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Révision des ZDS

«Ici, pas une zone défavorisée ?»

Un agriculteur du Val de Saône s’insurge de la révision des zones défavorisées simples qui, dans son état actuel, ferait sortir sa commune du dispositif.
Par Aurélien Genest
«Ici, pas une zone défavorisée ?»
Cyril Fleury, à Labergement-lès-Seurre, est en passe de ne plus toucher l’ICHN.
C’est assurément le dossier le plus chaud du moment. Le syndicalisme a beau mettre la pression, il se heurte à un mur sans oreilles depuis plusieurs mois. La révision des zones défavorisées simples (ZDS) fait grincer des dents plusieurs communes du Châtillonnais, de la vallée de l’Ouche et du val de Saône. A Labergement-lès-Seurre, Cyril Fleury n’arrive pas à croire en cette «aberration» pouvant lui coûter l’ICHN, soit la bagatelle de 6 100 euros par an. «Labergement ne fait plus partie de la carte à ce jour, comme bon nombre d’autres communes. Nous ne sommes peut être pas en pleine zone d’élevage, mais le Val de Saône compte de nombreux éleveurs et de nombreuses prairies, il faut bien le savoir. Si la révision des ZDS se confirmait ainsi, nous irions tout simplement vers la disparition de l’élevage. L’ICHN représente le seul soutien de ces prairies dans le secteur» souligne le producteur de 39 ans.

Des crues qui coûtent cher
Cyril Fleury ne comprend pas les fondements d’une telle révision et rappelle les péripéties des dernières campagnes, à commencer par celle de 2016 : «nous avons subi les conséquences des crues de la Saône avec 60 hectares de prés inondés. Même en attendant juin pour lâcher les animaux, il était encore trop tôt. Les rentrer nous a fait consommer davantage de foin, les stabulations ont dû être à nouveau curées. Les vaches ne sont ressorties que début juillet, avec un retour vers le 20 juillet dans les parcelles les plus touchées ! Certains prés ont dû être broyés, d’autres ont été récoltés avec du foin plus que médiocre. Les animaux ont du être déparasités en conséquence... Au final, nous ne sommes plus reconnus ZDS ? Si ça, ce n’est plus être défavorisés, je n’y comprends plus rien !»

On croise les doigts
Cette baisse de soutiens, qui serait effective dès cette année, n’est vraiment pas la bienvenue dans le Val de Saône, qui vient d’enregistrer sa quatrième mauvaise campagne agricole consécutive. «Je n’arrive pas à imaginer que ce dossier en reste là, je ne vois vraiment pas comment nous pourrions faire» confie l’adhérent FDSEA, qui rappelle au passage les rendements très décevants enregistrés en grandes cultures en 2016. La seule «bonne nouvelle» du moment serait à mettre à l’actif du niveau actuel des cours d’eau, relativement bas pour la saison. Référent du dispositif «Agri-vigilance-inondations-Saône», Cyril Fleury n’exclut pas de nouvelles crues cette année : «nous avons connu trois années de crues  printanières depuis 2012,  nous ne pouvons pas savoir ce qu’il peut arriver cette année. Il paraît que de telles crues arrivent une fois tous les 25 ans : statistiquement parlant, je devrais être tranquille jusqu’à ma retraite mais je crains que ce ne soit pas le cas vu la tournure des derniers évènements. Et pour y croire, encore faudrait-il que l’on entretienne les cours d’eau et que l’on gère beaucoup mieux les écluses...»

Notre incompréhension grandit

L’Europe a souhaité mettre en œuvre une révision des Zones Défavorisées Simples afin d’uniformiser le classement des secteurs soumis à un handicap sur le territoire de l’Union Européenne. En théorie, cela aurait pu ressembler à une bonne idée. En pratique, cela se révèle être une immense aberration, un non-sens incroyable.
Alors que les critères validés successivement pour classer des communes en ZDS continuent de faire entrer des zones qui ne devraient pas y être, les secteurs les plus difficiles de Côte d’Or restent désespérément exclus. Pourtant, leur situation de handicap n’est pas à prouver puisque la première grille (critères biophysiques) les place parmi les plus prioritaires. Or, les éléments pris en compte pour le réglage fin les laissent systématiquement de côté.
Depuis des mois, la FDSEA, relayée par le réseau syndical travaille sur des simulations, propose des critères complémentaires qui permettraient de prendre en compte ces territoires. Nous avons expliqué, entre autres, que le Produit Brut Standard de la viticulture ne pouvait en aucun cas intervenir dans le classement ou non de l’Arrière Côte -Vallée de l’Ouche, que les prés inondables du Val de Saône méritaient, à juste titre, d’intégrer les ZDS, que la prise en compte de références datant de près de 10 ans pour calculer le chargement qui exclut aujourd’hui la petite région du Tonnerrois n’était pas acceptable… Tout le monde est d’accord avec nous ! Sauf que rien ne bouge et que ces secteurs restent en dehors des ZDS et par conséquent exclus des aides qui s’y raccrochent !
Comment nos responsables politiques et administratifs nationaux peuvent-ils faire preuve d’autant d’incohérence ? Comment peut-on admettre qu’un territoire est incontestablement handicapé par ses caractéristiques biophysiques et s’entêter à ne rien faire pour les intégrer aux ZDS ? Nous ne comprenons pas cette attitude inacceptable qui risque de sacrifier toute une partie de notre agriculture.
Nous sommes de plus en plus inquiets quant à l’issue de ce dossier mais nous continuerons à apporter des arguments techniques et à nous mobiliser pour obtenir gain de cause. Espérons que les décideurs retrouveront rapidement un minimum de bon sens !
Samuel BULOT, Secrétaire Général de la FDSEA