Préfecture
«Je sens une agriculture qui peine...»
Renouant avec la tradition, le préfet de l’Yonne a réuni la presse autour d’un petit-déjeuner, pour évoquer l’actualité départementale.

Limitation de la vitesse sur les routes départementales à 80 km/h, recrudescence des cambriolages, problématique de la qualité de l’eau, suppression du passage à niveau de Jonches, attractivité économique du territoire… Autant de sujets abordés par le préfet de l’Yonne, lors d’une réunion matinale avec
la presse locale. L’occasion aussi pour Patrice Latron, de livrer le regard qu’il porte sur l’agriculture icaunaise, près de huit mois après son arrivée dans le département.
«La viticulture va plutôt bien, nonobstant les aléas climatiques qui perturbent l’activité depuis deux ans. C’est un secteur très important, véritable poumon économique du département et il faut espérer que cette année, enfin, il y aura une récolte normale, en quantité comme en qualité. D’après ce que je comprends, le gel cette fois-ci, a été plutôt favorable pour les vignes, empêchant la sève de monter trop vite et donc le bourgeonnement, de se faire trop tôt par rapport aux risques liés au gel printanier… Je suis plus préoccupé par l’agriculture classique, secteur économique fondamental pour la société. Au-delà du fait d’enfoncer des portes ouvertes du style «ce sont les agriculteurs qui nous nourrissent, etc», ce qui est bien sûr vrai, ce sont aussi eux qui façonnent et entretiennent les paysages. Ce sont des gens de caractère et de tradition et j’ai beaucoup d’admiration pour ces personnes attachées à leur terre. Je sens malgré tout, une agriculture en difficulté, ce n’est pas normal que l’on n’arrive pas à se payer un salaire sur son exploitation, ce n’est pas normal que des exploitations ferment… C’est la vie, mais ce n’est pas bon, ce n’est pas sain pour le reste de la société, que l’on ait du mal aujourd’hui, à trouver des jeunes agriculteurs pour assurer la relève… Je sens une agriculture qui peine, face aux aléas climatiques, face aux inondations, à la chute des cours ou aux polémiques inutiles sur les pesticides. Je les sens atteints quand on leur met sur le dos les inondations, ou lorsqu’on les stigmatise face aux terres polluées… On a fait ça pendant des dizaines d’années, mais tout le monde était bien content d’avoir de la production, il fallait consommer, il fallait produire et tout le monde est coupable… Moi je sens une réelle volonté de la part des agriculteurs, de se remettre en question, ils savent que cela ne peut pas durer, qu’il faut faire des efforts et ils les font. On ne peut pas balayer d’un revers de main les techniques de production mises en œuvre depuis l’après-guerre, c’est une question d’évolution des mentalités et des techniques aussi : on ne supprime pas les produits phytosanitaires du jour au lendemain… Il y a une détresse légitime aussi et que je comprends, par rapport aux changements de règles dans les aides, on en crée, on en supprime, on a du mal à les payer, on les paie en retard…
Ce n’est pas bien ! Les services de l’État, les agents de la DDT sont les premiers désolés de ces retards qui exaspèrent le monde agricole… J’ai la volonté d’être aux côtés des agriculteurs de l’Yonne, même s’il ne faut pas se leurrer, le préfet du département a peu de pouvoirs en matière d’agriculture, face à des règles nationales, voire européennes. Il faut les soutenir, car ils vivent une période de transition, technique, d’aléas climatiques, de difficultés financières, qui n’est pas facile…»
Un défaut de pédagogie sur l’eau
Patrice Latron s’est également exprimé sur la problématique liée à la qualité de l’eau dans le département et aux interdictions temporaires de consommation dans plusieurs secteurs du territoire :
«L’eau est un vrai problème dans l’Yonne, avec de nombreux points de captage fermés. Elle est régulièrement polluée et je comprends les inquiétudes d’un certain nombre d’habitants du département. Je constate toutefois à travers la façon dont ces inquiétudes remontent, un défaut d’information… Je pense qu’il y a un défaut de pédagogie sur l’eau. L’ARS fait très bien son travail, mais certaines confusions sont constatées. Il y a deux notions concernant l’eau : la notion de limite de qualité et celle de risque sanitaire et je crains que l’on confonde trop souvent les deux. Autre sujet sur lequel je crains qu’il y ait aussi une confusion, celui concernant les résultats de contrôle de la qualité de l’eau : il y a le contrôle de quantité des pesticides et celui mis en place depuis la rentrée dernière, au sujet des métabolites, qui ne sont pas des pesticides, mais des molécules provenant de la dégradation de ces pesticides. Les effets néfastes des pesticides pour la santé, on les connaît, avec des valeurs limites résiduelles identifiées par l’Anses. Sur les métabolites, on ne les connaît pas encore et cela entretient des craintes qui sont peut-être légitimes et sur lesquelles il faut que l’on communique. La question m’avait été posée lors de la dernière Session de la Chambre d’agriculture mais il est faux de dire que l’Yonne est le seul département à contrôler ces métabolites, toute la région BFC s’y est mise… Les limites de qualité sont fixées par un décret européen de 1998 et constituent un indicateur de la dégradation de la qualité de l’eau. Elles ont pour objectif de réduire la présence de ces composés au plus bas niveau de concentration possible. Donc et je le souligne, ces limites sont inférieures à une valeur à partir de laquelle existe un risque sanitaire pour le consommateur. C’est cette nuance qui est importante : il y a la limite de qualité qui est une recommandation et le risque sanitaire qui lui, est une obligation s’imposant à nous. Les deux choses sont différentes… Je ne suis sous la pression de personne. Je suis préfet de la République et responsable de la santé des habitants de l’Yonne, je peux même dire en être responsable pénalement. Et si on a levé certaines interdictions, comme je l’avais annoncé à la session de la Chambre d’agriculture et assoupli certaines mesures sur les restrictions d’eau, c’est avec mon accord et je l’assume… »
la presse locale. L’occasion aussi pour Patrice Latron, de livrer le regard qu’il porte sur l’agriculture icaunaise, près de huit mois après son arrivée dans le département.
