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Syndicalisme

FNSEA et JA au Sénat pour défendre la production et les revenus

Réarmer l'agriculture française, c'est le message qu'Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, et Quentin Le Guillous, son homologue des JA, sont venus porter aux sénateurs, le 29 octobre.

Par Berty Robert
FNSEA et JA au Sénat pour défendre la production et les revenus
FNSEA
Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, s'est interrogé, auprès des sénateurs, sur le cap que l'on veut donner à l'agriculture française.

Alors que le débat parlementaire bat son plein sur les projets de loi de finances (PLF2026) et de financement de la Sécurité sociale (PLFSS2026), les deux syndicats agricoles ont rencontré, le 29 octobre, un large parterre de sénateurs pour leur faire passer un message que le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, a résumé : « Il nous faut conserver notre capacité de production pour préserver notre souveraineté alimentaire ». Sur la base de cet objectif clair, il a constaté que la très grande majorité des productions françaises ne parvient plus à l’autosuffisance : « en lait, en porc, en viande bovine, en fruits et légumes… ». Or la crise devient structurelle et les agriculteurs ne comprennent pas le cap fixé à l’agriculture. « Que veut faire le pays pour son agriculture ? », a interrogé Arnaud Rousseau se faisant l’écho des incompréhensions du terrain.

« Produire pour nourrir »

Pour lui, il faut dépasser le discours de Rungis de 2017(1) et revenir à un choix simple : « Produire pour nourrir », en créant des « aménités positives et surtout du revenu ». À la lecture des PLF2026, PLFSS2026 et des premières ébauches de la réforme de la PAC, cette reconquête de la production et du revenu semble au point mort, ont constaté les différents intervenants, pointant des contradictions et des dangers. La FNSEA et JA conviennent qu’un effort budgétaire est nécessaire. Sur le principe, réaliser une économie de 200 millions d’euros sur le budget du ministère de l’Agriculture s’inscrit dans cette démarche. Mais à condition que toutes les structures du ministère participent à cet effort et que ce dernier ne se « concentre pas uniquement sur la compétitivité et l’enseignement agricole » a averti Arnaud Rousseau. De même s’est-il agacé du manque total de concertation sur le dossier de la fiscalisation des biocarburants éthanol (E85) et biodiesel (B100). « Qui peut accepter qu’ils soient soudainement taxés à 380 % pour le premier et 400 % pour le second ? » (voir encadré). Le président s’est aussi insurgé sur la mise en place d’une « taxe comportementale » sur les boissons alcoolisées à la manière de ce qui a été effectué pour le tabac. « On voudrait tuer ce qui reste de viticulteurs qu’on ne s’y prendrait pas autrement », a admonesté Arnaud Rousseau, soulignant au passage que sans les viticulteurs, les feux de l’Aude (15 000 ha brûlés) auraient détruit au moins le double de surface. La question de l’accès à l’eau reste un sujet épineux pour les deux syndicats agricoles.

Une vraie politique de l'eau

La décision de réduire les prélèvements d’eau de 30 à 40 % pour l’agriculture, notamment dans le département de la Vienne, passe très mal. « Pas d’agriculture sans eau », a rappelé Arnaud Rousseau, quand le secrétaire général de JA, Quentin Le Guillous, a pointé « le risque de disparition des exploitations et de la filière semences dans la Vienne. Le stockage de l’eau est une nécessité ». Pour eux, l’État doit avoir, dans ce domaine, une vraie politique ambitieuse. « D’autant que l’agriculture est d’intérêt général majeur et qu’il faut en profiter pour faire reconnaître son intérêt socio-économique », a rappelé Arnaud Rousseau. C’est aussi la vision de nombreux sénateurs, comme Laurent Duplomb, Franck Menonville ou encore Patrick Chauvet qui souhaitent que l’on mette en place des études d’impact en amont des décisions politiques (taxes, normes, etc.). Il faut aussi « éviter d’être plus royaliste que le roi et vouloir anticiper des directives qui ne sont pas encore appliquées », a ajouté Arnaud Rousseau, prenant l’exemple de la directive « taxe énergie » en préparation à Bruxelles. Il faut aussi de la « réciprocité », concernant les accords de libre-échange et « des règles uniques au sein de l’Union européenne » pour éviter les distorsions de concurrence qui pénalisent la France et la font décrocher sur les marchés internationaux. C’est le message qu’avait fait passer quelques minutes plus tôt Laurent Duplomb alarmé par la chute de notre balance commerciale agroalimentaire : « Sur les sept premiers moins de l’année 2025, nous sommes descendus à 8 millions d’euros de bénéfice contre une moyenne de 4 milliards d'euros sur les dix dernières années. Dans le même temps, les Italiens ont un excédent de 8 Md€ et les Espagnols de 12 Md€ », a-t-il observé. Le réarmement de l’agriculture française devient plus qu’urgent.

Biocarburants : les députés rejettent la hausse de la fiscalité

Les députés ont largement rejeté, le 3 novembre en séance publique, une disposition du projet de budget 2026 qui vise à supprimer les avantages fiscaux accordés aux B100 et E85. Un vote « massif et transpartisan », ont salué dans un communiqué les filières françaises des biocarburants agricoles. Pourtant le député macroniste Jean-Luc Fugit avait déposé un amendement pour revenir sur la hausse du E85 mais lisser sur deux ans l'augmentation de la fiscalité sur le B100. Un compromis défendu par la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin, qui a regretté que celui-ci ne puisse être placé avant les amendements de suppression dans l'ordre des votes. Le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 prévoit la fin du tarif particulier pour le B100 et la réduction progressive de l'avantage fiscal pour le carburant E85. Dans l’hémicycle, le groupe écologiste a préféré voter contre la suppression de cette mesure, la France insoumise s'est abstenue. Les débats sur la première partie du budget 2026 reprendront à partir du 12 novembre. Conséquence, l'Assemblée risque de ne pas pouvoir l'examiner en entier avant le 23 novembre à minuit, date à laquelle le gouvernement doit transmettre le texte au Sénat. Si le Parlement ne s'est pas prononcé le 23 décembre, l’exécutif devrait légiférer par ordonnances, une procédure inédite.

(1) Discours du Président de la République Emmanuel Macron le 11 octobre 2017 aux États généraux de l'alimentation.