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Grandes cultures

« Nous sommes au bout d’un système »

Étienne Gauthier est polyculteur-éleveur sur la commune de Bona. Il fait le bilan d’une saison de récoltes compliquées qui va l’obliger à revoir complètement son assolement.
Par Théophile Mercier
« Nous sommes au bout d’un système »
Étienne Gauthier au volant de sa moissonneuse.
Il termine actuellement de moissonner ses dernières parcelles de tournesol. Même s’il estime ne pas être « trop à plaindre » par rapport à d’autres, les rendements d’Étienne Gauthier, polyculteur-éleveur sur la commune de Bona avec son frère Jean-Luc et son neveu Émeric, ne sont pas vraiment au rendez-vous : 25 q/ha de moyenne pour 65 ha d’emblavé. «Nous sommes loin des 35 q/ha réalisés en 2017, mais ça, c’était il y a deux ans» déplore-t-il.

Une récolte qui est en partie vendue avant la moisson. «Pour le moment, nous avons engagé 10 quintaux/ha à 375 euros la tonne, J’espère vendre une autre partie prochainement aux alentours de 390 euros la tonne». À titre de comparaison, l’an passé les cours s’étaient envolés jusqu’à 440 euros/t. «De toute manière, je ne suis jamais pressé de vendre. Je préfère tout stocker pour essayer de vendre au meilleur prix, cela me permet souvent de rentrer dans mes frais qui sont d’environ 200 euros/ha de charges opérationnelles» explique le producteur. Sa culture de tournesol vient cette année compenser la perte sèche de colza. «J’avais prévu d’emblaver 60 ha de colza mais finalement au vu des conditions climatiques, j’en ai emblavé 30 ha mais seulement 10 ha ont bien voulu lever, je ne sais même pas si je vais le garder. Je pense que j’aurais dû le faire plus tôt que le 10 août, mais il était difficile de prévoir».

« Je vais devoir revoir mon assolement »
Dans sa conduite, Étienne Gauthier avait prévu de faire du maïs grain mais il a préféré l’enrubanner pour le vendre. «Je me suis dit que ça pouvait rendre service à des collègues et puis j’ai pu libérer ma parcelle pour faire autre chose» explique-t-il. Il a donc réalisé 310 bottes d’enrubannage de 1 tonne de maïs à 38 % de matières sèche vendues 70 euros la tonne.
Pour l’année prochaine, il envisage d’emblaver davantage de pois, de maïs, de tournesol mais aussi de luzerne. « L’avantage de la luzerne, c’est qu’elle repose les sols et elle permet de bien nourrir les bêtes » explique l’éleveur.

S’adapter est une chose, mais changer complètement son assolement en est une autre. Habituellement, Étienne Gauthier sème 150 ha de colza en tête d’assolement, alors que faire à la place et quelle conduite d’exploitation tenir ? Il n’a pour le moment pas de réponse à cette question. Il avance cependant quelques pistes de réflexions : «Il faut limiter les charges donc le semis direct pourrait être une possibilité et pour l’élevage un chargement moins important permettrait de réduire les fourrages. La question d’une race de bovin plus rustique peut se poser. Une chose est sûre, c’est que nous sommes au bout d’un système» déplore-t-il.

Comme plusieurs de ses collègues, Étienne Gauthier aimerait que la réglementation soit plus souple et qu’elle puisse permettre de faire plus de retenues d’eau. «Je pourrais ainsi irriguer quelques parcelles et donner tout simplement à boire à mes animaux. Car demain si je n’ai plus d’eau, comment vais-je faire pour abreuver mes vaches ?» s’interroge-t-il en conclusion.

Dégâts de gibier « Il faut renouer le dialogue entre chasseurs et agriculteurs »

En plus d’être exploitant agricole, Étienne Gauthier est responsable du CTL 10 pour le compte de la Fédération départementale des chasseurs de la Nièvre. À l’occasion de l’ouverture de la chasse, il a tenu à nous livrer son point de vue sur la situation des dégâts de gibiers mais aussi sur le nécessaire dialogue que les agriculteurs et les chasseurs doivent avoir afin de neutraliser ce que le président de la Chambre d’Agriculture a récemment qualifié de fléaux. « Mon objectif en tant que responsable de CTL est de favoriser le dialogue entre tous les acteurs. Ce printemps, nous avons clôturé avec l’aide des chasseurs dans mon secteur 125 ha de cultures de maÏs dans lesquelles malgré une population importante de sangliers, il n’y a quasiment pas eu de dégâts. Maintenant il est impératif de diminuer les animaux dans les secteurs ou les dégâts sont très importants. Par ailleurs, il y a sans doute des demandes de dégâts excessives. Certains agriculteurs peuvent avoir la tentation de tirer profit du droit qu’ils ont de déclarer des dégâts. Il faut de toute manière que la situation s’améliore car la FDC ne pourra pas à elle seule indemniser tous les dégâts. Alors qui pour indemniser les agriculteurs demain ? » s’interroge ce chasseur.