«La viticulture va plutôt bien, nonobstant les aléas climatiques qui perturbent l’activité depuis deux ans. C’est un secteur très important, véritable poumon économique du département et il faut espérer que cette année, enfin, il y aura une récolte normale, en quantité comme en qualité. D’après ce que je comprends, le gel cette fois-ci, a été plutôt favorable pour les vignes, empêchant la sève de monter trop vite et donc le bourgeonnement, de se faire trop tôt par rapport aux risques liés au gel printanier… Je suis plus préoccupé par l’agriculture classique, secteur économique fondamental pour la société. Au-delà du fait d’enfoncer des portes ouvertes du style «ce sont les agriculteurs qui nous nourrissent, etc», ce qui est bien sûr vrai, ce sont aussi eux qui façonnent et entretiennent les paysages. Ce sont des gens de caractère et de tradition et j’ai beaucoup d’admiration pour ces personnes attachées à leur terre. Je sens malgré tout, une agriculture en difficulté, ce n’est pas normal que l’on n’arrive pas à se payer un salaire sur son exploitation, ce n’est pas normal que des exploitations ferment… C’est la vie, mais ce n’est pas bon, ce n’est pas sain pour le reste de la société, que l’on ait du mal aujourd’hui, à trouver des jeunes agriculteurs pour assurer la relève… Je sens une agriculture qui peine, face aux aléas climatiques, face aux inondations, à la chute des cours ou aux polémiques inutiles sur les pesticides. Je les sens atteints quand on leur met sur le dos les inondations, ou lorsqu’on les stigmatise face aux terres polluées… On a fait ça pendant des dizaines d’années, mais tout le monde était bien content d’avoir de la production, il fallait consommer, il fallait produire et tout le monde est coupable… Moi je sens une réelle volonté de la part des agriculteurs, de se remettre en question, ils savent que cela ne peut pas durer, qu’il faut faire des efforts et ils les font. On ne peut pas balayer d’un revers de main les techniques de production mises en œuvre depuis l’après-guerre, c’est une question d’évolution des mentalités et des techniques aussi : on ne supprime pas les produits phytosanitaires du jour au lendemain… Il y a une détresse légitime aussi et que je comprends, par rapport aux changements de règles dans les aides, on en crée, on en supprime, on a du mal à les payer, on les paie en retard…
Ce n’est pas bien ! Les services de l’État, les agents de la DDT sont les premiers désolés de ces retards qui exaspèrent le monde agricole… J’ai la volonté d’être aux côtés des agriculteurs de l’Yonne, même s’il ne faut pas se leurrer, le préfet du département a peu de pouvoirs en matière d’agriculture, face à des règles nationales, voire européennes. Il faut les soutenir, car ils vivent une période de transition, technique, d’aléas climatiques, de difficultés financières, qui n’est pas facile…»
Un défaut de pédagogie sur l’eau
Patrice Latron s’est également exprimé sur la problématique liée à la qualité de l’eau dans le département et aux interdictions temporaires de consommation dans plusieurs secteurs du territoire :
«L’eau est un vrai problème dans l’Yonne, avec de nombreux points de captage fermés. Elle est régulièrement polluée et je comprends les inquiétudes d’un certain nombre d’habitants du département. Je constate toutefois à travers la façon dont ces inquiétudes remontent, un défaut d’information… Je pense qu’il y a un défaut de pédagogie sur l’eau. L’ARS fait très bien son travail, mais certaines confusions sont constatées. Il y a deux notions concernant l’eau : la notion de limite de qualité et celle de risque sanitaire et je crains que l’on confonde trop souvent les deux. Autre sujet sur lequel je crains qu’il y ait aussi une confusion, celui concernant les résultats de contrôle de la qualité de l’eau : il y a le contrôle de quantité des pesticides et celui mis en place depuis la rentrée dernière, au sujet des métabolites, qui ne sont pas des pesticides, mais des molécules provenant de la dégradation de ces pesticides. Les effets néfastes des pesticides pour la santé, on les connaît, avec des valeurs limites résiduelles identifiées par l’Anses. Sur les métabolites, on ne les connaît pas encore et cela entretient des craintes qui sont peut-être légitimes et sur lesquelles il faut que l’on communique. La question m’avait été posée lors de la dernière Session de la Chambre d’agriculture mais il est faux de dire que l’Yonne est le seul département à contrôler ces métabolites, toute la région BFC s’y est mise… Les limites de qualité sont fixées par un décret européen de 1998 et constituent un indicateur de la dégradation de la qualité de l’eau. Elles ont pour objectif de réduire la présence de ces composés au plus bas niveau de concentration possible. Donc et je le souligne, ces limites sont inférieures à une valeur à partir de laquelle existe un risque sanitaire pour le consommateur. C’est cette nuance qui est importante : il y a la limite de qualité qui est une recommandation et le risque sanitaire qui lui, est une obligation s’imposant à nous. Les deux choses sont différentes… Je ne suis sous la pression de personne. Je suis préfet de la République et responsable de la santé des habitants de l’Yonne, je peux même dire en être responsable pénalement. Et si on a levé certaines interdictions, comme je l’avais annoncé à la session de la Chambre d’agriculture et assoupli certaines mesures sur les restrictions d’eau, c’est avec mon accord et je l’assume… »