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Betteraves

Zoom sur la campagne betteravière

Après la censure du Conseil Constitutionnel sur l'acétamipride, le syndicat betteravier de Champagne Bourgogne s'exprime.

Par Charlotte Sauvignac
Betteraves
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La situation actuelle des betteraves : entre maladies et interdiction de produits phytosanitaires.

Cette année, pour Sébastien Roger, vice-président CGB Champagne Bourgogne, le constat est rude. La jaunisse est revenue plus que jamais au sein des cultures de betteraves. « La présence de jaunisse est très hétérogène. On a quelques explications : on pense que la date de semis a joué un rôle important car les semis précoces sont moins impactés que les semis un peu plus tardifs. Ça ne se joue qu'à une dizaine de jours », explique-t-il. La seconde explication s'appuie sur le manque d'eau, « car tout le monde a des gradients différents de la jaunisse dans la parcelle. Mais là où ça impacte notamment, c'est dans des zones où les conditions étaient moins propices et qui détenaient un peu d'hydromorphie au cours de l'hiver. La betterave est une plante qui pivote beaucoup, donc dans ces parcelles-là, elle a eu du mal à traverser les zones un peu asphyxiées ou compactées et elle a pris du retard dans son développement. Ce qui a augmenté la présence de pucerons », ajoute-t-il. Cet état fait notamment référence à 2020 qui a particulièrement marqué les esprits. « C'est notre année de référence. J'avais perdu 60 % de ma récolte. C'était catastrophique, on avait semé un peu plus tard et les betteraves sortaient juste de terre. Elles étaient vraiment toutes petites, toutes vulnérables. L'arrivée des pucerons a bloqué le développement de la betterave, ce qui est venu s'ajouter la sécheresse », se souvient-il, le cœur serré. Cette année, le constat est moins dramatique, Sébastien Roger a choisi de semer plus tôt, pour permettre à ses cultures de se développer avant que les premières chaleurs annoncent l'arrivée des pucerons verts du pêcher. Et beaucoup d'autres ont choisi de faire la même chose. Malgré tout, le danger n'est jamais loin. L'Institut technique de la betterave (ITB) annonce dans une étude que « le puceron noir est capable d'aller sur une betterave infectée et d'aller porter ce virus sur des betteraves saines », ajoute-t-il. À cette maladie, viennent s'ajouter, « des prix très bas avec des charges qui sont restées très hautes », constate-t-il. Pour pouvoir survivre, le vice-président CGB Champagne Bourgogne, insiste sur le fait de « devoir faire un bon rendement pour assurer une rentabilité de la culture », avoue-t-il. Pour l'instant les coopératives agricoles affichent un prix de 30 à 35 euros la tonne, alors que pour assurer une stabilité « il faudrait des prix qui arrivent à environ 40 euros la tonne ».

Le rôle du néonicotinoïde dans la culture betteravière

Après la crise de la jaunisse en 2020, où l'ITB et l'État ont mené des travaux afin de trouver des alternatives à l'utilisation des néonicotinoïdes, le constat reste le même. « Après cinq ans d'études, nous n'avons pas de solutions suffisamment efficaces. On arrive à diminuer les populations de pucerons, mais on n'arrive pas à les éradiquer ou à vraiment limiter leurs nombres », relève-t-il. Passé de l'imidaclopride à l'acétamipride, avec une « toxicité beaucoup plus faible », les betteraviers se retrouvent aujourd'hui sans solution. Malgré « l'intervention de l'Anses, la plus haute autorité sanitaire européenne qui a émis que ce produit n'était pas dangereux ni pour la biodiversité ni pour l'humain, la culture betteravière se retrouve aujourd'hui sans solution alternative », cite Sébastien Roger. Pour remédier à ces problématiques, les betteraviers ont le droit, aujourd'hui, d'utiliser deux produits par dérogation, « le Movento et le Teppeki ». Sauf qu'à partir de l'année prochaine, la production sera plus complexe, « le movento sera interdit à l'utilisation », confie Sébastien Roger. Résultat des courses, « le teppeki est un produit très sélectif qui vise le puceron et qui n'attaque pas les auxiliaires de culture. La difficulté, c'est qu'il faut que la plante soit suffisamment développée pour permettre au produit d'être utile », développe-t-il. À terme, Sébastien Roger est pessimiste. « Le risque c'est que notre filière disparaisse. On a une rentabilité limitée, et si les agriculteurs prennent une à deux années avec des mauvais rendements et que la culture n'est plus rentable, ils arrêteront », imagine-t-il. Si le nombre de betteraviers diminue, cela aura également un impact sur les usines de transformation, car « ce sont des outils industriels qui ont besoin de passer des volumes importants pour écraser les charges fixes. Depuis une dizaine d'années, neuf usines ont fermé, quasiment une par an. Le rayon d'approvisionnement devra augmenter, les charges de transport augmenteront, elles aussi… c'est un ensemble, qui fera qu'à terme, la culture disparaîtra de la plaine », conclut-il. Le 2 septembre prochain, CGB Champagne Bourgogne réalisera une conférence annuelle à la foire de Chalons en présence de Laurent Duplomb et de Franck Ménonville concernant la loi « Entraves ».