation dans le calendrier de la rentrée nivernaise, tous les deux ans, plusieurs explications affleurent les cimes : météo humide du dimanche, conjoncture économique difficile qui freine les foyers à emprunter la voiture pour aller à 15 km et surtout payer les à-côtés (l’entrée était gratuite) pour des enfants gourmands et assoiffés, offre de sorties multiples aux mêmes dates (Superbike à Magny-Cours, Fête du sabot à Challuy, puces et tournoi de tennis à Nevers) qui ont fait de l’ombre au rendez-vous du bois, pourtant programmé depuis plus d’un an... Et si la curiosité du public s’était seulement un peu émoussée depuis la 1ère édition ?
La tenue d’un événement dédié à la forêt et au bois sous toutes ses formes est une démarche fort louable dans un département et une région qui mésestiment parfois tout l’atout et les enjeux de ce secteur-phare et à fort potentiel.
Mais le problème est peut-être ailleurs, dans l’absence d’une sensibilisation récurrente des usagers (et d’une communication des acteurs), de la part de ceux qui, au quotidien, chérissent, entretiennent et valorisent ce noble et riche patrimoine départemental. Un rendez-vous de masse tous les deux ans et puis après ? Certes, les exposants se disent heureux de ce «bon salon», des contacts qui ont été pris, commerciaux, sociaux ou pédagogiques. Mais sans une véritable prise de conscience, en premier lieu des prescripteurs professionnels, et dans un second temps, des usagers potentiels que sont tous les Bourguignons, comment la filière, conçue comme support à son développement multiforme, comment cette filière peut-elle espérer attirer et essaimer? Il manque sans doute un outil, une structure, une association, un site internet, qui fédère les très nombreuses énergies, mais dont les ramifications paraissent souvent dispersées, et qui donne envie au public de rester connecté, toute l’année, au fil du bois...
Un marché du bois sous tension
Responsable de l’ONF dans la Nièvre, Mathilde Cahen était l’une des organisatrices de la vente par adjudication de bois domaniaux et communaux, vendredi dernier au Marault. Cette vente d’automne, l’une des trois de l’année dans l’Ouest-Bourgogne (Nièvre et Yonne), attire habituellement des entreprises plus particulièrement intéressées par des bois de grande qualité pour la fabrication de merrains destinés à la tonnellerie. «C’est là qu’il y a le plus de valorisation. Plus les bois sont gros, plus les rendements intéressent les acheteurs» explique-t-elle. Et la vente a confirmé. «28 acheteurs actifs sont venus, de plus loin que les frontières régionales, et quelques uns n’étaient pas des habitués». Dans les chiffres des résultats aussi, la bonne santé du secteur s’est vérifiée. «Les 195 lots, avec de nombreux additifs suite à la mini-tornade du 8 août dans la forêt des Bertranges, ont presque tous trouvé preneurs. 62 600 m3 ont été vendus sur les 63888 m3 proposés, soit 2% d’invendus, ce qui est d’autant plus rare que les volumes mis en vente ont beaucoup augmenté par rapport à 2013 (56-58 000 m3)». A 95%, il s’agissait de chênes, mais aussi de hêtres et de quelques feuillus précieux. Le chiffre d’affaires a ainsi atteint les 6,35 millions d’euros (contre 4 millions en 2013) dont 5 millions pour les coupes domaniales. Et le prix moyen du chêne observé s’est aussi envolé : «+17% par rapport à l’an dernier. Le marché du merrain porte le marché, en alternance avec celui du sciage, qui le compense quand çà se vend plus ou moins bien. La surprise, cette année, c’est que sur les gros volumes vraiment prisés, on a constaté une stabilité des prix mais sur les petits volumes unitaires, une augmentation de 20 à 30%». Si le marché du bois est en tension, et la tendance nationale est à l’unisson, «c’est qu’il existe un vrai déficit de matière première pour certaines entreprises. C’est notamment dû à une très forte demande à l’export, depuis un an et demi, de la part de pays comme la Chine ou du Maghreb» souligne Mathilde Cahen. Mercredi dernier, des scieurs français manifestaient d’ailleurs devant l’Assemblée nationale pour faire connaître le risque de disparition d’une scierie sur deux dans le pays... «C’est le 2è poste de déficit de la balance commerciale de la France après le pétrole» insiste la responsable de l’ONF. Par exemple, les Chinois, qui importent en France par la mer de nombreux produits manufacturés, utilisent les containers vides au retour pour ramener du bois français qu’ils revendront ensuite, transformé. Alors, les prix flambent. Le marché des merrains est juteux car les vendanges 2014 sont bonnes et qu’il faut beaucoup de tonneaux. Les scieurs achètent plus cher mais restent dépendants de la conjoncture économique puisque «qui peut dire ce que sera la demande des foyers en matière de construction, de rénovation, de bois de chauffage ou de cartons ?» demande Mathilde Cahen. Le paradoxe de cette tension est là, dépendant de conditions économiques et climatiques incontrôlables, d’une demande aléatoire et d’une consommation variable. Elle n’avait jamais vu, vendredi, un lot partir à 380 euro du m3. Elle sait aussi que le houppier peut se vendre moins de 8 euros/m3...