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Prix des grandes cultures

Didier Guyon : «Il ne faudrait pas que ça dure!»

La situation économique de l’élevage, aggravée par la sécheresse de l’été et les conséquences de la FCO, ne doit pas masquer une autre réalité. L’année est également mauvaise pour les producteurs de grandes cultures. Rencontre avec Didier Guyon, président de la Section Grandes Cultures de la FDSEA 58.
Par Propos recueillis par Emmanuel Coulombeix
Didier Guyon : «Il ne faudrait pas que ça dure!»
Didier Guyon est président de la Section Grandes cultures de la FDSEA 58 et de l’ADMIEN, l’association des irrigants de la Nièvre.
- En réunions syndicales, des voix commencent à s’élever pour alerter sur le prix des cultures. Qu’en est-il réellement ?
En céréales, les prix sont à un niveau supérieur de ceux de l’an dernier, qui avait été une année catastrophique du fait de la germination. Ils avaient même remonté jusqu’à l’été mais ils ont bien redescendu depuis. Le maïs, par exemple, a perdu autour de 20 à 25 euros/t depuis juillet. Il est désormais à 150 euros/t, au lieu de 170. Il y a eu des opportunités et celui qui s’est positionné plus tôt a sans doute bien fait. Mais tout le monde n’a pas pris ce risque.

- Les producteurs nivernais sont-ils plus impactés ?

C’est notre problème de toujours. Nous sommes en zones intermédiaires avec un potentiel de rendement plus faible, comme d’habitude. Du coup, nous réalisons des marges négatives. Il n’y a pas encore de prix qui permette un revenu rémunérateur. Au mieux, nous allons réussir à boucler.

- Pourtant, les prix sont meilleurs qu’en 2014...

Les prix sont plus élevés que l’année dernière et il y avait des coups à faire jusqu’à l’été. Le problème n’est plus de savoir cultiver mais de savoir bien vendre. Le blé était à 170 – 180 euros en juin et c’était le bon moment pour se positionner mais c’est difficile de vendre ce qu’on n’a pas encore. Du coup, certains ont pu anticiper sur la vente de 30% de leurs récoltes attendues, mais pas plus. Et depuis, tout est retombé  : c’est moins bon depuis 3 ou 4 mois.

- Cette baisse des prix s’explique comment ? Par les bonnes récoltes à travers le monde ?

Oui, il y a eu une bonne récolte partout dans le monde et en France particulièrement, avec de la qualité, contrairement à 2014. Il n’ y a même peut-être jamais eu une aussi bonne récolte dans le monde  : pas un pays n’a connu de problème de volume ou de qualité.

- Comment cela est-il vécu dans les campagnes ?
Avec une baisse supplémentaire des aides PAC, bien sûr, il y a de la morosité chez mes collègues. Nous n’en sommes pas encore rendus au niveau des éleveurs, mais si on arrive à boucler l’année, ce sera déjà bien  ! Ce n’est pas comme en Bretagne où ils n’ont plus rien à perdre. Notre difficulté dans la Nièvre, ce sont nos potentiels  : en maïs irrigué, nos rendements tournent autour de 30 q/ha là où ils sont de 90 q/ha dans la Beauce, où les surfaces sont beaucoup plus grandes. Ceux qui irriguent ici arrivent à se tenir mais pour ceux qui font du maïs sec, c’est la catastrophe   ! En colza, orge et blé, les rendements restent corrects, bien plus qu’en 2011, autre année de sécheresse, mais là où les rendements sont corrects, les charges sont en hausse, les aides en baisse et les prix pas au rendez-vous. Il ne faudrait pas que cela dure trop longtemps non plus... C’est la première fois que toutes les productions, à part la vigne, sont impactées la même année. C’est inquiétant. Avec l’industrie et l’aéronautique, l’agriculture, sur le plan économique, était la seule à sortir son épingle du jeu. Il faut que nos dirigeants prennent conscience que si il ne devait plus y avoir d’agriculture dans la Nièvre, ce serait dangereux non seulement pour les paysages, et ses retombées touristiques, mais bien plus encore pour le bilan économique et social du département.