Accès au contenu
Cultures

« Il y a encore de l’avenir pour le colza »

Alors que récolter du colza dans l’Yonne est devenu difficile ces dernières années, notamment à cause des conditions climatiques, de la forte pression insectes et de la nouvelle directive nitrate, certains agriculteurs persistent et croient en une culture qui était prédominante il y a encore peu, dans le département.
Par Christopher Levé
« Il y a encore de l’avenir pour le colza »
Malgré des rendements qui restent faibles, certains agriculteurs croient toujours à un avenir du colza dans le département. (Photo : Chambre d’agriculture de l’Yonne)
Une fois n’est pas coutume ces dernières années, les rendements en colza n’ont pas été catastrophiques, sans toutefois être considérés comme bons. En moyenne, dans le département, « les rendements vont de 5-7 q/ha à 40 q/ha », indiquait Gilles Robillard, secrétaire générale de la FDSEA 89, dans un précédent article (cf. édition 1588).
Si certains, comme Jean-Yves Bras, agriculteur à Puits-de-Courson (hameau de Saint-Cyr-les-Colons), ont fait une récolte très compliquée cette année avec des rendements qui vont « de 0 à 22 q, avec une moyenne à 10 q sur mes 26 ha de colza », cette culture reste pour lui, comme pour beaucoup, importante dans leur rotation. « Le colza est pour moi l’une des meilleures têtes d’assolement ».

Faire des colzas précoces
Alors, comment expliquer les faibles rendements de cette année ? « Les colzas étaient prometteurs à la sortie de l’hiver. Puis, il y a eu le coup de sec de mars et avril. Et surtout les coups de gelées fin mars et début avril qui ont fait beaucoup de dégâts », explique Jean-Yves Bras. Sans compter la pression insectes toujours forte dans le département. L’hiver doux n’a pas éliminé les nuisibles qui peuvent attaquer les cultures.
Le manque d’eau y est également pour quelque chose. « Cela fait deux ans que je suis sur un secteur très sinistré l’été, à cause du sec », assure Brice Veaulin, agriculteur à Rogny-les-Sept-Écluses. « Il pleut autour, à cinq ou six kilomètres où les colzas lèvent, mais pas ici. Il n’y a pas de raison à cela, ce sont les conditions climatiques ».
Malgré tout, Jean-Yves Bras pense « qu’il y a encore de l’avenir pour le colza dans l’Yonne ». Même si ce dernier avoue être le seul de son secteur à encore cultiver cette plante.
Quant aux solutions pour espérer voir le colza à nouveau se développer convenablement dans le département ? « Cela fait maintenant trois-quatre ans que je fais de l’hybride en essayant de sélectionner des colzas qui ont un gros pouvoir de démarrage, d’adaptation à l’automne et de redémarrage au printemps », détaille Jean-Yves Bras. « Maintenant, il ne faut plus hésiter à faire du colza précoce et demi-précoce. Un colza, il faut qu’il soit assez costaud à la sortie de l’hiver et qu’il ne mette pas trop de temps à monter pour échapper aux insectes ».
Alors, beaucoup sèment de plus en plus tôt. « Historiquement on semait le colza à partir du 20 août. Depuis deux ans, il y a des recommandations qui nous expliquent qu’il faut faire les semis de plus en plus tôt, pour que les colzas soient plus costauds vis-à-vis des insectes, notamment des grosses altises. Cette année, j’ai commencé une partie de mes semis de colza fin juillet derrière des pois. Le reste début août derrière des blés ou des orges d’hiver », développe Brice Veaulin.

Une directive nitrates « pas adaptée »
Brice Veaulin, lui, alimente son colza « avec un engrais localisé pour y emmener toutes les capacités à démarrer correctement. Depuis que l’on fait les bilans azotés, on met de moins en moins d’azote dans nos sols. Alors on se retrouve avec des sols qui ne sont pas assez riches à l’automne et des plantes qui sont trop vulnérables. Et les insectes vont plus facilement sur une plante vulnérable que sur une plante saine ».
Une directive nitrate remise en cause pas bon nombre d’agriculteurs. « Elle n’est pas adaptée au colza », affirme Jean-Yves Bras. « Le fait de ne plus avoir le droit d’apporter de l’azote est une aberration. Car des colzas vont commencer à rougir parce qu’ils vont être en fin d’azote en novembre, alors que cela fait plusieurs années que l’on n’a pas d’hiver. On se tire une balle dans le pied et on pénalise le colza d’entrée. Le cycle s’arrête et le colza commence à hiverner trop tôt. C’est là que les attaques d’insectes viennent s’ajouter et causer de gros dégâts sur la plante ».
Cette année, les semis ont pu se faire « dans de bonnes conditions », entre deux pluies, pour Jean-Yves Bras. En espérant pour les agriculteurs que 2021 soit enfin propice au colza, comme aux autres cultures.